Au cœur de la province pakistanaise du Khyber-Pakhtunkhwa, frontalière de l’Afghanistan, les autorités locales ont annoncé mercredi soir une nouvelle trêve entre tribus sunnites et chiites. Cette accalmie intervient après une semaine d’affrontements sanglants qui ont coûté la vie à 111 personnes, selon des responsables provinciaux.
Les violences ont été déclenchées jeudi dernier lorsqu’une dizaine d’assaillants ont ouvert le feu sur deux convois de familles chiites sous escorte policière. S’en sont suivies des représailles incessantes, portant le bilan à 79 morts côté chiite et 32 côté sunnite, tandis que 88 autres personnes ont été blessées.
Un Conflit Ancien qui Perdure
Les affrontements entre sunnites et chiites dans le district de Kourram ne sont pas un phénomène nouveau. Depuis juillet dernier, malgré quelques périodes d’accalmie, les hostilités entre tribus d’obédiences différentes ont repris, notamment pour des questions foncières. Ces violences ont déjà fait 190 morts selon des sources concordantes.
Des trêves ont bien été décrétées par des conseils tribaux (jirgas), mais elles ont été de courte durée. Une première, annoncée dimanche soir, avait été rompue et des tirs intermittents ont continué à être rapportés dans différents villages jusqu’à mercredi.
Vers une Paix Durable ?
Mercredi soir, le gouvernement provincial a annoncé qu’un nouveau « cessez-le-feu de dix jours » était entré en vigueur. Selon le communiqué officiel, les négociations vont se poursuivre pour tenter d’instaurer une paix durable dans la région.
Des troupes seront déployées à des points stratégiques et des compensations seront versées aux familles des victimes ainsi qu’à celles touchées par les incendies de centaines de maisons et de magasins durant la semaine écoulée.
Des Autorités Dépassées
Depuis le début des hostilités, les autorités locales peinent à rétablir l’ordre. Jeudi, des assaillants avaient pu tirer à vue sur des convois de familles chiites pourtant sous escorte policière. De source proche du dossier, on déplore un manque d’effectifs tant policiers qu’administratifs pour faire face à une telle situation.
En représailles aux attaques, des groupes armés chiites ont mené des descentes dans des villages sunnites, incendiant des centaines d’habitations et de commerces. Les sunnites ont répliqué, n’hésitant pas à utiliser des armes lourdes comme c’est souvent le cas dans cette région où les tribus règlent leurs différends par la force depuis des décennies.
Régulièrement, les autorités locales se disent incapables de faire face à de telles situations, faute de personnel policier ou administratif, tandis que les gouvernements fédéral comme provincial peinent à faire respecter la loi face aux codes d’honneur tribaux.
D’après une source proche du dossier
Une Mobilisation Nationale
Face à l’ampleur de ces violences qualifiées de « bain de sang » par des milliers de manifestants chiites à travers le pays, les autorités provinciales ont dépêché des responsables de Peshawar, la capitale régionale, pour tenter une médiation.
De nouvelles jirgas, ces assemblées traditionnelles, ont été convoquées dès samedi pour négocier un cessez-le-feu. Mais il faudra sans doute plus que des palabres pour apaiser durablement les tensions dans cette poudrière qu’est devenu le district de Kourram.
La trêve conclue mercredi soir apparaît bien fragile au regard des violences qui ont endeuillé la région et du lourd bilan humain. Toute la question est de savoir si les autorités pakistanaises sauront cette fois imposer leur autorité et garantir une paix durable entre communautés, au-delà des luttes tribales.