C’est une petite révolution qui est en train de s’opérer dans le monde du ski. La station de Saint-Gervais Mont-Blanc, nichée au pied du toit de l’Europe, vient de franchir un cap important en matière d’écomobilité. Depuis septembre dernier, un ingénieux système de télécabines baptisé « Le Valléen » permet de relier directement la gare SNCF du Fayet aux pistes du domaine skiable Évasion Mont Blanc. De quoi faire rêver plus d’un skieur !
Le Valléen, maillon fort d’un réseau de transport innovant
Survolant hameaux et lacets sur plus de 2 km, le Valléen peut transporter jusqu’à 10 personnes par cabine, ainsi que leurs équipements : skis, vélos, poussettes… Un vrai défi technique relevé haut la main. Mais l’ambition va plus loin. Car depuis la gare d’arrivée au centre du village, une deuxième télécabine, l’Alpin, prend le relais pour déposer les passagers directement sur le front de neige, à 1450 m d’altitude.
Cet enchaînement « train + Valléen + Alpin » offre ainsi aux skieurs une expérience inédite et sans couture. Plus besoin de prendre sa voiture pour rejoindre les pistes ! Un atout séduction indéniable pour attirer une clientèle en quête de simplicité et d’évasion, sensible aux enjeux environnementaux.
Une fréquentation au rendez-vous
Et le pari semble d’ores et déjà réussi. Depuis sa mise en service, le Valléen connaît un beau succès populaire, drainant riverains comme vacanciers. Lycéens, familles, sportifs… Ils sont nombreux à avoir adopté ce nouveau mode de déplacement au quotidien. Certains l’utilisent même pour rejoindre le Léman Express et rallier Genève !
Les jeunes l’utilisent déjà comme s’ils étaient nés avec. Cela facilite énormément l’organisation des familles.
Alexandre Merlin, directeur de la STBMA
Un engouement qui devrait encore s’amplifier avec l’ouverture du domaine skiable le 14 décembre prochain. La station espère en effet réduire de 15 000 le nombre de voitures en circulation chaque année et diminuer de 15% ses émissions de CO2. Un beau défi à l’heure du dérèglement climatique.
Une offre globale de mobilité repensée
Mais Saint-Gervais ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Pour compléter son offre, la commune a mis en place un véritable panel de solutions de transport durables :
- Un ascenseur fonctionnant aux eaux usées reliant le village au Parc Thermal
- Des navettes gratuites, électriques ou au gaz naturel, desservant les différents hameaux
- Des parkings relais pour inciter au covoiturage
- Des pistes cyclables pour favoriser les déplacements doux
L’objectif : proposer une alternative crédible et séduisante à la voiture individuelle, en misant sur l’intermodalité et les énergies propres. Un modèle vertueux qui pourrait bien essaimer dans d’autres stations de montagne.
Une initiative encore trop rare
Car pour l’heure, Saint-Gervais fait figure d’exception. Selon nos informations, seule la station des Arcs en Savoie propose un dispositif similaire avec un funiculaire reliant Bourg-Saint-Maurice aux pistes. Mais uniquement pendant la saison hivernale. Le Valléen reste donc une première à l’échelle nationale.
Pourtant, les avantages sont nombreux : réduction des bouchons et de la pollution, amélioration du cadre de vie, attractivité renforcée… Sans oublier les retombées économiques pour le territoire. Car en facilitant l’accès aux pistes, ce type d’installation permet de capter une nouvelle clientèle, notamment étrangère et CSP+, en quête d’expériences haut de gamme et sans contraintes.
Repenser les mobilités en montagne, un impératif
Face à l’urgence climatique et à la nécessité de réduire notre empreinte carbone, repenser les déplacements en montagne apparaît en effet comme un levier d’action prioritaire. Selon une étude récente, le trafic routier représenterait jusqu’à 57% des émissions de gaz à effet de serre en station. Un chiffre alarmant qui appelle des mesures fortes et innovantes.
Le transport par câble s’impose comme une alternative pertinente et d’avenir. Silencieux, sûr et décarboné, il offre une vraie valeur ajoutée aux territoires.
Un expert du secteur
Reste désormais à convaincre élus et décideurs de franchir le pas. Si l’investissement initial peut paraître conséquent (45 millions d’euros dans le cas de Saint-Gervais), le jeu en vaut la chandelle. Car au-delà d’un simple mode de transport, c’est un nouveau modèle de développement, plus durable et résilient, qui se dessine.
La station Mont-Blanc l’a bien compris. En osant miser sur l’écomobilité, elle s’impose comme une pionnière, ouvrant la voie à un tourisme de montagne plus responsable. Un pari audacieux et visionnaire qui pourrait bien faire des émules. Et révolutionner, à terme, notre façon de vivre et de skier au cœur des Alpes.