Imaginez-vous réveillé à 3 heures du matin par une explosion assourdissante, puis réaliser que le chauffage vient de s’éteindre. Pour des millions d’Ukrainiens, ce n’est plus un cauchemar : c’est le quotidien de l’hiver qui arrive.
Cette année, le froid ne sera pas le seul ennemi. Le système gazier du pays, déjà fragilisé par presque quatre ans de guerre, a subi depuis l’automne une vague d’attaques d’une violence jamais vue. Résultat : l’hiver 2025-2026 s’annonce comme le plus dur depuis le début du conflit.
Un système gazier délibérément visé
Depuis octobre, les infrastructures gazières sont devenues la cible prioritaire des frappes russes. Missiles balistiques, missiles de croisière, drones : tout est employé avec une précision chirurgicale pour mettre hors service les installations vitales.
Les attaques se concentrent surtout la nuit, quand la défense antiaérienne a plus de mal à intercepter les engins. Les conséquences sont immédiates : coupures de courant en cascade, arrêt du chauffage collectif, plus d’eau chaude, perturbation du sommeil pour des centaines de milliers de personnes.
Pour les autorités ukrainiennes et leurs alliés, l’objectif est clair : briser le moral de la population en la privant des conditions minimales de survie en hiver.
Des dégâts colossaux chiffrés à plus d’un milliard de dollars
Le montant des destructions est vertigineux : 1,1 milliard de dollars rien que pour le réseau gazier. Des sites entiers ont été rasés, des réservoirs de stockage éventrés, des installations de compression réduites en débris.
Certaines pièces essentielles, fabriquées sur mesure en Europe ou aux États-Unis, mettront jusqu’à deux ans à être remplacées. En attendant, impossible de remettre en marche les installations touchées.
« Les destructions sont considérables »
Cette phrase, prononcée par le dirigeant de la principale entreprise publique du secteur, résume l’ampleur du désastre. Sur le terrain, les journalistes ont pu constater l’étendue des dégâts : cuves explosées, métal tordu, cratères béants au milieu des champs enneigés.
Une production nationale qui s’effondre
Avant la guerre, l’Ukraine produisait près de 80 % du gaz qu’elle consommait. Aujourd’hui, ce chiffre appartient au passé.
En 2024, la production était déjà tombée à 13,9 milliards de mètres cubes. Pour 2025, elle sera « nettement inférieure ». Un rapport indépendant estime que 50 % des capacités de production de gaz naturel du pays sont désormais hors service.
- 2021 (avant guerre) → environ 20 milliards de m³
- 2024 → 13,9 milliards de m³
- 2025 → chute supplémentaire importante
- 50 % des sites de production détruits ou gravement endommagés
Pour combler le trou, Kiev a dû importer 4 milliards de mètres cubes supplémentaires, pour un coût astronomique de 2 milliards de dollars. Une charge financière insoutenable pour un pays en guerre.
Un quotidien devenu infernal pour des millions de personnes
Dans les grandes villes comme dans les villages, le même scénario se répète. Une alerte aérienne retentit, suivie d’explosions. Quelques minutes plus tard, plus de lumière, plus de chauffage, plus d’eau chaude.
Les écoles ferment, les hôpitaux passent en mode urgence avec des générateurs, les familles se réfugient sous plusieurs couches de couvertures. Les plus chanceux possèdent un poêle à bois ; les autres n’ont plus que la solidarité pour se réchauffer.
Et quand le courant revient enfin, souvent après des heures, c’est pour découvrir que les tuyaux ont gelé ou que la pression de gaz est trop faible pour faire fonctionner la chaudière.
Pourquoi cette stratégie de la terreur fonctionne… et échoue à la fois
En ciblant l’énergie, la Russie mise sur l’épuisement. L’idée est simple : un peuple gelé, épuisé, dans le noir, finira par craquer et exigera la paix à n’importe quel prix.
Mais après presque quatre ans de guerre, l’effet est paradoxal. Oui, la souffrance est immense. Oui, la fatigue est palpable. Pourtant, la détermination reste intacte chez une majorité d’Ukrainiens.
Chaque coupure devient un rappel brutal de pourquoi ils se battent. Chaque nuit sans chauffage renforce la haine envers l’agresseur. La stratégie de la terreur énergétique produit l’effet inverse de celui escompté.
Les solutions d’urgence : bricolage et résilience
Face à l’ampleur des destructions, les autorités multiplient les mesures d’urgence. Distribution de poêles, de couvertures isothermiques, ouverture de « points de chaleur » dans les écoles et les mairies.
Les habitants, eux, redoublent d’ingéniosité : panneaux solaires de fortune, groupes électrogènes partagés entre voisins, isolation renforcée des fenêtres avec du plastique et du scotch.
Dans certains immeubles, les habitants ont même recreusé d’anciennes cheminées condamnées pour pouvoir faire du feu en toute sécurité.
Un hiver qui marquera les esprits
L’hiver 2025-2026 entrera dans l’histoire ukrainienne comme celui de tous les records : le plus froid, le plus sombre, le plus difficile depuis l’indépendance.
Mais il entrera aussi comme la preuve que même privé de tout, un peuple peut continuer à résister. Car derrière chaque appartement glacé, chaque enfant qui dort habillé, chaque grand-mère qui fait bouillir de l’eau sur un réchaud de camping, il y a une volonté farouche de ne pas céder.
Le gaz peut manquer. Le courant peut s’éteindre. Mais tant que cette détermination brûlera dans les cœurs, l’Ukraine tiendra.
Cet hiver, le véritable combustible ne sera pas le gaz russe volé jadis, mais la rage et l’espoir d’un peuple qui refuse de geler.
À retenir : 50 % de la production gazière détruite, plus d’un milliard de dollars de dégâts, des réparations qui prendront des années… L’Ukraine entre dans l’hiver le plus dur de son histoire récente, mais avec une résistance intacte.
Et vous, comment réagiriez-vous si, du jour au lendemain, votre chauffage, votre eau chaude et votre électricité vous étaient retirés pour des mois ? C’est la réalité que vivent des millions d’Ukrainiens en ce moment même.
Ils n’ont pas choisi cette guerre. Ils n’ont pas choisi cet hiver. Mais ils choisissent, chaque jour, de tenir.









