En 2024, les eaux agitées de la Manche ont été le théâtre d’un drame humain toujours plus intense. Malgré les risques croissants, plus de 36 000 migrants ont tenté la périlleuse traversée vers le Royaume-Uni à bord d’embarcations de fortune, une hausse de 25% par rapport à l’année précédente. Un lourd tribut avec une vingtaine de naufrages et des dizaines de vies perdues.
La pression monte pour le gouvernement Starmer
Cette recrudescence des traversées illégales met le gouvernement travailliste de Keir Starmer dans une position délicate. La question de l’immigration, légale comme illégale, a été un enjeu majeur de la campagne qui l’a porté au pouvoir en juillet. Le parti anti-immigration Reform UK de Nigel Farage a également réalisé une percée significative, accentuant la pression sur l’exécutif.
Pour tenter d’endiguer le phénomène, le gouvernement Starmer a mis en place un nouveau centre de commandement dédié à la sécurité des frontières. La coopération avec les partenaires européens, dont Europol, a été renforcée pour traquer les réseaux de passeurs, désormais traités « comme des terroristes ».
Des accords internationaux pour lutter contre les passeurs
En décembre, Londres a signé des plans d’actions conjoints avec l’Irak et l’Allemagne, après des accords de coopération avec d’autres pays dont la France. Ce dernier prévoit une contribution britannique de plus de 500 millions d’euros sur trois ans pour renforcer la surveillance sur les plages françaises.
Les Britanniques sont vraiment préoccupés par ce sujet et veulent une solution, mais il est trop tôt pour dire si cette approche a un impact.
Madeleine Sumption, directrice de l’Observatoire des migrations
Davantage de renvois mais des réseaux difficiles à démanteler
Le gouvernement met aussi en avant l’augmentation des expulsions de migrants en situation irrégulière, avec près de 29 000 personnes renvoyées vers leur pays d’origine entre janvier et début décembre 2024, soit 25% de plus que l’année précédente. Un niveau inégalé depuis 2017 selon l’Observatoire des migrations.
Mais la lutte contre les passeurs s’avère ardue, avec des réseaux très décentralisés et des filières qui s’adaptent rapidement. Les nationalités des migrants arrivés clandestinement évoluent aussi, avec davantage de Vietnamiens en 2024 alors que 2022 avait vu une vague d’Albanais.
2024, l’année la plus meurtrière
Au-delà des chiffres, c’est le tribut humain qui marque les esprits. Avec au moins 76 morts dans une vingtaine de naufrages, 2024 restera comme l’année la plus meurtrière pour ces candidats à l’exil prêts à tout risquer sur des embarcations toujours plus surchargées.
Selon les autorités françaises, au moins 5800 personnes ont été secourues en mer et plus de 870 tentatives de traversée ont été empêchées en 2024. Des chiffres en hausse constante depuis 2018 et l’apparition de ce phénomène dans le sillage du renforcement des contrôles sur les camions empruntant le tunnel sous la Manche.
Au total, ce sont plus de 150 000 migrants qui sont parvenus à rejoindre le Royaume-Uni par cette voie maritime si dangereuse en seulement six ans. Un flux ininterrompu qui ne semble pas près de se tarir malgré la détermination affichée des gouvernements successifs. La question de l’accueil et de l’intégration de ces populations vulnérables s’impose plus que jamais dans le débat public britannique.