Lors de son discours au Forum économique mondial de Davos ce mardi, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a appelé de ses vœux une Europe plus unie et autonome en matière de défense et de sécurité. Devant un parterre de décideurs économiques et politiques internationaux, le dirigeant a martelé l’importance pour le Vieux Continent de savoir se défendre seul, sans dépendre des États-Unis.
Cette intervention survient quelques heures seulement après l’investiture de Donald Trump à la présidence américaine, dont la cérémonie a été marquée par un discours mettant en avant la primauté des intérêts des États-Unis dans la diplomatie et l’économie mondiales. Une posture qui, couplée à une série de décrets protectionnistes, soulève des questions quant au soutien futur de Washington à ses partenaires européens.
Une Europe qui doit assurer sa propre défense
Face à ces incertitudes, et dans un contexte géopolitique tendu marqué par les menaces que font peser l’alliance entre l’Iran et la Russie, Volodymyr Zelensky a affirmé avec force la nécessité pour l’Europe de développer une « politique européenne de sécurité et de défense unie ». Un appel à l’autonomie stratégique qui traduit les doutes grandissants sur la pérennité de l’engagement américain.
Le président Trump fera-t-il même attention à l’Europe ? Considère-t-il l’Otan comme nécessaire ? Et respectera-t-il les institutions européennes ?
a interrogé le président ukrainien, tout en qualifiant les États-Unis d’« allié indispensable ».
Des questionnements légitimes alors que Washington a, selon Zelensky, « ouvertement signalé que ses priorités en matière de sécurité se situaient au Moyen-Orient et dans la région Asie-Pacifique ». Une réorientation stratégique qui pourrait laisser l’Europe orpheline de son parapluie sécuritaire traditionnel.
L’enjeu crucial des investissements dans la défense
Pour faire face à ce défi, le président ukrainien a exhorté les Européens à accroître significativement leurs investissements dans le domaine de la défense. Une nécessité absolue pour garantir la souveraineté et la sécurité du continent, mais qui se heurte encore aux réticences de nombreux États membres, peu enclins à augmenter leurs dépenses militaires.
Début janvier, Donald Trump avait d’ailleurs fustigé les membres de l’Alliance atlantique, leur demandant de porter leur participation financière en matière de défense à 5% de leur PIB. Une exigence difficile à satisfaire pour des pays européens encore marqués par l’austérité budgétaire post-crise de 2008.
L’expertise ukrainienne en matière de drones
Dans ce contexte, Volodymyr Zelensky a appelé l’Europe à investir dans les drones ukrainiens, dont le pays s’est fait une spécialité depuis bientôt trois ans d’invasion russe. Une expertise que Kiev souhaite mettre à profit pour renforcer les capacités de défense européennes, tout en soutenant son propre effort de guerre.
Le président ukrainien a également pointé du doigt le risque pour l’Europe de se retrouver cantonnée à un rôle de « simple spectateur » des grands équilibres mondiaux, « avec ses dirigeants réduits à poster sur X après qu’un accord a déjà été conclu ». Un avertissement sur la nécessité pour le Vieux Continent de peser davantage dans les affaires internationales.
L’avenir incertain de l’Otan
La question de l’avenir de l’Otan et de l’implication américaine en Europe reste cependant en suspens. Début janvier, Zelensky avait évoqué « l’imprévisibilité » de Donald Trump, qui pourrait selon lui « aider à mettre fin à la guerre » entre l’Ukraine et la Russie. Le nouveau locataire de la Maison Blanche avait ainsi assuré que, s’il était réélu, il mettrait un terme au conflit « en 24 heures ».
Des propos qui laissent planer le doute sur la stratégie américaine vis-à-vis de l’Alliance atlantique et de ses engagements en matière de défense collective. Une incertitude qui ne fait que renforcer l’urgence pour les Européens de prendre en main leur propre destin sécuritaire, comme l’a martelé Volodymyr Zelensky à Davos.
Reste à savoir si cet appel sera entendu par des dirigeants européens encore largement divisés sur les questions de défense et de projection de puissance. Un défi majeur pour une Europe qui aspire à jouer un rôle géopolitique à la hauteur de son poids économique et de ses valeurs.
