Imaginez un monde où votre banque traditionnelle vous propose d’envoyer 100 000 dollars à l’étranger en quelques secondes, un dimanche soir, pour une fraction du coût habituel. Ce qui ressemblait encore à de la science-fiction il y a quelques mois devient brutalement concret : une des plus grandes banques américaines vient de lancer un pilote de paiements en stablecoins sur la blockchain Stellar.
Ce n’est pas une petite fintech obscure. C’est U.S. Bancorp, cinquième banque commerciale des États-Unis, 500 milliards de dollars d’actifs, qui franchit le pas. Et le choix de Stellar n’est pas anodin.
Quand la finance traditionnelle dit oui aux stablecoins
Le mouvement est lancé, et il est massif.
Depuis l’élection de Donald Trump et le vent de régulation favorable qui souffle sur Washington, les barrières qui retenaient les grandes banques américaines s’effondrent les unes après les autres. L’abrogation de la règle SAB 121, ce texte qui obligeait les banques à immobiliser 100 % de capital contre les cryptos custodées, a été le déclencheur.
En quelques semaines seulement, U.S. Bancorp a relancé sa custody Bitcoin après trois ans d’arrêt forcé, puis annoncé qu’elle testait activement les stablecoins. Pas juste pour les garder dans un coffre numérique : pour les faire circuler.
Pourquoi Stellar, et pas une autre blockchain ?
La réponse est venue directement de Mike Villano, responsable des produits d’actifs numériques chez U.S. Bank, lors d’un podcast récent.
« Nous voyons les stablecoins comme une nouvelle façon de déplacer de l’argent sur une blockchain. »
Mike Villano, U.S. Bank
Mais pourquoi Stellar ? La réponse tient en trois mots : contrôle, conformité, performance.
Contrairement à Ethereum ou Solana, Stellar a été conçu dès 2014 avec une vocation financière. Son protocole intègre nativement des fonctionnalités que les institutions adorent :
- Gel d’actifs en un clic (freeze)
- Annulation de transaction (clawback)
- Contrôles KYC/AML au niveau protocole
- Frais ridicules (0,00001 XLM par transaction)
- Finalité en 5 secondes
Pour une banque, c’est le rêve : garder le contrôle total tout en profitant des avantages de la blockchain. Villano l’a dit clairement : « On peut intégrer ces protections directement dans la couche protocole, pas juste dans la logique applicative. »
Un retour discret mais stratégique dans la crypto
U.S. Bancorp n’a jamais vraiment quitté la crypto, même pendant les années sombres.
Dès 2021, elle proposait de la custody Bitcoin à ses clients institutionnels. Puis la Fed et les exigences de capital ont tout bloqué. Trois ans de silence. Mais en coulisses, les équipes n’ont jamais arrêté de travailler.
Octobre 2025 : Gunjan Kedia, présidente de la banque, lâche la bombe lors de la conférence earnings : « Nous explorons activement les stablecoins, tant en custody qu’en paiements. » Le marché a à peine réagi. Pourtant, c’est historique.
Un mois plus tard, le pilote Stellar est confirmé. Et ce n’est que le début.
Les autres géants se réveillent aussi
U.S. Bancorp n’est pas seul. Loin de là.
Citibank prépare (discrètement) son propre stablecoin et a choisi Coinbase comme partenaire opérationnel. Goldman Sachs, Bank of America, JPMorgan : tous sont dans des consortiums ou des pilotes.
En Europe, neuf grandes banques ont lancé en septembre un projet commun pour un euro stablecoin réglementé. En Asie, Naver Financial prépare un wallet stablecoin pour décembre.
Le message est clair : les banques traditionnelles ne veulent pas rater le train. Elles préfèrent le conduire.
Ce que ça change concrètement pour vous
À court terme ? Probablement rien. Le pilote reste interne, réservé à quelques clients institutionnels triés sur le volet.
Mais à moyen terme ? Tout.
Quand une banque comme U.S. Bank validera son système, elle pourra proposer à ses clients entreprises :
- Paiements transfrontaliers en quelques secondes au lieu de plusieurs jours
- Frais divisés par 10 ou 20
- Disponibilité 24/7/365
- Traçabilité totale et réversibilité en cas d’erreur ou fraude
- Intégration directe avec les systèmes comptables existants
Pour les trésoriers d’entreprise, c’est une révolution. Pour les particuliers ? Cela viendra plus tard, quand les régulateurs donneront leur feu vert aux stablecoins bancaires grand public.
Stellar, le grand gagnant inattendu ?
Personne ne misait sur Stellar en 2025.
Avec seulement 212 millions de dollars de stablecoins en circulation (contre des dizaines de milliards sur Ethereum et Tron), la blockchain fondée par Jed McCaleb semblait condamnée à rester dans l’ombre.
Et pourtant. Son architecture « finance-first », ses outils de conformité intégrés, et sa capacité à gérer des volumes institutionnels sans congestion en font soudain le choix parfait pour les banques frileuses.
Le cours du XLM a d’ailleurs réagi : +25 % en 48 heures après les premières fuites sur le pilote U.S. Bank. Ce n’est peut-être qu’un début.
Vers une tokenisation totale de la finance ?
Le stablecoin n’est que la première étape.
Une fois que les banques auront validé la technologie pour les dollars numériques, viendra le tour des obligations, actions, fonds monétaires, immobilier fractionné… Tout ce qui est aujourd’hui sur papier ou dans des bases de données privées pourra être tokenisé.
Et là, la blockchain ne sera plus une option. Elle sera l’infrastructure par défaut.
U.S. Bancorp, avec son pilote Stellar, ne fait pas que tester un nouveau moyen de paiement. Elle pose la première pierre d’un système financier entièrement nouveau.
Et nous sommes aux premières loges.
Le futur de la banque commence maintenant
Une grande banque américaine vient d’ouvrir la porte que tout le monde croyait fermée à double tour. Les stablecoins ne sont plus l’apanage des cryptonautes : ils entrent dans le cœur du système financier traditionnel. Et ce n’est que le début.
La prochaine fois que vous ferez un virement SEPA qui mettra trois jours ouvrés, souvenez-vous de ce pilote. Il est en train de rendre ce délai complètement obsolète.
La finance traditionnelle ne meurt pas. Elle se transforme. Et elle le fait plus vite qu’on ne le croit.
