La détention controversée et l’état de santé préoccupant d’un éminent opposant politique ougandais soulèvent des questions sur le respect des droits humains et la stabilité politique du pays à l’approche de l’élection présidentielle. Kizza Besigye, un ancien médecin personnel du président Yoweri Museveni devenu son rival, a été brièvement hospitalisé après avoir entamé une grève de la faim en prison pour dénoncer ce qu’il qualifie de « détention illégale ».
Un opposant historique face à de lourdes accusations
Kizza Besigye, âgé de 66 ans, est un visage bien connu de l’opposition ougandaise. Rallié à l’opposition il y a 25 ans après avoir été proche du président Museveni, il fait désormais l’objet d’un procès devant une cour martiale pour trahison, une accusation passible de la peine de mort en Ouganda. Arrêté en novembre dernier lors d’un déplacement au Kenya dans des circonstances troubles, M. Besigye clame son innocence et dénonce un acharnement politique.
Une grève de la faim qui inquiète
Pour protester contre sa détention qu’il juge arbitraire, Kizza Besigye a entamé une grève de la faim le 10 février. Presque une semaine plus tard, son état de santé s’est suffisamment dégradé pour nécessiter une brève hospitalisation nocturne dans un établissement privé de la capitale Kampala, avant d’être reconduit à la prison de haute sécurité de Luzira, selon les informations de son avocat.
Il ne mange pas, il boit seulement de l’eau.
Winnie Byanyima, épouse de Kizza Besigye et directrice de l’ONUSIDA
Aperçu pour la dernière fois en public vendredi lors d’une audience au tribunal, l’opposant est apparu affaibli. Son épouse Winnie Byanyima, par ailleurs directrice de l’ONUSIDA, s’est dite « très inquiète » pour sa santé lors d’un sommet de l’Union africaine ce week-end.
Un procès devant une cour martiale qui fait débat
Le fait que Kizza Besigye, un civil, soit jugé par un tribunal militaire soulève des questions de légalité et d’équité des procédures. Fin janvier, la Cour suprême ougandaise avait jugé inconstitutionnel le jugement de civils par des tribunaux militaires, une décision aussitôt contestée par le président Museveni qui y voit un « instrument utile pour la stabilité ».
Sous la pression, le gouvernement a cependant annoncé vouloir accélérer le transfert du procès de l’opposant vers une cour civile, en lui demandant en contrepartie de cesser sa grève de la faim. Mais l’inquiétude demeure sur le respect du droit à un procès équitable.
Une répression accrue à l’approche de la présidentielle
Le cas de Kizza Besigye s’inscrit dans un contexte de durcissement à l’encontre des voix critiques en Ouganda, à moins de deux ans de la prochaine élection présidentielle prévue en janvier 2026. Plusieurs organisations de défense des droits humains et l’ONU s’alarment d’une répression accrue visant l’opposition et la société civile.
Dans un pays dirigé d’une main de fer depuis 1986 par Yoweri Museveni, la perspective d’un nouveau scrutin cristallise les tensions. À 78 ans, le président sortant, régulièrement accusé de dérive autoritaire, devrait briguer un énième mandat.
L’affaire Kizza Besigye apparaît ainsi comme un test pour la démocratie ougandaise. Au-delà du sort d’un opposant, c’est la possibilité d’une réelle compétition électorale et d’une alternance pacifique qui semble en jeu. Dans ce climat tendu, la communauté internationale et la société civile restent vigilantes, appelant au respect des libertés fondamentales et à des réformes pour garantir des élections libres et transparentes.