Ce vendredi, le président socialiste Nicolas Maduro s’apprête à prêter serment pour un troisième mandat à la tête du Venezuela. Une réélection vivement contestée, à l’image de ses 11 années de présidence marquées par la répression de l’opposition et l’exil massif des Vénézuéliens fuyant la crise économique.
Une ascension au pouvoir suivie d’une répression impitoyable
C’est en 2013, à la mort du président Hugo Chavez dont il était le dauphin, que Nicolas Maduro accède à la présidence, à l’issue d’un scrutin déjà contesté. Moins d’un an plus tard, l’opposition manifeste pour réclamer son départ. La répression est brutale : 43 morts en quatre mois. En parallèle, le Venezuela sombre dans une profonde crise économique, la chute des cours du pétrole asphyxiant ce pays qui en tire l’essentiel de ses ressources. Une situation qui poussera plus de 7 millions de Vénézuéliens sur le chemin de l’exil.
L’opposition remporte les législatives mais boycotte la présidentielle
En 2015, l’opposition remporte les élections législatives. Mais la Cour suprême, accusée d’être aux ordres du pouvoir, neutralise le Parlement. La tentative de référendum révocatoire contre Maduro en 2016 échoue. En 2017, de nouvelles manifestations réclamant son départ sont violemment réprimées : plus de 120 morts en 5 mois. Maduro contourne le Parlement en créant une Assemblée constituante qui lui est acquise. L’opposition boycotte la présidentielle de 2018, Maduro est réélu avec 68% des voix.
Juan Guaido, éphémère « président par intérim »
En janvier 2019, Juan Guaido, leader de l’opposition et chef du Parlement, se proclame « président en charge » du Venezuela. Il est reconnu par plus de 60 pays, États-Unis en tête, qui imposent un embargo sur le pétrole vénézuélien. Mais l’appel de Guaido aux forces armées reste lettre morte. Maduro dénonce des complots visant à le renverser et annonce en mai 2020 avoir déjoué une tentative d’invasion. Il se maintient au pouvoir grâce notamment au soutien sans faille de l’armée. L’opposition s’essouffle, la parenthèse Guaido se referme.
Une présidentielle 2024 à nouveau entachée d’irrégularités
Pour la présidentielle de juillet 2024, l’opposition décide cette fois de participer. La libérale Maria Corina Machado remporte largement ses primaires en octobre 2023. Mais dans un contexte géopolitique tendu lié à la guerre en Ukraine, les États-Unis assouplissent leur position vis-à-vis de Maduro en échange de la promesse d’un scrutin transparent. Peine perdue : Machado, largement en tête des sondages, est déclarée inéligible. L’opposition doit se rabattre sur un candidat inconnu : Edmundo Gonzalez Urrutia.
Selon des sources proches de l’opposition, leur candidat aurait obtenu plus de 67% des voix, contre seulement 52% pour Maduro selon les résultats officiels.
Les autorités électorales proclament Maduro vainqueur avec 52% des voix. Elles invoquent un piratage informatique pour justifier l’absence de publication des procès-verbaux des bureaux de vote, suscitant un toll général d’incrédulité. L’opposition affirme détenir la preuve, procès-verbaux de ses scrutateurs à l’appui, que Gonzalez Urrutia a obtenu plus de 67% des suffrages. De nombreux pays refusent de reconnaître la victoire de Maduro et exigent en vain la publication des fameux procès-verbaux.
La répression de la contestation post-électorale est brutale :
- 28 morts et 200 blessés
- 2400 arrestations pour « terrorisme », dont environ 1500 libérations conditionnelles
- Gonzalez Urrutia en exil en Espagne, sa tête mise à prix pour 100 000 dollars
- Maria Machado contrainte à la clandestinité
Isolé sur la scène internationale mais toujours soutenu par l’armée, Nicolas Maduro peut entamer sereinement son troisième mandat. Après 11 années d’une présidence contestée et répressive qui a vu la dislocation de l’opposition et l’exil de millions de Vénézuéliens, l’ancien chauffeur de bus continue de tenir fermement les rênes du pays. En dépit de la profonde crise économique et politique, celui que beaucoup qualifient désormais de dictateur semble aujourd’hui indéboulonnable.