Imaginez-vous dans une ville où les lumières s’éteignent sans prévenir, où le ronronnement des climatiseurs s’arrête brutalement, plongeant des millions d’habitants dans l’obscurité et la chaleur étouffante. C’est la réalité quotidienne en Irak, un pays riche en pétrole mais dépendant de son voisin iranien pour une partie de son énergie. Pourtant, une décision récente de Washington vient bouleverser cet équilibre fragile : la fin d’une dérogation permettant à Bagdad d’acheter de l’électricité à Téhéran malgré les sanctions américaines. Pourquoi ce choix maintenant, et quelles conséquences pour un pays déjà à bout de souffle ?
Un Tournant Décisif dans les Relations Énergétiques
Depuis 2018, l’Irak vivait sous une sorte de passe-droit accordé par les États-Unis. Ce privilège, renouvelé régulièrement, autorisait Bagdad à importer de l’électricité et du gaz depuis l’Iran, malgré les sanctions imposées à ce dernier. Mais le 8 mars 2025, tout a changé. Une voix officielle de l’ambassade américaine à Bagdad a confirmé que cette dérogation ne serait pas prolongée, marquant un virage radical dans la politique énergétique régionale.
D’après une source proche du dossier, cette décision s’inscrit dans une stratégie plus large visant à isoler économiquement l’Iran. L’objectif ? Empêcher Téhéran de tirer profit de ses exportations pour financer des activités jugées menaçantes par Washington, comme son programme de missiles ou son soutien à des groupes armés. Mais pour l’Irak, pris entre deux feux, les répercussions pourraient être bien plus immédiates.
L’Irak, un Géant Pétrolier à Bout de Souffle
Avec ses immenses réserves de pétrole, l’Irak pourrait sembler immunisé contre les crises énergétiques. Pourtant, des décennies de guerres et d’instabilité ont laissé ses infrastructures en ruines. Aujourd’hui, environ **un tiers de ses besoins énergétiques** dépendent des importations iraniennes, qu’il s’agisse de gaz ou d’électricité. Cette dépendance est d’autant plus criante que le pays subit des coupures quotidiennes, parfois aggravées par des interruptions imprévues de Téhéran, dues à sa propre consommation interne.
Nous appelons Bagdad à se libérer de cette dépendance le plus vite possible.
– Une déclaration officielle de l’ambassade américaine
Ce message, clair et direct, place le gouvernement irakien face à un ultimatum. Mais est-ce réalisable dans un pays où les promesses d’indépendance énergétique restent souvent des vœux pieux ? Le Premier ministre irakien s’est engagé à réduire cette reliance, mais les défis sont colossaux.
Une Décision aux Conséquences Multiples
Officiellement, les États-Unis minimisent l’impact de cette mesure. Selon leurs chiffres, l’électricité iranienne ne représentait que **4 % de la consommation irakienne en 2023**. Un pourcentage faible, certes, mais qui ne raconte pas toute l’histoire. Dans certaines régions, cette énergie importée est cruciale pour éviter des blackouts complets, surtout en été, lorsque les températures dépassent les 50 °C.
Pour l’Iran, cette annonce est un nouveau coup dur. Privé de ces revenus, Téhéran voit ses marges de manœuvre économiques se réduire encore davantage. Mais pour l’Irak, le vrai casse-tête commence : comment compenser cette perte alors que ses propres centrales peinent à répondre à la demande ?
- Infrastructures vieillissantes : Les centrales irakiennes, souvent obsolètes, ne suivent pas la croissance démographique.
- Climat extrême : La demande explose en été, rendant chaque mégawatt importé précieux.
- Tensions régionales : L’Iran pourrait riposter en coupant le gaz, aggravant la situation.
Vers une Indépendance Énergétique : Mission Impossible ?
Washington ne se contente pas de couper les ponts ; elle exhorte Bagdad à trouver des alternatives. Mais quelles sont les options sur la table ? Diversifier les sources d’énergie semble logique, mais cela demande du temps, des investissements et une stabilité que l’Irak n’a pas. À court terme, le pays pourrait se tourner vers ses propres ressources pétrolières pour alimenter des centrales, une solution déjà évoquée par le passé.
En 2023, une initiative avait été annoncée : payer le gaz iranien avec du pétrole irakien. Une sorte de troc géopolitique qui illustre bien les acrobaties auxquelles Bagdad doit se livrer pour survivre entre ses deux puissants parrains. Mais sans dérogation, même ce système risque de s’effondrer.
Facteur | Situation Actuelle | Impact Potentiel |
Importations Iraniennes | 33 % des besoins | Risque de pénurie accrue |
Production Locale | Insuffisante | Pressions sur le réseau |
Climat | Chaleur extrême | Délestages prolongés |
Un Jeu d’Équilibre Géopolitique
L’Irak n’est pas seulement un consommateur d’énergie ; c’est un terrain où s’affrontent les ambitions de deux géants. D’un côté, l’Iran, voisin influent qui voit en Bagdad un allié stratégique. De l’autre, les États-Unis, déterminés à limiter cette influence tout en maintenant leur propre emprise. Cette décision énergétique est donc autant une question de watts que de pouvoir.
Pour les 46 millions d’Irakiens, les enjeux sont bien plus concrets. Chaque coupure supplémentaire est une épreuve, un rappel que leur avenir dépend de décisions prises à des milliers de kilomètres. Alors que Washington serre la vis, la question reste en suspens : Bagdad saura-t-elle se relever, ou sombrera-t-elle dans l’obscurité ?
Un pays riche en ressources, mais pauvre en solutions : l’Irak face à son destin énergétique.
Et Après ? Les Scénarios Possibles
À l’heure où ces lignes sont écrites, le sort des importations de gaz iranien reste flou. Si elles venaient à être également suspendues, l’Irak pourrait plonger dans une crise sans précédent. Mais d’autres scénarios émergent. Certains experts évoquent une accélération des projets solaires, une ressource abondante dans ce pays ensoleillé. D’autres parient sur des partenariats avec des voisins comme l’Arabie saoudite.
Une chose est sûre : le chemin vers l’indépendance énergétique sera long et semé d’embûches. En attendant, les Irakiens continuent de vivre au rythme des délestages, espérant que la lumière reviendra – au propre comme au figuré.