Dans un rapport alarmant publié mardi, Amnesty International a mis en lumière de graves cas de torture et de mauvais traitements infligés à des Irakiens soupçonnés d’affiliation au groupe État islamique et rapatriés depuis la Syrie voisine. Ces révélations choquantes soulèvent des questions sur le respect des droits humains fondamentaux dans le processus de réinsertion de ces détenus.
Des confessions extorquées sous la torture
L’ONG a pu s’entretenir avec huit personnes, sept hommes et une femme, arrêtées en 2023 et 2024 au centre de réinsertion d’Al-Jadaa dans le nord de l’Irak, où sont retenus les Irakiens rapatriés du camp syrien d’Al-Hol. Parmi eux, sept ont subi des actes de torture et d’autres formes de mauvais traitements lors d’interrogatoires menés par les forces de sécurité irakiennes.
Passages à tabac, décharges électriques, positions douloureuses prolongées, immersions forcées… Les méthodes employées pour extorquer des aveux sont d’une cruauté inouïe. Six des personnes interrogées sont aujourd’hui emprisonnées, condamnées sur la base de ces confessions obtenues sous la torture, comme le déplore Amnesty.
Des arrestations souvent arbitraires
Si certaines arrestations peuvent être justifiées, Amnesty souligne que dans bien des cas, une simple accusation d’affiliation à l’EI, parfois en raison d’un lien familial, suffit à entraîner une interpellation. Des querelles personnelles seraient aussi à l’origine de fausses dénonciations. Depuis 2021, environ 80 personnes ont ainsi été arrêtées à Al-Jadaa pour des soupçons d’appartenance à l’organisation terroriste.
Ils m’ont battu, menotté les mains dans le dos et frappé la plante des pieds avec un tuyau. Je ne faisais que répéter “non”, mais ils voulaient que j’avoue des choses que je n’avais pas faites.
Témoignage de “Saleem”, arrêté avec son fils en 2023
L’Irak, un des rares pays à rapatrier ses ressortissants
Malgré ces graves dérives, l’Irak reste l’un des seuls États à organiser le retour régulier de ses citoyens retenus en Syrie, un engagement salué par l’ONU et les États-Unis. Le centre d’Al-Jadaa accueillait encore récemment plus de 2200 personnes, en majorité des femmes et des enfants, dans l’attente de suivre un programme de réinsertion et de vérifications sécuritaires.
Amnesty appelle à une enquête internationale
Face à l’ampleur des exactions rapportées, Amnesty International exhorte les autorités irakiennes à mettre fin immédiatement à ces pratiques et demande l’ouverture d’une enquête par les Nations unies. L’usage de la torture et les mauvais traitements à l’encontre des détenus constituent une violation flagrante du droit international et ne peuvent rester impunis.
Le processus de rapatriement et de réinsertion des Irakiens affiliés à l’EI soulève des questions complexes en termes de sécurité et de justice. Mais il ne peut en aucun cas justifier le recours à la torture et au mépris des droits humains les plus élémentaires. Les révélations d’Amnesty jettent une lumière crue sur les dérives d’un système qui doit impérativement être réformé, sous le regard vigilant de la communauté internationale.