Les eaux tumultueuses de la Manche n’ont pas découragé les migrants déterminés à rejoindre les côtes britanniques en 2024. Malgré les risques, près de 37 000 personnes ont réussi la périlleuse traversée l’année dernière, soit une augmentation de 25% par rapport à 2023. Un triste record a également été atteint avec au moins 76 morts, engloutis par les flots lors d’une vingtaine de naufrages. Un bilan alarmant qui témoigne de l’intensification de cette crise migratoire devenue un casse-tête politique pour le gouvernement britannique.
Un phénomène qui échappe à tout contrôle
Depuis 2018, les traversées clandestines de la Manche par des petites embarcations de fortune se sont multipliées, devenant le principal mode d’entrée illégale au Royaume-Uni. En seulement 6 ans, plus de 150 000 migrants ont ainsi foulé le sol britannique, bravant les eaux glacées et les courants traîtres du détroit. Un afflux massif et continu auquel les autorités peinent à faire face malgré un renforcement des contrôles et de la coopération avec la France.
Des promesses non tenues
Pour les gouvernements conservateurs qui se sont succédé depuis le Brexit, endiguer ces arrivées était une priorité. Ils avaient promis aux Britanniques de « reprendre le contrôle » des frontières mais force est de constater que cet engagement n’a pas été tenu. Les travaillistes désormais au pouvoir depuis l’été dernier ne semblent pas faire mieux. Ils ont certes abandonné le projet controversé d’expulsions vers le Rwanda mais tardent à proposer des alternatives crédibles.
Nous allons traiter les passeurs comme des terroristes.
Keir Starmer, Premier ministre britannique
Une rhétorique ferme qui peine à se traduire dans les faits. Car si la lutte contre les réseaux criminels est effectivement cruciale, elle ne pourra à elle seule tarir ces flux migratoires nourris par les conflits, l’instabilité et la pauvreté dans de nombreuses régions du monde.
Une crise humanitaire aux portes de l’Europe
Derrière les chiffres se cachent des drames humains. Fuyant l’Afghanistan, l’Iran, la Syrie, l’Erythrée ou le Vietnam, ces hommes, ces femmes et ces enfants sont prêts à tout risquer dans l’espoir d’un avenir meilleur. Mais beaucoup y laissent leur vie, comme en témoignent les terribles naufrages qui endeuillent régulièrement la Manche. Une honte pour notre civilisation, incapable d’offrir des voies d’accès légales et sûres aux demandeurs d’asile.
Il est plus que temps que le Royaume-Uni et l’Europe dans son ensemble prennent la mesure de cette tragédie qui se joue à nos frontières. Au-delà de la nécessaire intensification de la lutte contre les passeurs, c’est toute notre politique migratoire et d’accueil qu’il faut repenser. Avec humanité et responsabilité. Pour qu’à l’avenir, plus aucun être humain n’ait à risquer sa vie dans la quête désespérée d’un refuge.
Les terribles records de 2024 doivent marquer un tournant. Lacoopération européenne doit s’intensifier dans la répartitionéquitable des demandeurs d’asile. Des voies légales et sûres de migration doivent être développées. L’aide au développement dans les pays d’origine renforcée pour s’attaquer aux causes profondes de ces départs.
Combien de morts supplémentaires faudra-t-il pour qu’une réponse globale et humaine soit enfin apportée à ce drame ? C’est tout l’enjeu des mois et années à venir, pour le Royaume-Uni comme pour l’Europe. Car notre dignité collective se noie chaque jour un peu plus dans les eaux sombres de la Manche. Il est urgent d’agir avant qu’il ne soit trop tard.
