Dans un monde où les tensions internationales et les remises en question du multilatéralisme dominent l’actualité, un vote crucial se tient à Paris pour désigner le prochain directeur général de l’Unesco. Cette organisation, pilier de la coopération mondiale en matière d’éducation, de science et de culture, se trouve à un tournant décisif. Alors que les États-Unis annoncent leur retrait et que des accusations de politisation secouent l’institution, qui prendra les rênes pour les quatre prochaines années ?
Un Vote aux Enjeux Mondiaux
Ce lundi, le Conseil exécutif de l’Unesco se réunit dans la capitale française pour un scrutin qui, bien que techniquement une recommandation, équivaut à une élection. Le choix final sera officialisé le 6 novembre à Samarcande, en Ouzbékistan, lors de la Conférence générale. Cependant, l’histoire montre que le candidat désigné par le Conseil est rarement contesté. Ce vote, impliquant 57 États membres, est donc un moment clé pour l’avenir de l’organisation.
Deux figures se disputent ce poste prestigieux : un ancien ministre égyptien, connu pour son expertise terrain, et un vétéran congolais, incarnation de la connaissance interne de l’Unesco. Leurs visions, bien que différentes, convergent vers un objectif commun : redonner à l’organisation son rayonnement universel.
Les Candidats : Expérience contre Renouveau
Le premier candidat, âgé de 54 ans, est un Égyptien ayant occupé le poste de ministre du Tourisme et des Antiquités entre 2016 et 2022. Égyptologue de formation, il a collaboré avec l’Unesco sur des projets de préservation du patrimoine. Sa proposition ? Apporter un regard neuf et une approche pragmatique, tirée de son expérience de terrain, pour renforcer la visibilité et l’impact de l’organisation.
Je veux montrer que l’Unesco a un impact tangible sur la vie des gens, pas seulement dans le patrimoine, mais aussi dans l’éducation en situation d’urgence et la liberté de la presse.
Face à lui, un Congolais de 69 ans, fort de 35 ans de carrière au sein de l’Unesco, où il a occupé des postes clés, notamment celui de responsable des relations extérieures. Sa force réside dans sa connaissance approfondie des rouages de l’organisation. Il prône un leadership ancré dans l’expérience pour naviguer dans les eaux troubles du multilatéralisme actuel.
Dans ces temps de turbulences, nous avons besoin d’un leader qui connaît les obstacles à éviter et les opportunités à saisir.
Chacun des candidats a sillonné le globe pour rallier les 57 États votants, dans une campagne marquée par des promesses de réforme et de reconquête de la confiance mondiale.
Une Organisation sous Pression
L’Unesco traverse une période de crise sans précédent. Accusée de politisation, elle a vu plusieurs pays remettre en question son impartialité. En mai, le Nicaragua a quitté l’organisation après l’attribution d’un prix à un média d’opposition. Plus récemment, les États-Unis, sous l’administration Trump, ont annoncé leur retrait effectif fin 2026, dénonçant un prétendu parti pris anti-israélien et une orientation idéologique incompatible avec leur politique.
Ce départ américain n’est pas une première. En 2017, Donald Trump avait déjà retiré son pays de l’Unesco, avant qu’Audrey Azoulay, l’actuelle directrice générale, ne parvienne à le faire revenir en 2023. Cette nouvelle défection représente un coup dur, tant sur le plan financier que symbolique. Les États-Unis contribuent à hauteur de 8 % du budget total, une perte qui fragilise les capacités opérationnelles de l’organisation.
Les défis de l’Unesco en chiffres :
- 8 % : Part du budget financé par les États-Unis.
- 57 : Nombre d’États membres votant au Conseil exécutif.
- 2026 : Année du retrait effectif des États-Unis.
Les Défis Financiers : Vers une Nouvelle Stratégie
La perte du financement américain, combinée à la réticence croissante des pays européens à maintenir leurs contributions face à des priorités comme la défense, oblige l’Unesco à repenser son modèle économique. Les deux candidats proposent des solutions audacieuses pour combler ce vide.
L’Égyptien mise sur une augmentation des contributions volontaires des gouvernements, notamment via des mécanismes comme l’échange de dette, où une partie de la dette d’un pays est convertie en fonds pour des projets Unesco. Il souhaite également renforcer le rôle du secteur privé. En 2024, les contributions privées représentaient 8 % du budget, un chiffre qu’il juge insuffisant.
De son côté, le candidat congolais insiste sur l’importance de préserver l’universalité de l’Unesco. Pour lui, le retour des États-Unis est une priorité absolue, car une organisation sans tous ses membres perd sa légitimité. Il propose une diplomatie active pour renouer les liens et stabiliser les finances.
Un Rôle Bien au-delà du Patrimoine
Si l’Unesco est souvent associée à la préservation du patrimoine culturel, comme les pyramides d’Égypte ou les sites de Samarcande, son mandat est bien plus large. L’organisation joue un rôle crucial dans l’éducation en situation d’urgence, la protection des journalistes et la promotion de l’égalité des genres dans les sciences.
Domaine | Exemple d’action |
---|---|
Éducation | Programmes scolaires dans les zones de conflit |
Culture | Protection des sites du patrimoine mondial |
Science | Promotion des femmes dans les STEM |
Communication | Défense de la liberté de la presse |
Cette diversité d’actions fait de l’Unesco un acteur incontournable, mais aussi un défi pour son futur dirigeant, qui devra jongler entre des priorités multiples dans un contexte de ressources limitées.
Un Tournant Historique ?
Le résultat de ce vote pourrait marquer un moment historique. Si l’Égyptien l’emporte, il deviendrait le premier Arabe à diriger l’Unesco, un symbole fort pour la région. Quel que soit le vainqueur, il sera le deuxième dirigeant africain après le Sénégalais Amadou Mahtar Mbow, qui a marqué l’organisation entre 1974 et 1987.
Dans un monde où le multilatéralisme est fragilisé, le prochain directeur général devra non seulement gérer les crises internes, mais aussi prouver que l’Unesco peut rester un espace de dialogue et de coopération. Les défis sont immenses, mais les opportunités le sont tout autant.
Pourquoi ce vote compte :
- Redéfinir le rôle de l’Unesco dans un monde polarisé.
- Restaurer la confiance des États membres.
- Innover pour sécuriser le financement de l’organisation.
Alors que le vote approche, les regards du monde entier se tournent vers Paris. Le choix du prochain leader de l’Unesco ne déterminera pas seulement l’avenir de l’organisation, mais enverra un signal fort sur la viabilité du multilatéralisme dans une ère de divisions. Qui saura relever ce défi ?