Imaginez un instant : un président américain, connu pour ses critiques acerbes envers l’Otan, se tient au cœur d’un sommet international, ovationné par ses pairs, et déclare soudainement son admiration pour l’Alliance. Ce scénario, presque impensable il y a quelques années, s’est déroulé à La Haye, lors d’un sommet qui pourrait bien redéfinir les relations transatlantiques. Que s’est-il passé pour que Donald Trump, autrefois prêt à tourner le dos à l’organisation, affiche désormais un enthousiasme inattendu ? Cet article plonge dans les coulisses de ce revirement, ses implications pour l’Otan, et les questions qu’il soulève pour l’avenir, notamment pour l’Ukraine.
Un Sommet sous le Signe du Changement
Le sommet de l’Otan à La Haye a marqué les esprits, non pas pour ses annonces spectaculaires, mais pour l’attitude surprenante de Donald Trump. Après des années à critiquer l’Alliance, le président américain a semblé trouver une nouvelle affection pour cette organisation qu’il jugeait autrefois obsolète. Ce changement de ton, loin d’être anodin, a été soigneusement orchestré par les dirigeants de l’Otan, qui ont su flatter l’ego du leader américain tout en répondant à ses exigences de longue date.
Un Accueil Chaleureux et Stratégique
Dès son arrivée aux Pays-Bas, Trump a été accueilli avec des honneurs dignes d’un chef d’État particulièrement apprécié. Les organisateurs du sommet, conscients de son influence, ont veillé à ce que chaque détail soit pensé pour lui plaire. Un dîner de gala dans un palais royal, un petit-déjeuner avec le roi et la reine des Pays-Bas, et des éloges publics de la part du secrétaire général de l’Otan, Mark Rutte, ont créé une atmosphère propice à un changement d’état d’esprit. Rutte, dans un geste audacieux, a même surnommé Trump « papa », un clin d’œil qui a visiblement ravi le président.
« J’ai regardé les chefs de ces pays se lever, et l’amour et la passion qu’ils montraient pour leur pays étaient incroyables. Je n’avais jamais vu quelque chose de semblable. »
Donald Trump, lors de la conférence de presse de clôture
Ces attentions n’étaient pas gratuites. Les dirigeants de l’Otan, conscients des critiques passées de Trump sur les dépenses militaires insuffisantes des membres européens, ont mis en avant leurs engagements renouvelés à augmenter leurs budgets de défense. Ces promesses, alignées sur les attentes de Trump, ont joué un rôle clé dans son revirement. Le sommet, volontairement court pour s’adapter à son style, a été une démonstration de diplomatie calculée.
Un Passé de Tensions avec l’Otan
Pour comprendre l’ampleur de ce changement, il faut remonter à la première présidence de Trump. Lors de son premier sommet de l’Otan en 2017 à Bruxelles, il avait marqué les esprits par un comportement provocateur, allant jusqu’à bousculer physiquement le Premier ministre monténégrin pour se placer au centre de la scène. À l’époque, ses discours étaient empreints de reproches : il accusait les membres de l’Alliance de ne pas contribuer suffisamment à leur propre sécurité collective et menaçait régulièrement de retirer les États-Unis de l’organisation.
En 2018, ses critiques s’étaient encore intensifiées, notamment envers l’Allemagne, qu’il accusait de dépendre trop des États-Unis pour sa défense. Des rumeurs circulaient même sur son intention de quitter l’Otan, un scénario qui aurait bouleversé l’équilibre géopolitique mondial. Ce passé tumultueux rend son attitude à La Haye d’autant plus surprenante.
Les moments marquants du premier mandat de Trump avec l’Otan :
- 2017 : Geste controversé envers le Premier ministre du Monténégro.
- 2018 : Critiques publiques contre l’Allemagne et menaces de retrait.
- Pressions constantes pour augmenter les budgets de défense des alliés.
Un Virage Poétique et Émotif
À La Haye, Trump a surpris par une rhétorique presque lyrique, bien loin de ses attaques habituelles. Il a décrit le sommet comme une expérience émouvante, louant la passion des dirigeants pour leurs pays. Sur sa plateforme Truth Social, il a partagé son enthousiasme, qualifiant la journée de « merveilleuse » et les leaders de « incroyables et attentionnés ». Ce ton, inhabituel pour un homme souvent perçu comme pragmatique et direct, a été qualifié d’envolée poétique par Frederick Kempe, directeur général du Conseil atlantique.
Cette transformation n’est pas passée inaperçue. Les observateurs y ont vu une rupture nette avec l’image de Trump comme détracteur des alliés européens. Mais ce changement soulève une question essentielle : est-il sincère, ou s’agit-il d’une réponse temporaire à un accueil flatteur ?
L’Ukraine, Grande Perdante du Sommet ?
Si le sommet a été une victoire diplomatique pour Trump, il a laissé un goût amer à certains, notamment à l’Ukraine. La déclaration finale du sommet, axée sur l’invasion russe, a été jugée plus timide que les années précédentes. Contrairement aux attentes, elle n’a pas réaffirmé explicitement le soutien à l’adhésion de l’Ukraine à l’Otan, une omission significative. Cette décision reflète-t-elle une influence de Trump, connu pour son approche ambiguë envers le conflit ukrainien ?
« Le plus grand perdant a été l’Ukraine. »
Ed Arnold, chercheur au Royal United Services Institute
Un autre moment révélateur a été l’absence des médias lors de la rencontre entre Trump et Volodymyr Zelensky. Cette décision, motivée par des tensions antérieures entre les deux hommes, a privé le président ukrainien d’une tribune publique pour plaider sa cause. Pour Zelensky, qui comptait sur une mise en scène médiatique forte, ce choix a été un revers.
Les Enjeux pour l’Avenir de l’Otan
Le revirement de Trump soulève des questions sur l’avenir de l’Otan. Si son enthousiasme est réel, il pourrait renforcer l’Alliance, notamment en consolidant les engagements financiers des membres. Cependant, cette dynamique repose sur une variable incertaine : la constance de Trump. Le président a laissé entendre que les pays ne respectant pas leurs engagements, comme l’Espagne, pourraient faire face à des représailles économiques. Cette menace rappelle que son soutien à l’Otan pourrait être conditionnel.
| Pays | Engagement de dépenses | Position de Trump |
|---|---|---|
| Allemagne | Augmentation progressive | Satisfaction modérée |
| Espagne | Résistance à l’augmentation | Menaces économiques |
| Pays-Bas | Engagement renforcé | Éloges publics |
Pour l’Otan, le défi sera de maintenir cet élan. Trois sommets sont prévus d’ici la fin du second mandat de Trump, et chaque rencontre sera une occasion de tester la durabilité de ce nouvel amour. Les dirigeants devront continuer à naviguer avec prudence, en équilibrant les attentes de Trump avec les priorités collectives de l’Alliance.
Un Leadership sous Surveillance
Le sommet de La Haye a révélé une réalité : l’influence de Trump sur l’Otan est plus forte que jamais. Si son soutien peut galvaniser l’Alliance, il soulève aussi des inquiétudes sur la dépendance envers un seul homme. Une Otan guidée par les priorités d’un leader imprévisible pourrait-elle compromettre son unité à long terme ? Cette question, laissée en suspens, plane sur l’avenir de l’organisation.
En attendant, la Maison Blanche savoure ce moment. Une vidéo publiée à son retour, intitulée « Papa est de retour », résume l’ambiance triomphale de l’administration Trump. Mais pour les observateurs, ce sommet n’est que le début d’une nouvelle ère, où l’Otan devra jongler entre diplomatie, stratégie et l’imprévisibilité de son allié le plus puissant.
Les clés pour comprendre l’avenir de l’Otan :
- Maintien des engagements financiers des membres.
- Gestion des relations avec Trump pour éviter les tensions.
- Équilibre entre les priorités de l’Alliance et les attentes américaines.
- Soutien à l’Ukraine dans un contexte diplomatique complexe.
Ce sommet, en apparence anodin, pourrait marquer un tournant pour l’Otan. Entre l’enthousiasme de Trump et les défis géopolitiques, l’Alliance se trouve à un carrefour. Reste à savoir si cet amour naissant résistera aux épreuves du temps.
