À quelques jours des élections législatives en France, c’est l’effervescence à Alger. Mais pas celle des grands jours. Dans la capitale algérienne, l’inquiétude est palpable quant à l’issue du scrutin et une possible victoire en masse des candidats du Rassemblement National. Ce parti d’extrême droite, historiquement hostile à l’Algérie, pourrait en effet faire une percée sans précédent à l’Assemblée nationale française et rebattre les cartes des relations diplomatiques entre les deux pays.
Le spectre du RN
Pour comprendre les craintes des Algériens, il faut remonter à 2002. Lors de la présidentielle française, Jean-Marie Le Pen, alors patron du Front National (ancien nom du RN), accède au second tour face à Jacques Chirac. Un choc en Algérie. L’homme est connu pour avoir pratiqué la torture durant la guerre d’indépendance algérienne quand il était lieutenant dans les troupes françaises.
Ici, personne n’a oublié 2002, Le Pen au deuxième tour de la présidentielle. Un para accusé d’avoir torturé les Algériens pendant la guerre !
– Un retraité algérien
Si le traumatisme de 2002 reste vif, c’est surtout la montée en puissance actuelle du RN qui alarme. Porté par Marine Le Pen, le parti multiplie les discours hostiles à l’Algérie et stigmatise régulièrement l’immigration algérienne en France. Résultat, la perspective de voir les députés RN siéger en masse au Palais Bourbon glace le sang des Algériens.
L’inquiétude de la diaspora
En première ligne, la diaspora algérienne installée en France tremble pour son avenir. À l’image de Lamine, boulanger de 45 ans, qui a une partie de sa famille de l’autre côté de la Méditerranée : « On s’inquiète pour eux, bien sûr… Avec un RN fort à l’Assemblée, on a peur d’un durcissement des politiques migratoires et d’une stigmatisation accrue des Algériens de France. »
Quelles conséquences diplomatiques ?
Au-delà de l’aspect humain, ce sont les relations diplomatiques entre l’Algérie et la France qui pourraient pâtir d’un bon score du RN. Les deux pays entretiennent des liens complexes, encore marqués par les blessures de la colonisation et de la guerre d’indépendance. Un groupe RN puissant à l’Assemblée nationale pourrait envenimer la situation.
Même si officiellement, le gouvernement algérien reste discret sur le sujet, en coulisses, la possibilité de voir le RN peser sur la politique française vis-à-vis de l’Algérie suscite de vives inquiétudes. Et la peur d’un retour des vieux démons du passé colonial.
L’histoire bégaie-t-elle ?
Vingt ans après le séisme Le Pen de 2002, c’est un air de déjà-vu qui flotte à Alger à l’approche des législatives françaises. À la différence près que le RN n’est plus le petit parti sulfureux et marginalisé d’alors. Désormais installé dans le paysage politique, il rêve de devenir un acteur majeur du jeu à l’Assemblée.
De quoi donner des sueurs froides à de nombreux Algériens, pour qui une victoire en masse des candidats RN serait un véritable coup de tonnerre, annonciateur de turbulences dans les relations franco-algériennes. Suspense jusqu’au soir du 7 juillet, date du second tour des législatives.