Alors que les élections législatives viennent de s’achever, un débat constitutionnel émerge concernant le sort des 17 ministres démissionnaires élus députés. En effet, la question se pose : ces anciens membres du gouvernement Attal peuvent-ils honorer leur mandat de député tout en ayant exercé des fonctions ministérielles ? Les avis divergent parmi les constitutionnalistes sur cette zone grise de notre loi fondamentale.
Un cumul des mandats qui interroge
Si dans d’autres démocraties le cumul des fonctions de ministre et de député est chose courante, en France cette pratique détonne avec notre tradition politique. Pourtant, aucun texte n’interdit formellement à un ministre de redevenir député, une fois démissionnaire du gouvernement. Une ambiguïté qui ouvre la voie à de multiples interprétations.
Certains arguent que les anciens ministres, forts de leur légitimité électorale, ont tout à fait le droit de siéger à l’Assemblée nationale. D’autres, au contraire, pointent le risque d’une confusion des rôles et d’un affaiblissement du contrôle parlementaire sur l’exécutif.
Une situation inédite sous la Ve République
Si des ministres se sont déjà représentés devant les électeurs par le passé, jamais autant n’avaient été élus dans la foulée de leur démission du gouvernement. Cette situation, fruit d’un contexte politique particulier, met en lumière les angles morts de notre Constitution.
Les constitutionnalistes, qui ne sont pas toujours d’accord sur les solutions, le sont tous sur le constat : la Ve République tâte les angles morts de sa Constitution.
Paule Gonzalès, Le Figaro
L’ubiquité politique en question
Au cœur du débat, la capacité des ministres/députés d’exercer leurs deux fonctions de manière simultanée. Pourront-ils, un jour, défendre un texte gouvernemental au banc des ministres puis le voter quelques instants plus tard dans l’hémicycle ? Une telle ubiquité politique pose question au regard du principe de séparation des pouvoirs.
- Certains y voient une entorse au rôle de contrôle du Parlement
- D’autres soulignent la compatibilité de principe des fonctions électives et ministérielles
Un équilibre des pouvoirs à redéfinir ?
Au-delà du cas des ministres-députés, c’est bien l’équilibre des pouvoirs sous la Ve République qui est interrogé. Face à un exécutif déjà puissant, le Parlement doit-il encore s’affaiblir en voyant certains de ses membres tiraillés entre deux loyautés ? Ou au contraire, ce cumul offrira-t-il un nouveau pont entre gouvernement et Assemblée, à même de fluidifier leurs relations ?
Autant de questions qui animeront sans nul doute les premières semaines de la nouvelle législature. À l’heure où l’Assemblée s’apprête à élire son président, la place qu’y occuperont les ministres démissionnaires élus députés reste plus que jamais à définir. Une clarification qui pourrait bien passer par le Conseil Constitutionnel, voire une révision de notre loi fondamentale.