Imaginez-vous à la caisse du supermarché, le cœur serré en voyant le prix des œufs ou du café grimper encore. C’est la réalité quotidienne de millions d’Américains en cette fin d’année 2025. Et au milieu de cette colère sourde, un homme décide de reprendre la route : Donald Trump, président des États-Unis, retourne en Pennsylvanie, cet État ouvrier qui l’a porté deux fois à la Maison Blanche.
Pourquoi la Pennsylvanie, encore et toujours ?
La Pennsylvanie n’est pas un État comme les autres. C’est un swing state par excellence : Trump l’a remporté de justesse en 2016 et 2024, l’a perdu de peu en 2020 face à Joe Biden. Chaque voix y compte, surtout quand l’inflation devient le sujet numéro un des conversations à la pompe à essence ou autour de la table familiale.
Ce mardi, le président a choisi le Mount Airy Casino, dans les montagnes Pocono, pour tenir meeting. Un lieu qui parle à son passé d’homme d’affaires : avant la politique, il possédait plusieurs casinos, certains ayant fini en faillite. Le symbole est fort : revenir là où il a connu la gloire et les revers, pour parler argent, pouvoir d’achat et promesses tenues… ou pas.
L’inflation, ce caillou dans la chaussure du président
Officiellement, l’inflation atteint 2,8 % en septembre. Un chiffre qui peut sembler raisonnable vu de loin, mais qui, dans les foyers, se traduit par des paniers plus légers pour le même budget. Les Américains n’ont pas oublié les engagements de campagne : faire baisser les prix, redonner du pouvoir d’achat, stopper net l’héritage économique de Joe Biden.
Pourtant, dans les réunions de cabinet, le président répète que l’inflation est « quasiment vaincue » depuis janvier. Il cite la baisse récente du prix du bœuf, des œufs, du café. Des exemples concrets, brandis comme des trophées. Mais dans les sondages, la réalité est cruelle : sa popularité atteint son plus bas niveau depuis son retour au pouvoir.
« J’ai hérité de la pire inflation de l’histoire. Personne ne pouvait se permettre quoi que ce soit »
Donald Trump, en conseil des ministres
Cette phrase résume la ligne officielle : tout est la faute de l’ancien président démocrate. Une narrative qui peine à convaincre quand les factures continuent d’arriver.
Les tarifs douaniers, arme à double tranchant
Parmi les mesures phares du mandat Trump : les droits de douane massifs imposés à de nombreux pays. Objectif affiché : protéger l’industrie américaine, ramener des emplois. Résultat collatéral : une guerre commerciale qui renchérit le coût de nombreux produits importés.
Les agriculteurs, pourtant fervents soutiens du président en 2024, sont en première ligne. Leurs exportations vers la Chine ou l’Europe ont chuté, les représailles ont été immédiates. Lundi, la Maison Blanche a annoncé une aide de 12 milliards de dollars pour soutenir le secteur. Un pansement sur une jambe de bois pour beaucoup.
« Nous aimons nos agriculteurs et, comme vous le savez, les agriculteurs m’aiment », a lancé Trump avec son sens habituel de la formule. Reste à voir si l’amour sera encore au rendez-vous lors des prochaines élections.
Fissures au sein du mouvement MAGA
Ce qui inquiète peut-être le plus l’entourage présidentiel, ce ne sont pas tant les attaques démocrates – attendues – que les critiques venant de l’intérieur même du camp républicain.
Marjorie Taylor Greene, ancienne figure ultra-influente de la droite radicale, aujourd’hui démissionnaire du Congrès après avoir rompu avec Trump, n’y va pas par quatre chemins. Sur une grande chaîne nationale, elle a asséné :
« Pour un président dont le slogan était “America First”, la priorité numéro un aurait dû être la politique intérieure. Et ce ne l’a pas été. »
Marjorie Taylor Greene
Un coup dur. Quand une alliée de la première heure vous reproche publiquement d’avoir oublié les Américains au profit de la scène internationale, le message passe mal auprès de la base.
2026, l’échéance qui obsède déjà la Maison Blanche
Donald Trump ne pourra pas se représenter en 2028 – la Constitution est claire. Mais les élections de mi-mandat de novembre 2026 sont cruciales. Perdre la majorité au Congrès signerait la fin de nombreux projets et transformerait les deux dernières années de mandat en calvaire législatif.
Susie Wiles, cheffe de cabinet et architecte de la victoire de 2024, l’a répété : le président sera « sur le terrain » dès l’année prochaine pour mobiliser une base tentée par l’abstention. Les meetings géants, les discours enflammés, le style campagne permanente : tout cela va reprendre de plus belle.
En Pennsylvanie, le message sera simple : « J’ai stoppé la crise inflationniste de Joe Biden. » Reste à convaincre ceux qui, chaque jour, voient leur salaire fondre un peu plus au supermarché.
Un président dos au mur, mais jamais à terre
À 79 ans, Donald Trump reste un animal politique hors norme. Capable de transformer la moindre difficulté en opportunité de comeback. Ce déplacement en Pennsylvanie n’est pas qu’un simple meeting : c’est le lancement officieux de la bataille pour 2026.
Face à lui : une inflation qui ne veut pas plier, une base qui gronde doucement, des alliés qui s’éloignent. Mais aussi des millions d’Américains qui, malgré les chiffres, gardent une forme de fidélité viscérale à l’homme qui a bouleversé deux fois le jeu politique.
Le casino de Mount Airy va vibrer ce mardi soir. Les caméras seront braquées sur le pupitre. Et quelque part, entre les machines à sous et les drapeaux américains, se jouera une partie de l’avenir du trumpisme. Une partie où l’inflation est devenue l’adversaire numéro un. Et où le président, comme toujours, refuse de déclarer forfait.
La question reste entière : les Américains donneront-ils encore crédit à l’homme qui promettait de tout changer, quand leur portefeuille leur dit chaque jour le contraire ? Réponse dans les mois à venir… et surtout dans les urnes de 2026.









