Pourquoi un président américain, connu pour ses décisions audacieuses, devient-il un sujet d’étude incontournable pour les géographes du monde entier ? Lors d’un récent festival en France, des experts se sont réunis pour décrypter l’impact de Donald Trump sur la géographie mondiale. Entre fascination pour son pouvoir décomplexé et inquiétude face à ses choix radicaux, son influence dépasse les frontières politiques pour redessiner, littéralement, les cartes. Plongeons dans cet univers où le pouvoir s’exprime à travers les territoires.
Un Pouvoir qui Redéfinit les Territoires
Au cœur de l’est de la France, le Festival international de géographie (FIG) s’est tenu dans une ville emblématique, connue pour avoir baptisé le continent américain en 1507. Cette année, le thème du pouvoir a dominé les discussions, et un nom est revenu sans cesse : Donald Trump. Les chercheurs présents, venus de divers horizons, ont vu en lui un acteur clé pour comprendre les dynamiques géopolitiques contemporaines. Mais pourquoi suscite-t-il autant d’intérêt ?
Pour les géographes, Trump incarne un retour à un pouvoir national fort, qui ne s’embarrasse pas des conventions internationales. Ses décisions, souvent perçues comme provocatrices, touchent directement à la géographie : renommage de lieux, revendications territoriales, ou encore redéfinition des frontières. Ces actions, loin d’être anecdotiques, traduisent une vision du monde où la force prime sur le droit.
Un Géographe face à Trump : Fascination et Inquiétude
Camille Escudé, chercheuse à Sciences Po, résume bien cet intérêt mêlé d’appréhension. Spécialiste de l’Arctique, elle observe les tentatives de Trump de s’approprier des territoires comme le Canada ou le Groenland. « Il me donne du grain à moudre ! », confie-t-elle avec une pointe d’humour, avant d’ajouter que ces actions traduisent une vision du pouvoir qui a des conséquences géographiques profondes. Mais derrière la fascination, une inquiétude pointe : jusqu’où ira cette audace ?
« Il traduit des choses du pouvoir, de la puissance, des territoires. »
Camille Escudé, chercheuse à Sciences Po
Ce n’est pas seulement la volonté de redessiner les cartes qui intrigue, mais la manière dont Trump s’affranchit des normes. En renommant des lieux ou en revendiquant des territoires, il impose une vision unilatérale, défiant les conventions internationales. Pour les géographes, c’est un cas d’école : un acteur politique qui agit directement sur l’espace pour asseoir son autorité.
Renommer pour Dominer : La Toponymie en Question
Frédéric Giraut, spécialiste de la toponymie à l’université de Genève, a été particulièrement sollicité lors du festival. Trump, dès son retour au pouvoir, a marqué les esprits en renommant des lieux emblématiques. Par exemple, le point culminant des États-Unis, appelé Denali depuis 2015 en hommage à une langue autochtone d’Alaska, est redevenu mont McKinley, en référence à un président du XIXe siècle. Ce choix n’est pas anodin : il reflète une volonté de réaffirmer une identité nationale spécifique.
Plus audacieux encore, Trump a ordonné que le golfe du Mexique, dont le nom tire ses origines d’une langue préhispanique, soit rebaptisé golfe d’Amérique. Cette décision, accompagnée de sanctions contre ceux qui s’y opposent, a suscité de vives réactions. Pour Giraut, ces actes s’inscrivent dans une logique suprémaciste, qui rejette les engagements internationaux en faveur de l’inclusion des langues minoritaires et des savoirs autochtones.
Exemples de renommages imposés par Trump :
- Denali redevient mont McKinley.
- Golfe du Mexique renommé golfe d’Amérique.
- Projet de transformation de la bande de Gaza en Riviera du Moyen-Orient.
Ces renommages ne sont pas de simples caprices. Ils traduisent une volonté de réécrire l’histoire et d’imposer une vision hégémonique. En effaçant des noms issus de cultures autochtones ou préhispaniques, Trump cherche à marquer l’espace de son empreinte, au mépris des sensibilités locales et des engagements mondiaux.
Les Frontières, Terrain de Jeu du Pouvoir
Anne-Laure Amilhat Szary, géographe à l’université Grenoble-Alpes, voit en Trump un « maître en dystopie ». Selon elle, il a la capacité de faire advenir ce qui semblait inimaginable. En matière de frontières, son approche est particulièrement révélatrice. « La frontière est partout où la force veut qu’elle advienne », explique-t-elle, pointant du doigt les actions de l’agence de l’immigration américaine (ICE) sous Trump.
« Il fait exploser le monde du droit et révèle que l’état de fait est devenu notre réalité. »
Anne-Laure Amilhat Szary, géographe
Les raids massifs d’expulsions orchestrés par l’ICE illustrent cette vision : les frontières ne sont plus seulement des lignes sur une carte, mais des outils de pouvoir. Trump les manipule pour affirmer sa domination, défiant les cadres juridiques internationaux. Cette approche, décomplexée et assumée, fascine autant qu’elle inquiète.
La Fin du Multilatéralisme ?
Laurence Nardon, spécialiste des États-Unis à l’Institut français des relations internationales, va plus loin. Pour elle, l’ère de Trump marque la fin du multilatéralisme, ce système basé sur la coopération, le droit international et les institutions comme les Nations unies. « C’est vertigineux », confie-t-elle, soulignant à la fois l’intérêt scientifique et l’angoisse que suscitent ces changements.
Depuis le début de son second mandat, Trump intensifie ses attaques contre les institutions : universités, médias, état de droit. Ces assauts, combinés à ses décisions géographiques, redessinent les rapports de force mondiaux. Pourtant, Nardon note une forme de résilience : des plateformes comme Wikipédia ou OpenStreetMap résistent à ces changements imposés, en maintenant des cartes et des savoirs collaboratifs.
Action de Trump | Impact géographique |
---|---|
Renommage du Denali | Effacement d’un nom autochtone au profit d’un symbole nationaliste. |
Revendication du Groenland | Tentative d’expansion territoriale défiant la souveraineté danoise. |
Politique migratoire | Redéfinition des frontières par des expulsions massives. |
Un Objet d’Étude Inédit
Ce qui rend Trump si captivant pour les géographes, c’est sa capacité à incarner une rupture. Il ne se contente pas de gouverner : il transforme l’espace, les noms, les frontières. Chaque décision devient une leçon de géopolitique, montrant comment le pouvoir peut s’exercer à travers la géographie. Mais cette fascination s’accompagne d’une crainte : celle d’un monde où la force l’emporte sur le dialogue.
Pourtant, des résistances émergent. Les plateformes collaboratives, comme OpenStreetMap, deviennent des bastions de défense des savoirs collectifs. Face à la puissance d’un acteur comme Trump, ces initiatives rappellent que la géographie n’appartient pas à un seul homme, mais à ceux qui la construisent ensemble.
Et Après ?
Le Festival international de géographie a mis en lumière un paradoxe : Trump, par ses actions, offre un terrain d’étude riche pour les géographes, mais il incarne aussi une menace pour les principes d’inclusion et de coopération. Ses décisions, qu’il s’agisse de renommer des lieux ou de redéfinir des frontières, interrogent notre rapport au territoire et au pouvoir.
Alors, que nous réserve l’avenir ? Les géographes continueront d’observer, d’analyser, et peut-être de résister. Car si Trump redessine les cartes, il appartient à chacun de défendre une vision du monde où la diversité et le dialogue priment sur la force brute.