C’est une page qui se tourne, et pas des moindres. Mercredi, la justice de l’État de Géorgie a purement et simplement enterré la dernière procédure pénale encore pendante contre Donald Trump. L’affaire qui avait fait trembler la politique américaine depuis plus de deux ans s’éteint sans même avoir connu le moindre procès.
Un abandon total et immédiat des poursuites
Le procureur chargé du dossier depuis quelques semaines seulement, Peter Skandalakis, a recommandé l’abandon complet des charges contre Donald Trump et les quatorze autres accusés. Le juge Scott McAfee n’a pas traîné : il a validé la demande dans la foulée. Plus personne ne sera jugé pour les faits reprochés dans ce tentaculaire dossier ouvert en août 2023.
Ce n’est pas une suspension, pas un report. C’est une clôture définitive. Le procureur l’a dit sans détour : poursuivre cette affaire pendant encore « cinq à dix ans » n’aurait aucun sens pour les citoyens géorgiens. Le dossier, selon ses propres mots, était « sous assistance respiratoire » depuis des mois.
« Il n’est pas dans l’intérêt des citoyens de la Géorgie de poursuivre ce dossier pendant encore cinq à dix ans »
Peter Skandalakis, procureur
Pourquoi maintenant ? Les raisons invoquées
Peter Skandalakis a expliqué qu’il s’est lui-même désigné mi-novembre, aucun autre procureur n’ayant accepté de reprendre le bébé. Il a rapidement conclu à l’impossibilité pratique de tenir un procès, même après la fin du second mandat de Trump.
Imaginons le scénario le plus extrême : Donald Trump se présente au tribunal le 21 janvier 2029, au lendemain de son départ de la Maison Blanche. Un procès immédiat ? Impossible. Le procureur estime que 2031 serait déjà un objectif très ambitieux. Trop long, trop coûteux, trop incertain.
Quant à juger séparément les quatorze coaccusés (dont Rudy Giuliani et Mark Meadows), l’idée a été étudiée… puis rejetée. Cela aurait été, selon les termes du procureur, « à la fois illogique et inutilement pénible et coûteuse » pour l’État.
Un dossier qui aurait dû être fédéral
L’argument le plus frappant reste celui-ci : ces faits relevaient avant tout de la compétence fédérale, pas de l’État de Géorgie. Le procureur rappelle que le dossier le plus solide était celui mené par le procureur spécial Jack Smith, classé sans suite après l’élection de novembre 2024.
Le ministère de la Justice avait alors réaffirmé sa doctrine historique : un président en exercice ne peut pas être poursuivi. Cette règle, née après le Watergate, s’est appliquée à une situation inédite : un ancien président redevenu président.
En résumé, les deux grandes affaires fédérales contre Trump (élection 2020 et documents classifiés) sont déjà classées. La Géorgie était le dernier front. Il vient de tomber.
Le fameux mugshot d’Atlanta
Qui ne se souvient pas de cette photo ? Août 2023. Donald Trump se rend à la prison du comté de Fulton pour la traditionnelle prise d’identité judiciaire. Le cliché, immédiatement devenu viral, a été utilisé des millions de fois sur les réseaux, les t-shirts, les mugs (ironique).
Cette image restera probablement comme le symbole le plus marquant de toute cette séquence judiciaire. Elle incarnait, pour les uns, l’humiliation d’un ancien président. Pour les autres, la preuve ultime d’une persécution politique.
Fani Willis, le tournant décisif
Décembre 2024. La cour d’appel de Géorgie dessaisit la procureure Fani Willis pour conflit d’intérêts : elle entretenait une relation intime avec un procureur spécial qu’elle avait elle-même nommé et rémunéré grassement. Le coup fut terrible pour l’accusation.
Les avocats de la défense réclamaient l’annulation totale de la procédure. La cour a refusé cette option… mais a tout de même retiré l’affaire des mains de Willis. Résultat : plus personne ne voulait la reprendre, jusqu’à l’arrivée de Peter Skandalakis.
« La persécution politique du président Trump par la procureure dessaisie Fani Willis est finalement terminée »
Steve Sadow, avocat de Donald Trump
Que devient les autres accusés ?
Sur les dix-neuf personnes initialement inculpées en août 2023 :
- Quatre ont déjà plaidé coupable en échange de peines légères (probation, amendes, pas de prison).
- Les quinze restants, dont Trump, Giuliani et Meadows, voient toutes les charges abandonnées.
- Plus aucun procès n’aura lieu.
L’accusation reposait notamment sur la loi géorgienne contre la criminalité en bande organisée (RICO), un outil habituellement utilisé contre les mafias. L’utiliser contre un président et son entourage avait fait débat dès le premier jour.
L’appel téléphonique qui avait tout déclenché
Tout était parti d’un coup de fil, le 2 janvier 2021. Donald Trump appelle Brad Raffensperger, le secrétaire d’État de Géorgie, et lui demande de « trouver » environ 12 000 bulletins à son nom – le nombre exact qui lui manquait pour renverser le résultat dans l’État.
L’enregistrement, rendu public peu après, avait choqué une partie de l’Amérique. Il est devenu la pièce centrale de l’acte d’accusation. Aujourd’hui, cet appel ne débouchera sur aucune condamnation.
Et l’affaire Stormy Daniels à New York ?
Petit rappel : Donald Trump a bien été condamné au pénal à New York pour falsification de documents comptables dans l’affaire des paiements à Stormy Daniels. Mais en janvier 2025, dix jours avant sa prestation de serment, le juge a accordé une dispense totale de peine.
Au final, l’ancien et nouvel homme le plus puissant du monde termine son parcours judiciaire sans aucune condamnation effective. Un dénouement que peu auraient osé prédire il y a encore deux ans.
Bilan judiciaire de Donald Trump en novembre 2025 :
– Géorgie → charges abandonnées
– Affaires fédérales (Jack Smith) → classées sans suite
– New York (Stormy Daniels) → condamné mais dispense totale de peine
→ Aucune peine de prison, aucune amende, aucun casier judiciaire.
Cette issue clôt un chapitre exceptionnel de l’histoire judiciaire et politique américaine. Elle pose aussi, en filigrane, une question qui continuera de hanter les débats : où s’arrête la légitime poursuite pénale, et où commence la persécution politique ? Chacun se fera son opinion. Ce qui est certain, c’est que Donald Trump, une nouvelle fois, sort renforcé de l’épreuve.









