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Élections législatives désillusionnées au Kurdistan autonome d’Irak

Dans un climat de désillusion, les Kurdes d'Irak ont voté pour élire leur Parlement régional. Malgré la domination des clans politiques rivaux, l'opinion publique semble lasse du statu quo. Les résultats pourraient-ils redistribuer les cartes ?

Ce dimanche, les habitants du Kurdistan autonome dans le nord de l’Irak se sont rendus aux urnes pour élire leurs députés au Parlement régional. Cependant, l’atmosphère était teintée de désillusion, reflétant une certaine lassitude de la population envers le système politique en place. À la mi-journée, seul un électeur sur trois avait voté, selon la commission électorale.

Domination des clans politiques rivaux

Depuis des décennies, deux formations hégémoniques se partagent le pouvoir au Kurdistan irakien : le Parti démocratique du Kurdistan (PDK) du clan Barzani, et l’Union patriotique du Kurdistan (UPK), du clan Talabani. Ces partis ont multiplié les meetings électoraux et mobilisé leurs réseaux partisans en vue de ce scrutin.

Cependant, des experts pointent du doigt un certain désenchantement de l’opinion publique, dans un contexte économique morose. Malgré son autonomie depuis 1991 et ses immenses richesses pétrolières, le Kurdistan irakien fait face à de nombreux défis : corruption, climat d’affairisme, clientélisme, répression des voix dissidentes…

L’espoir d’un changement

Malgré tout, certains électeurs espèrent que ce scrutin apportera du changement. C’est le cas de Qader Souleimane, 80 ans, qui a voté à Souleimaniyeh :

Ces élections doivent mettre fin aux souffrances que sont le chômage et les salaires impayés des fonctionnaires.

Les salaires impayés des fonctionnaires illustrent d’ailleurs le bras de fer entre le Kurdistan et le pouvoir fédéral de Bagdad, chaque camp accusant l’autre d’être responsable des retards.

Une redistribution des cartes ?

Cette année, quatre circonscriptions ont remplacé l’unique circonscription qui recouvrait autrefois toute la région, afin d’affiner la représentation locale. Selon le politologue Shivan Fazil, cette réforme “pourrait conduire à une redistribution des voix et des sièges au sein du prochain Parlement”. Cependant, il estime que le PDK “pourrait encore préserver sa majorité, grâce à sa discipline et cohésion internes”.

Des partis d’opposition comme “Nouvelle génération” ou encore une formation naissante de Lahour Cheikh Zengi, dissident du clan Talabani, pourraient néanmoins bénéficier d’un vote sanction. Selon Hiwa Hadi, candidat du parti Halwest :

Les gens sont insatisfaits et en colère en raison de la hausse des prix et des taxes, des pénuries d’électricité et d’eau.

Vers un gouvernement d’union ?

Une fois élus, les députés voteront pour désigner les successeurs des président et Premier ministre de la région autonome, Nechirvan et Masrour Barzani, cousins et figures du PDK. Comme à Bagdad, la politique au Kurdistan oscille entre décisions majeures prises par consensus entre les principaux décideurs (PDK et UPK) et rivalités et dissensions, sources d’impasses.

Le président Nechirvan Barzani a déclaré espérer “former un gouvernement d’union le plus rapidement possible”. Reste à voir si ce scrutin permettra une véritable redistribution des cartes ou maintiendra le statu quo. Comme le souligne Sazan Saduala, institutrice ayant boycotté le vote : “La répartition des sièges pourrait être modifiée (…) mais l’essence du pouvoir restera la même”.

Les résultats officiels sont attendus dans les 24 heures suivant la fermeture des bureaux de vote. Ils permettront de voir si le vent du changement a réellement soufflé sur le Kurdistan irakien ou si la désillusion des électeurs était fondée. Une chose est sûre : le chemin vers une véritable alternance politique semble encore long et semé d’embûches dans cette région autonome en quête de stabilité.

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