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Venancio Mondlane, le visage de la contestation au Mozambique

Au Mozambique, un leader charismatique enflamme la contestation post-électorale. Ses lives sur les réseaux sociaux électrisent des millions de Mozambicains. Venancio promet le chaos si le résultat des élections n'est pas en sa faveur. La tension est à son comble dans le pays.

Au Mozambique, un vent de contestation souffle avec force depuis les élections présidentielles du 9 octobre dernier. Et cette vague de mécontentement porte un nom : Venancio Mondlane, plus connu simplement sous le prénom de « Venancio ». Cet ingénieur agronome de formation, récemment quinquagénaire, s’est imposé comme le visage de la révolte qui gronde contre le parti historique au pouvoir, le Frelimo. Une proximité singulière lie Venancio à ses partisans, malgré l’exil à l’étranger où il a dû se réfugier.

Des lives sur les réseaux sociaux qui enflamment le pays

C’est à travers ses lives réguliers sur Facebook et les autres réseaux sociaux que Venancio maintient le contact avec le peuple mozambicain. Ses vidéos sont attendues et suivies par des millions de personnes à chaque fois. Lors de son dernier direct, celui qui se présente comme le vrai vainqueur de l’élection présidentielle avec 53% des voix, a promis le « chaos » dans le pays si le Conseil constitutionnel validait les résultats officiels ne lui accordant que 20%.

Venancio a insufflé la « contestation post-électorale la plus dangereuse » de l’histoire du Mozambique selon des experts. En l’espace de deux mois, les violences liées à ce mouvement auraient déjà fait 130 morts, principalement des manifestants tués par balles d’après des ONG locales. Une situation inédite pour ce pays dirigé depuis son indépendance en 1975 par le même parti, le Frelimo, sans véritable opposition.

Un parcours politique atypique

Le parcours de Venancio Mondlane en politique est pour le moins atypique. Cet homme à la coupe afro soignée a écumé la plupart des partis d’opposition mozambicains au fil des années :

  • Il a commencé sa carrière il y a une quinzaine d’années comme commentateur politique très critique du gouvernement sur une chaîne de télé privée.
  • Il a ensuite rejoint le Mouvement démocratique du Mozambique (MDM) avant de le quitter suite à un désaccord.
  • En 2018, il a intégré le principal parti d’opposition historique, la Renamo. C’est sous cette étiquette qu’il s’est présenté aux municipales de la capitale Maputo, scrutin qu’il estime avoir remporté contrairement aux résultats officiels.
  • N’ayant pas été désigné candidat de la Renamo à la présidentielle de 2019, il s’est allié au modeste parti Podemos pour se présenter.

Venancio, l’homme politique 2.0

Mais c’est surtout à travers les réseaux sociaux que « VM7 », comme il est surnommé en référence à Cristiano Ronaldo, a su toucher les Mozambicains. Son dernier live sur Facebook a été visionné plus de 2,4 millions de fois ! À travers ses prises de parole régulières sur internet, Venancio aborde sans tabou les problèmes qui touchent la population comme la corruption, la pauvreté ou les enlèvements. Toujours avec le bon mot, comme lorsqu’il évoque la jeunesse: « Si ce sont des marginaux aujourd’hui, c’est que quelqu’un les a marginalisés ».

Venancio conclut désormais chacun de ses lives d’un « Je vous embrasse, bisous et salut ! » accompagné d’une gestuelle spécifique, telle une marque de fabrique. Une proximité qui séduit, combinée à un charisme indéniable et une aisance oratoire. Autant d’atouts qui enflamment ses meetings, où des foules compactes scandent : « Qui est le candidat du peuple ? C’est Venancio ! » Des performances qu’il réalise debout sur une camionnette lui servant de podium, micro à la main, en faisant corps avec les baffles.

Les autorités dans le viseur

Face à la montée en puissance de la contestation, les autorités mozambicaines semblent désemparées. Une source proche du gouvernement a confié sous couvert d’anonymat : « Pendant 50 ans, le Frelimo a gouverné sans opposition. Après chaque élection, ils se partageaient le gâteau. Mais pour la première fois, quelqu’un leur dit non, le gâteau est à moi ». Le pouvoir en place est d’autant plus inquiet que la crédibilité du scrutin présidentiel a été sérieusement entachée par les nombreuses irrégularités relevées par les observateurs internationaux.

Il faut dire que Venancio Mondlane n’y va pas avec le dos de la cuillère dans ses attaques contre le régime. Il a par exemple appelé à des concerts de casseroles et des opérations escargot pour protester contre la réélection annoncée du président sortant Filipe Nyusi. Des mots d’ordre très suivis par une partie de la population excédée par des décennies de gouvernance du Frelimo.

Une figure clivante mais incontournable

S’il suscite un engouement indéniable auprès des Mozambicains, Venancio Mondlane n’en reste pas moins une figure clivante. Ses détracteurs lui reprochent son ambition personnelle et son côté va-t-en-guerre. Mais même ses opposants reconnaissent en lui un communicant hors pair et un tribun capable de galvaniser les foules. Des qualités qui font cruellement défaut aux caciques du Frelimo, parti vieillissant qui peine à se réinventer après près d’un demi-siècle au pouvoir sans partage.

Une chose est sûre : le phénomène Venancio Mondlane a pris une ampleur inédite au Mozambique. Celui qui n’a de cesse de dénoncer un « hold-up électoral » cristallise tous les espoirs et les colères d’une partie de la population. Ses soutiens sont prêts à le suivre jusqu’au bout dans sa « résistance » face à ce qu’il qualifie de « dictature du Frelimo ». Reste à savoir jusqu’où ira ce bras de fer à hauts risques pour la stabilité et la paix dans le pays. Le Mozambique retient son souffle en attendant le verdict des juges du Conseil constitutionnel.

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