Un verdict sévère vient de tomber au Brésil : trois ex-policiers ont été condamnés à 23 et 28 ans de prison pour avoir asphyxié à mort un homme souffrant de troubles mentaux lors d’une intervention policière en mai 2022. Une affaire qui a profondément choqué le pays, habitué pourtant aux bavures des forces de l’ordre.
Une descente de police qui tourne au drame
Tout commence le 25 mai 2022, sur une route près de la petite ville d’Umbaúba, dans l’État de Sergipe (nord-est du Brésil). Genivaldo Santos, un homme de 38 ans atteint de schizophrénie, circule à moto sans porter de casque. Une infraction mineure qui conduit pourtant à une intervention musclée de la police routière fédérale.
Selon les éléments de l’enquête, Genivaldo Santos n’opposait aucune résistance lorsqu’il a été plaqué au sol et menotté par les agents. Un témoin raconte :
Ils lui ont envoyé du gaz poivré dans le visage, puis l’ont mis à l’arrière de leur voiture. Sans aucune raison valable !
C’est alors que la situation dérape complètement. Les policiers enferment l’homme dans le coffre de leur véhicule et lancent une grenade lacrymogène à l’intérieur. Une scène cauchemardesque immortalisée par une vidéo devenue virale, où l’on voit Genivaldo Santos agoniser dans une épaisse fumée, les jambes tremblant sous la porte du coffre maintenue fermée par un agent.
Le traumatisme d’un meurtre filmé en direct
Ces images d’une violence insoutenable ont provoqué une vague d’indignation au Brésil. Pendant plusieurs minutes, on entend les cris de douleur de la victime et un témoin implorer en vain les policiers : « Ils vont le tuer !« .
Ce sentiment d’impuissance face à un acte délibéré et outrageusement disproportionné a marqué les esprits. Si les abus policiers restent fréquents au Brésil, ce meurtre commis au vu et au su de tous, presque en direct, a soulevé une émotion particulière. Laura de Jesus Santos, sœur de la victime, n’hésite pas à parler de crime barbare.
Une peine exemplaire, mais le mal est fait
Au terme d’un procès de 12 jours, les policiers Rodolpho Nascimento, William Noia et Kleber Freitas ont finalement été reconnus coupables. Le jury populaire a implacablement établi leur responsabilité dans ce décès par asphyxie, assimilant les faits à un triple meurtre, sans possibilité de défense pour la victime.
Des circonstances aggravantes qui ont conduit à des peines particulièrement lourdes allant de 23 à 28 ans de réclusion. Le juge a également retenu la qualification de torture ayant entraîné la mort pour deux des accusés. Un verdict exemplaire saluant le courage des témoins et la mobilisation de la société civile.
Mais pour la famille de Genivaldo Santos, aucune condamnation ne pourra effacer le traumatisme et la douleur. « Cela calme, mais cela n’apporte pas le bonheur« , confie sa sœur, encore sous le choc. L’affaire laissera une cicatrice indélébile, symbole de la nécessité urgente d’une réforme profonde de la police brésilienne.
Sanction exceptionnelle, problème systémique
Si la justice a été rendue dans ce cas précis, beaucoup s’interrogent encore sur l’ampleur réelle des violences policières au Brésil. Des pratiques abusives qui touchent souvent les populations les plus vulnérables, dans une relative indifférence.
Le cas de Genivaldo Santos, et l’indignation qu’il a suscitée, pourrait marquer un tournant. Mais il faudra plus que des condamnations isolées pour changer durablement les mentalités et les comportements au sein des forces de l’ordre. C’est tout un système de formation, de contrôle et de sanctions qui doit être repensé.
En attendant, la sévérité du verdict rendu par le tribunal fédéral de l’État de Sergipe envoie un message clair. Aucun uniforme ne place au-dessus des lois. Et aucune vie ne peut être ôtée impunément, quelles que soient les circonstances. Un pas important, même s’il reste encore un long chemin à parcourir pour restaurer la confiance entre police et citoyens au Brésil.
