La nomination par Donald Trump d’un de ses proches au poste de ministre de la Justice provoque une vive polémique à Washington. Matt Gaetz, élu de Floride à la Chambre des représentants, est en effet accusé de graves délits, notamment d’avoir eu une relation sexuelle avec une mineure de 17 ans. Des allégations qu’il nie farouchement.
Mais le timing interroge : cette annonce surprise intervient alors qu’une enquête parlementaire sur les agissements reprochés au sulfureux élu venait de s’achever, après sa démission express mercredi soir. Si Matt Gaetz clame avoir bénéficié d’un non-lieu dans une enquête fédérale parallèle, les conclusions de la commission d’éthique de la Chambre pourraient s’avérer embarrassantes.
Le camp républicain divisé sur la publication du rapport
C’est là que le bât blesse. Car le président républicain de la Chambre, Mike Johnson, un fidèle parmi les fidèles de Donald Trump, s’oppose fermement à la publication de ce rapport. Arguant que le document n’est encore qu’un “brouillon sommaire”, il juge qu’il ne serait pas “adéquat” de le rendre public maintenant que Matt Gaetz a quitté le Congrès.
Une position qui fait grincer des dents jusque dans son propre camp. Adam Schiff, élu démocrate et farouche pourfendeur de Trump, estime au contraire indispensable que le Sénat, qui doit statuer sur cette nomination controversée, puisse avoir accès aux conclusions de l’enquête parlementaire :
Allons-nous vraiment avoir un ministre de la Justice contre lequel il existe des accusations crédibles d’implication dans l’exploitation sexuelle de mineure, de potentielle consommation illicite de drogue et d’obstruction à une enquête ?
Adam Schiff, élu démocrate à la Chambre des représentants
Le Sénat face à ses responsabilités
Pour le nouvel élu sénateur de Californie, si la chambre haute devait confirmer Matt Gaetz sans prendre connaissance du fameux rapport, “cela reviendrait à abdiquer sa responsabilité” constitutionnelle. Une mise en garde à peine voilée à l’adresse des élus républicains qui seraient tentés d’approuver en bloc les choix de Donald Trump.
Car pour Adam Schiff, le président cherche délibérément la confrontation avec ces nominations polémiques : “Trump veut établir que les membres du Congrès ne lui résisteront sur rien”. Un bras de fer qui s’annonce d’autant plus tendu que les démocrates ne disposent que d’une courte majorité au Sénat.
Matt Gaetz, un fidèle de la première heure
Reste que Matt Gaetz n’est pas un allié comme les autres pour Donald Trump. Élu pour la première fois en 2016 à la faveur de la vague trumpiste, ce turbulent quadragénaire s’est taillé une solide réputation de “bad boy” du Congrès. Toujours prompt à déclencher des polémiques, il avait notamment créé la controverse en portant un masque à gaz en pleine séance au début de la pandémie de Covid-19.
Présent à Washington le 6 janvier 2021, il fait partie des élus républicains accusés d’avoir contribué à chauffer les esprits qui ont mené à l’assaut meurtrier du Capitole. Un soutien indéfectible qui lui vaut aujourd’hui les faveurs du président, prêt à le propulser à la tête du ministère de la Justice malgré son manque flagrant d’expérience.
Un choix risqué pour l’avenir de la présidence Trump
Mais cette nomination à haut risque pourrait bien se retourner contre Donald Trump. Déjà fragilisé par de multiples enquêtes judiciaires, le milliardaire joue gros dans la perspective de la présidentielle de 2028. Imposer coûte que coûte des personnalités clivantes comme Matt Gaetz, au mépris de toute éthique, pourrait durablement ternir son image et fracturer son camp.
Pour l’heure, républicains et démocrates retiennent leur souffle dans l’attente de la décision du Sénat. Une chose est sûre : les auditions du futur ministre de la Justice s’annoncent explosives. Matt Gaetz parviendra-t-il à convaincre de sa probité malgré son passif sulfureux ? L’avenir de la présidence Trump pourrait se jouer dans les prochaines semaines.