Imaginez une banque tellement grande qu’elle fait trembler tout un pays quand elle vacille. C’est exactement ce qu’a vécu la Suisse avec l’effondrement de Credit Suisse en 2023. Depuis, le gouvernement veut blinder UBS, la dernière géante encore debout. Mais voilà qu’un groupe de parlementaires vient de proposer une solution inattendue… et l’action UBS a immédiatement réagi.
Un bond spectaculaire qui défie le marché
Vendredi dernier, pendant que l’indice suisse SMI reculait de 0,14 %, l’action UBS s’est envolée de 2,51 % pour atteindre 34,33 francs suisses. Un niveau que la banque n’avait plus connu depuis 17 ans. Ce n’est pas tous les jours qu’une valeur aussi lourde réalise une telle performance à contre-courant.
Le déclencheur ? Une information publiée la veille : des élus de plusieurs partis, allant du centre-droit à la droite conservatrice, travaillent sur un compromis face aux exigences très strictes du Conseil fédéral.
Pourquoi le gouvernement veut durcir le ton
Le traumatisme Credit Suisse est encore dans toutes les mémoires. Quand la deuxième banque du pays s’est effondrée, c’est tout le système financier suisse qui a failli basculer. Pour éviter que cela se reproduise avec UBS – désormais deux fois plus grosse après la fusion forcée –, le gouvernement a présenté un projet de réforme ambitieux.
L’objectif : obliger UBS à immobiliser jusqu’à 26 milliards de dollars supplémentaires en fonds propres, surtout pour couvrir les risques de ses filiales étrangères. En clair, la banque devrait garder beaucoup plus d’argent de côté au lieu de le prêter ou de l’investir.
Cette approche, qualifiée d’« extrême » par certains, vise à faire d’autres pays européens ou américains assouplissent leurs règles, la Suisse choisirait la voie la plus dure.
Le compromis qui change tout
C’est là qu’intervient le groupe de parlementaires emmené notamment par le sénateur Thierry Burkart (Parti libéral-radical). Après des discussions décrites comme « constructives » avec la ministre des Finances Karin Keller-Sutter, ils proposent une voie médiane.
« Nous voulons le plus haut niveau de sécurité pour la dernière grande banque d’envergure mondiale en Suisse, mais nous devons également prendre en compte la compétitivité de la place financière suisse. »
Thierry Burkart, sénateur
Concrètement, deux mesures phares sont sur la table :
- Autoriser UBS à utiliser davantage d’obligations AT1 (des dettes convertibles en actions en cas de crise) pour alléger le calcul des fonds propres de ses filiales étrangères.
- En contrepartie, limiter la taille de la banque d’investissement, l’activité jugée la plus risquée.
Cette double approche vise à maintenir une solide protection tout en évitant de pénaliser excessivement la rentabilité d’UBS.
La réaction immédiate d’UBS
La banque n’a pas tardé à réagir. Dans un communiqué, elle a indiqué prendre note de la proposition et estimé qu’elle allait « dans une direction plus constructive que l’approche extrême du Conseil fédéral ».
UBS en a profité pour rappeler un argument qu’elle martèle depuis des mois : la Suisse impose déjà les exigences de capitaux les plus élevées au monde. Aller plus loin alors que les concurrents étrangers relâchent la pression risquerait de compromettre sérieusement la compétitivité de la place financière helvétique.
Un débat plus large sur l’équilibre sécurité/compétitivité
Ce qui se joue ici dépasse largement le cas d’UBS. C’est toute la philosophie de la régulation bancaire suisse qui est en question.
D’un côté, ceux qui privilégient la sécurité absolue : plus jamais une banque systémique ne doit menacer l’économie nationale. De l’autre, ceux qui craignent qu’une régulation trop lourde ne pousse les activités lucratives vers Londres, New York ou Singapour.
Le compromis proposé tente de tracer une troisième voie : renforcer les garde-fous là où c’est nécessaire, mais laisser de la marge de manœuvre là où le risque est maîtrisé.
À retenir : Le projet initial du gouvernement reste en consultation au Parlement. Rien n’est encore voté. Mais l’initiative de ce groupe transpartisan montre que la solution finale pourrait être bien plus nuancée que prévu.
Le simple fait que des discussions avancent dans ce sens a suffi à redonner confiance aux investisseurs. Preuve que le marché déteste l’incertitude réglementaire autant que les exigences excessives.
Le dossier est loin d’être clos. Les prochaines semaines diront si ce compromis parvient à rallier une majorité au Parlement. Une chose est sûre : la Suisse se trouve à un tournant décisif pour l’avenir de sa place financière. Entre prudence extrême et ambition mondiale, elle devra choisir avec soin.
Et vous, pensez-vous qu’il faille privilégier la sécurité à tout prix, ou qu’un peu de souplesse est nécessaire pour rester compétitif ? Le débat ne fait que commencer.









