C’est une découverte qui soulève bien des questions à la frontière entre le Mexique et les États-Unis. Début janvier, les autorités ont mis au jour un tunnel clandestin d’environ 300 mètres reliant la ville mexicaine de Ciudad Juarez à celle d’El Paso au Texas. Un passage souterrain sophistiqué qui intrigue par son ampleur et son équipement.
Un tunnel de contrebande high-tech
D’après les informations communiquées par un responsable militaire mexicain, ce tunnel dissimulé dans un collecteur d’eaux de pluie disposait d’un éclairage, d’une ventilation et même d’un système pour prévenir les effondrements. Avec une hauteur d’environ 1,8 mètre et une largeur de 1,2 mètre, il permettait le passage aisé de personnes ou de marchandises entre les deux pays.
Le général Jose Lemus, en charge de la garnison surveillant le tunnel côté mexicain, estime qu’un tel ouvrage a dû nécessiter « beaucoup de temps, peut-être un ou deux ans » de travaux. Une durée considérable qui soulève la question de la façon dont il a pu être creusé sans attirer l’attention des autorités.
Une enquête en cours sur les constructeurs et utilisateurs
Si les services de sécurité américains et mexicains ont fini par repérer l’existence du tunnel le 10 janvier dernier, de nombreuses zones d’ombre subsistent. Le général Lemus a en effet refusé de préciser depuis quand exactement il était opérationnel, ni qui pourraient en être les constructeurs et les utilisateurs.
Une enquête a été confiée au bureau du procureur général mexicain pour tenter d’éclaircir ces points. Elle devra notamment déterminer s’il y a pu avoir des complicités au sein des autorités pour qu’un tel chantier passe inaperçu. D’après le responsable militaire, des indices sur l’emplacement du tunnel circulaient en réalité parmi les passeurs sur les réseaux sociaux comme TikTok.
Un contexte de tensions migratoires à la frontière
Cette découverte survient alors que le contrôle de la frontière américano-mexicaine est plus que jamais un sujet brûlant. À la veille de l’investiture de Donald Trump lundi, les deux pays ont renforcé leurs mesures de sécurité face à la promesse du président élu républicain d’expulser massivement les migrants illégaux.
Dans ce climat de tensions, l’État mexicain de Chihuahua où se trouve Ciudad Juarez a été le théâtre d’incidents dans un camp de migrants sans papiers. Selon la police locale, un incendie s’y est déclaré alors que les services d’immigration tentaient de transférer des migrants vers Mexico avant leur expulsion du pays. 39 adultes et 17 mineurs ont dû être évacués.
Des tunnels au cœur des trafics transfrontaliers
Au-delà de cet épisode, le tunnel de Ciudad Juarez rappelle que les passages souterrains illégaux restent une réalité persistante à la frontière américano-mexicaine. Qu’ils servent à la contrebande de marchandises, au trafic de drogue ou à l’immigration clandestine, ils défient les dispositifs de surveillance.
Les cartels de la drogue et les organisations criminelles transnationales considèrent les tunnels comme un moyen efficace de contourner les mesures de sécurité et les points de contrôle à la frontière.
– Analyse d’un expert des questions de sécurité
Face à ce phénomène, les autorités américaines et mexicaines coopèrent pour tenter de détecter et de neutraliser ces tunnels. Une tâche ardue tant leur localisation peut s’avérer complexe une fois creusés. Les États-Unis ont mis en place une unité spéciale avec des technologies de pointe, mais la partie de cache-cache continue.
Un défi sécuritaire et humain
Au final, le tunnel reliant Ciudad Juarez à El Paso cristallise les multiples enjeux à la frontière entre le Mexique et les États-Unis. Enjeu sécuritaire avec la lutte contre les trafics en tous genres et la contrebande. Mais aussi enjeu humain avec la question épineuse des flux migratoires et du sort des migrants prêts à tout pour passer.
Si ce tunnel sera prochainement condamné comme l’a annoncé le général Lemus, il ne faut pas s’attendre à ce que le phénomène disparaisse pour autant. Car tant qu’il y aura une forte demande pour traverser cette frontière, par la voie légale ou non, certains tenteront de creuser ces passages sous terre. Un défi sécuritaire et humain qui risque de perdurer.
