C’est un jour crucial pour l’avenir de l’Union Européenne qui vient de se dérouler à Strasbourg. Après des semaines de négociations tendues et de tractations en coulisses, les eurodéputés ont finalement accordé leur confiance à la nouvelle Commission dirigée par Ursula von der Leyen. Cette validation permettra à l’équipe renouvelée de prendre ses fonctions début décembre, pour un mandat de 5 ans qui s’annonce d’ores et déjà semé d’embûches.
L’urgence de renforcer la puissance économique et stratégique de l’UE
Lors de son discours devant le Parlement, la nouvelle présidente de la Commission n’a pas caché les immenses défis auxquels l’Europe doit faire face. Dans un contexte international de plus en plus instable et compétitif, Ursula von der Leyen a martelé que l’UE n’avait «pas de temps à perdre» pour affirmer sa souveraineté et protéger son modèle social et démocratique.
Première urgence identifiée : combler le retard économique et technologique qui se creuse avec les États-Unis et la Chine. «Notre liberté et notre prospérité dépendent plus que jamais de notre puissance économique», a mis en garde l’ancienne ministre allemande. Elle a promis de tout mettre en œuvre pour stimuler la compétitivité des entreprises européennes, soutenir l’innovation et défendre une concurrence équitable au niveau mondial.
Investir massivement dans la défense pour peser face aux menaces
Autre priorité stratégique soulignée : la nécessité pour l’Europe de muscler significativement ses capacités de défense, alors que le retour annoncé de Donald Trump à la Maison Blanche fait planer le spectre d’un désengagement américain, notamment dans le dossier ukrainien.
La Russie dépense jusqu’à 9% de son PIB dans la défense. L’Europe dépense en moyenne 1,9%. Il y a quelque chose qui ne va pas dans cette équation.
Ursula von der Leyen
Pour la présidente de la Commission, les Européens doivent impérativement augmenter leurs dépenses militaires s’ils veulent rester crédibles et peser dans les grands dossiers géopolitiques des prochaines années. Un véritable électrochoc qui bouscule la traditionnelle réticence de nombreux États membres à abandonner une part de leur souveraineté dans un domaine aussi régalien.
Un vote sous tension, reflet des clivages politiques européens
Si la nouvelle Commission a finalement été approuvée par une nette majorité, le chemin fut long et semé d’embûches. Pendant plusieurs jours, droite et gauche se sont écharpées sur la nomination controversée au poste de vice-président de l’Italien Raffaele Fitto, membre du parti d’extrême droite Fratelli d’Italia.
- Les sociaux-démocrates et les centristes exigeaient le maintien d’un « cordon sanitaire » autour des formations eurosceptiques et radicales.
- De leur côté, le PPE et les conservateurs menaçaient de bloquer l’investiture en échange d’un rééquilibrage des postes clés en leur faveur.
Au final, un compromis a été trouvé in extremis, une première depuis 20 ans. L’épisode reflète les profondes divisions qui traversent le paysage politique européen, et la difficulté croissante à dégager des majorités stables au sein d’un Parlement toujours plus fragmenté.
Une équipe qui penche à droite malgré la quête de « stabilité »
Au final, c’est bien une Commission à dominante conservatrice qui va désormais piloter l’UE, avec une quinzaine de portefeuilles, sur 27, attribués au PPE. Une situation qui n’a pas manqué de faire grincer quelques dents à gauche, à l’image de l’eurodéputée française Raphaël Glucksmann, pour qui « on franchit une ligne rouge » avec cette nouvelle équipe.
À l’inverse, le chef de file du PPE, l’Allemand Manfred Weber, s’est félicité d’une répartition «très équilibrée», et entrevoit même la possibilité d’une majorité allant de l’extrême droite aux Verts. Une analyse rejetée fermement par les sociaux-démocrates et la gauche radicale, qui promettent une opposition vigilante et intransigeante.
Malgré ces dissensions, une priorité semble faire l’unanimité : la nécessité de restaurer la stabilité et la crédibilité de l’édifice européen, dans un contexte international toujours plus menaçant. L’horloge tourne, et il reviendra à Ursula von der Leyen et son équipe de prouver rapidement qu’ils sont à la hauteur de l’enjeu historique. L’avenir de l’Europe est en jeu.