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Autriche : Nehammer conservateur chargé de former le gouvernement

Rebondissement en Autriche : malgré la victoire surprise de l'extrême droite aux législatives, le président charge les conservateurs de former un gouvernement avec la gauche. Une coalition inédite se profile, faute d'allié pour l'extrême droite...

Le paysage politique autrichien connaît un revirement inattendu suite aux élections législatives du 29 septembre. Alors que l’extrême droite du FPÖ est arrivée en tête avec un score historique de près de 29%, c’est finalement le chancelier conservateur sortant Karl Nehammer qui a été chargé par le président de former un nouveau gouvernement, en s’alliant avec les sociaux-démocrates.

Une décision qui rompt avec l’usage voulant que le vainqueur du scrutin soit nommé à la chancellerie et puisse choisir son partenaire de coalition. Mais pour le président écologiste Alexander Van der Bellen, « quand une situation est nouvelle, elle a aussi besoin de nouvelles solutions ». Il a rappelé que tous les partis avaient exclu de gouverner avec le FPÖ dirigé par le controversé Herbert Kickl.

Une main tendue en vain par l’extrême droite

Pourtant, le leader du FPÖ n’a eu de cesse de tendre la main aux autres formations depuis sa victoire, mettant en garde contre « une coalition de perdants » qui serait bâtie pour lui faire barrage. Mais ni les conservateurs de l’ÖVP, habitués à gouverner le pays depuis 1987, ni les autres partis n’ont voulu collaborer avec un Herbert Kickl jugé trop radical, malgré des ouvertures à une alliance sans lui.

Connu pour ses propos complotistes et insultants, M. Kickl se retrouve donc mis sur la touche, au profit d’un attelage inédit entre les deux anciens grands partis du pays, l’ÖVP et le SPÖ. Ensemble, ils ne disposent que d’une courte majorité, ce qui les obligera à s’adjoindre un troisième partenaire, probablement les libéraux de Neos.

Une coalition “d’anciens grands” pour barrer la route au FPÖ

Ce gouvernement à trois têtes, du jamais vu en Autriche, marque un retour aux coalitions d’antan entre conservateurs et sociaux-démocrates, qui ont dominé la vie politique de l’après-guerre jusqu’en 2000. Il vise clairement à contenir la poussée de l’extrême droite, qui promet déjà une opposition musclée.

Le FPÖ dénonce un « non respect des usages » de la part du président et une manœuvre des « vieux partis » pour l’écarter du pouvoir malgré sa légitimité dans les urnes. Mais pour Alexander Van der Bellen, la personnalité clivante d’Herbert Kickl, son passé de ministre de l’Intérieur aux méthodes expéditives et ses outrances verbales le disqualifient pour diriger le gouvernement.

Le défi d’une coalition hétéroclite face aux urgences du pays

Karl Nehammer va donc devoir relever le défi de bâtir une majorité solide avec des partenaires qui ont perdu en influence et se sont opposés par le passé. Les négociations s’annoncent ardues pour concilier les priorités et les styles des trois partis.

Cette coalition hétéroclite devra répondre aux préoccupations des Autrichiens qui ont propulsé l’extrême droite en tête : pouvoir d’achat rogné par l’inflation, coût de l’énergie, immigration… Tout en redonnant confiance en la politique et en contrant la rhétorique antisystème du FPÖ, prompt à agiter les peurs et le ressentiment.

Un exercice d’équilibriste pour le prochain gouvernement, qui ne pourra occulter la nouvelle donne issue des urnes. Avec un parti d’extrême droite désormais incontournable, même relégué dans l’opposition, la politique autrichienne entre dans une ère inédite, lourde d’incertitudes.

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