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Trump Accusé d’Instrumentaliser le FBI contre l’Opposition

Des élus démocrates ayant servi dans l’armée et le renseignement appellent les militaires à refuser les « ordres illégaux » de Trump. Le président riposte par des enquêtes FBI et menace de peine de mort. Ces parlementaires jurent de ne jamais se taire… Mais jusqu’où ira cette escalade ?

Imaginez un instant : des élus du Congrès, anciens militaires et agents du renseignement, publient une vidéo pour rappeler une règle fondamentale de la démocratie américaine. Quelques jours plus tard, le FBI ouvre des enquêtes contre eux et le président les traite publiquement de « traîtres » passibles de la peine de mort. Ce n’est pas le scénario d’un thriller politique. C’est ce qui se passe en ce moment même aux États-Unis.

Une vidéo qui a mis le feu aux poudres

Tout a commencé la semaine dernière. Six parlementaires démocrates, tous ayant servi soit dans l’armée américaine, soit dans les services de renseignement, décident de publier une vidéo commune. Leur message est clair et sans ambiguïté : les militaires et les agents fédéraux ont non seulement le droit, mais le devoir de refuser d’exécuter des ordres manifestement illégaux.

Ils rappellent une règle ancienne et solidement ancrée dans le droit militaire américain. Un principe que tout soldat apprend dès ses premiers jours sous les drapeaux. Pourtant, cette simple piqûre de rappel a déclenché une tempête à Washington.

« Les menaces contre notre Constitution ne viennent pas seulement de l’étranger, mais aussi d’ici, chez nous »

Les six parlementaires dans leur vidéo

La riposte immédiate de la Maison Blanche

La réaction ne s’est pas fait attendre. Donald Trump a immédiatement dénoncé un « comportement séditieux » et a menacé les auteurs de la vidéo de la peine de mort. Dans une série de messages particulièrement virulents, le président a écrit en lettres capitales que « LES TRAÎTRES QUI ONT DIT À L’ARMÉE DE DÉSOBÉIR À MES ORDRES DEVRAIENT ÊTRE EN PRISON MAINTENANT ».

Ces déclarations ont choqué une large partie de la classe politique, même au-delà des rangs démocrates. Utiliser le terme de « traîtres » et évoquer la peine de mort contre des élus du Congrès représente une escalade rhétorique inédite dans l’histoire récente des États-Unis.

Des enquêtes qui sentent l’intimidation

Mais Donald Trump ne s’est pas contenté de mots. Lundi, le ministère de la Défense a annoncé l’ouverture d’une enquête contre le sénateur démocrate Mark Kelly, ancien astronaute et pilote de la Navy, co-auteur de la vidéo. On lui reproche potentiellement des faits pouvant mener à une cour martiale.

Dans la foulée, plusieurs sources ont révélé que le FBI avait également ouvert des investigations sur les autres parlementaires ayant participé à la vidéo. Quatre députés et deux sénateurs se retrouvent ainsi dans le viseur des autorités fédérales.

Pour les intéressés, il n’y a aucun doute sur la nature de ces enquêtes : il s’agit d’une tentative pure et simple d’intimidation.

Les parlementaires refusent de plier

Leur réponse a été unanime et sans concession. Dans un communiqué commun, les quatre députés visés par l’enquête du FBI ont déclaré que « le président Trump utilise le FBI comme un outil pour intimider et harceler les membres du Congrès ».

« Aucune intimidation ou harcèlement ne nous empêchera jamais de faire notre travail et d’honorer notre Constitution. Nous ne nous laisserons pas intimider. Nous ne baisserons jamais les bras »

Communiqué commun des députés démocrates

La sénatrice Elissa Slotkin, ancienne analyste de la CIA, a été particulièrement virulente sur les réseaux sociaux. Elle a écrit que « le fait que le président ait ordonné au FBI de nous cibler est précisément la raison pour laquelle nous avons réalisé cette vidéo ».

Elle ajoute que Donald Trump « croit pouvoir instrumentaliser le gouvernement fédéral contre ses ennemis supposés » et qu’il utilise « le harcèlement judiciaire comme tactique d’intimidation pour dissuader quiconque de s’exprimer ».

Mark Kelly, l’astronaute dans la tourmente

Mark Kelly mérite qu’on s’attarde sur son cas. Cet ancien pilote de la marine et astronaute de la NASA, mari de l’ex-représentante Gabby Giffords (victime d’une tentative d’assassinat en 2011), représente une figure particulièrement respectée aux États-Unis.

Sa réaction à l’annonce de l’enquête du Pentagone a été d’une fermeté rare : « Si cette enquête a pour but de m’intimider et d’intimider d’autres membres du Congrès pour les empêcher de faire leur boulot, cela ne fonctionnera pas ».

Il conclut avec une phrase qui résonne particulièrement : « J’ai trop donné à ce pays pour être réduit au silence par des petites brutes qui se soucient davantage de leur propre pouvoir que de protéger la Constitution ».

Un précédent extrêmement préoccupant

Ce qui se joue ici dépasse largement le cadre d’une simple querelle politique. C’est la question de l’indépendance des institutions et du respect de la séparation des pouvoirs qui est posée.

Lorsqu’un président utilise les appareils d’État (FBI, département de la Défense) pour cibler des élus de l’opposition parce qu’ils ont exprimé une opinion légale, même critique, on entre dans une zone grise extrêmement dangereuse pour la démocratie.

Les six parlementaires l’ont d’ailleurs parfaitement compris. Ils ont tous un passé dans les forces armées ou le renseignement. Ils savent mieux que quiconque ce que signifie le respect de la chaîne de commandement… et ses limites quand les ordres deviennent illégaux.

À retenir : Le droit et le devoir de désobéissance face à un ordre manifestement illégal est inscrit dans le Code de justice militaire américain (article 90 du Manual for Courts-Martial) et fait partie de la formation de base de tout militaire américain depuis des décennies.

Une escalade qui inquiète les observateurs

De nombreux constitutionnalistes et anciens hauts responsables des services de renseignement observent cette séquence avec une inquiétude croissante. Utiliser le FBI contre des membres du Congrès pour des déclarations politiques, même critiques, rappelle les pires heures du maccarthysme.

La différence, c’est que nous ne sommes plus dans les années 1950. Les institutions américaines ont connu depuis lors de nombreuses réformes destinées précisément à éviter ce type d’abus de pouvoir.

Voir aujourd’hui ces garde-fous potentiellement contournés par le simple fait du prince représente un signal d’alarme majeur pour tous ceux qui tiennent à l’État de droit.

Jusqu’où cette crise peut-elle aller ?

La question que tout le monde se pose désormais à Washington est simple : jusqu’où cette confrontation peut-elle aller ? Les enquêtes ouvertes déboucheront-elles sur des inculpations ? Le Congrès va-t-il ouvrir une contre-enquête sur l’utilisation politique des appareils d’État ?

Les six parlementaires ont déjà annoncé qu’ils ne comptaient pas se taire. Bien au contraire. Leur vidéo, loin d’avoir été retirée, continue de circuler largement sur les réseaux sociaux et a été vue plusieurs millions de fois.

Ils ont transformé ce qui aurait pu être une simple mise en garde juridique en un véritable acte de résistance institutionnelle. Et ils semblent prêts à aller jusqu’au bout.

Comme l’a résumé la sénatrice Slotkin : « Ce n’est pas l’Amérique que je connais et je ne laisserai pas cette nouvelle mesure du FBI m’empêcher de défendre mon pays et notre Constitution ».

Une phrase qui, dans le contexte actuel, prend des allures de déclaration de guerre… pacifique, mais déterminée.

La démocratie américaine est-elle en train de vivre l’un de ses plus graves tests depuis le Watergate ? L’histoire, en tout cas, est en train de s’écrire sous nos yeux.

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