L’effroyable viol collectif d’une adolescente de 12 ans par deux garçons de 13 ans à Courbevoie a suscité une vague d’indignation. Au-delà de la dimension antisémite révoltante de cette agression, c’est le très jeune âge des agresseurs qui interpelle. Loin d’être un fait divers isolé, les violences sexuelles perpétrées par des mineurs, dont un nombre significatif âgés de moins de 13 ans, constituent un phénomène de société alarmant. Une réalité qui nous oblige à repenser en profondeur notre approche de la délinquance juvénile et de la responsabilité pénale des enfants.
Une Réalité Effrayante et Méconnue
Selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, 46% des auteurs de violences sexuelles sont mineurs, dont 27% âgés de moins de 13 ans. Sur les 26 816 viols recensés en 2023, cela représente des milliers d’agressions commises par de très jeunes adolescents, voire des enfants. Un constat glaçant qui témoigne d’un abaissement inquiétant de l’âge d’entrée dans la délinquance. Pourtant, cette réalité reste encore largement méconnue et sous-estimée.
Le viol de Courbevoie met en lumière l’ampleur d’un phénomène trop longtemps resté dans l’ombre. Il est urgent de s’attaquer aux racines de cette violence chez les très jeunes.
Maurice Berger, pédopsychiatre
Des Parcours Chaotiques et des Carences Éducatives
Derrière ces actes d’une extrême violence se cachent souvent des histoires familiales chaotiques, marquées par la négligence, les maltraitances, les ruptures. Des enfants livrés à eux-mêmes, en manque de repères et de cadre, exposés très tôt à la pornographie violente et aux dérives des réseaux sociaux. « On constate chez ces mineurs délinquants de graves carences éducatives et affectives », souligne le Dr Berger. Un terreau propice à la reproduction de la violence subie.
Repenser la Responsabilité Pénale des Mineurs
Face à ce phénomène, la question de la responsabilité pénale des mineurs se pose avec acuité. Aujourd’hui fixée à 13 ans, elle apparaît inadaptée à la réalité. « Il faut avoir le courage de sanctionner ces actes, même très jeunes, pour poser un interdit clair et protéger les victimes », plaide Maurice Berger. Une évolution qui devra s’accompagner d’un renforcement de la prévention et d’une prise en charge éducative et thérapeutique renforcée des jeunes agresseurs.
Mieux Dépister et Prendre en Charge les Victimes
Autre enjeu majeur : l’amélioration du dépistage et de la prise en charge des victimes. Trop souvent, les signaux d’alerte passent inaperçus, les souffrances sont tues. Il est essentiel de former les professionnels à repérer ces situations et d’offrir aux jeunes victimes un accompagnement adapté sur le long terme. Car les séquelles psychologiques de ces agressions sont durables et profondes.
Un Sujet de Société qui Nous Concerne Tous
Le viol de Courbevoie doit sonner comme un électrochoc. Les violences sexuelles commises par des mineurs ne sont pas une fatalité. C’est un phénomène de société contre lequel nous devons tous nous mobiliser – pouvoirs publics, professionnels de l’enfance, parents, citoyens. En améliorant la prévention, en sanctionnant fermement les agresseurs, en protégeant mieux les victimes. Pour que plus jamais, aucun enfant n’ait à subir l’insoutenable.
Références :
Ministère de l’Intérieur, Statistiques sur les violences sexuelles, 2023
Berger M., Sur la violence gratuite en France, L’Artilleur, 2019
