Ils rêvaient d’une vie meilleure en Angleterre. Mais pour un jeune enfant et plusieurs autres migrants, la traversée de la Manche aura été leur dernier voyage. Ce samedi matin, entre 8h et 9h, leur embarcation surchargée a lancé un appel de détresse au large des côtes françaises. Malgré l’intervention des secours, le bilan est lourd : un enfant d’environ 4 ans retrouvé sans vie, une personne grièvement blessée, et 14 naufragés récupérés dans un état d’épuisement. Un nouveau drame qui endeuille la Manche, devenue ces dernières années un cimetière marin pour des centaines de candidats à l’exil.
2024, année record des traversées et des drames
Depuis janvier, plus de 25 000 migrants ont débarqué sur les côtes anglaises après avoir bravé les flots à bord de frêles esquifs. Un chiffre en hausse constante, malgré le renforcement des contrôles et de la coopération franco-britannique. Car le verrouillage accru des accès au tunnel sous la Manche et au port de Calais pousse les exilés à prendre toujours plus de risques en tentant la traversée par la mer. Avec des embarcations de plus en plus chargées – 52 passagers en moyenne cette année contre seulement 13 en 2020 – les naufrages se multiplient. En 2024, au moins 46 personnes ont déjà perdu la vie lors de ces périples, contre 12 l’an dernier. Un lourd tribut qui ne semble pas près de s’alléger.
L’enfance broyée par les passeurs
Parmi les victimes de ces traversées, les jeunes et les enfants payent un prix particulièrement élevé. « Le corps sans vie retrouvé aujourd’hui est celui d’un très jeune enfant », a sobrement indiqué le parquet de Boulogne-sur-Mer. Selon le maire du Portel, commune au large de laquelle le drame s’est noué, il serait âgé d’environ 4 ans. Un destin tragique, fauché en pleine innocence par la folie meurtrière des passeurs et l’inertie coupable de l’Europe face au drame des migrants. Car derrière chaque mort, chaque naufrage, se cachent des réseaux criminels qui s’enrichissent sur la détresse et jettent des êtres humains à la mer comme on se débarrasse d’une cargaison encombrante.
Les passeurs ont le sang de ces personnes sur les mains!
Bruno Retailleau, Ministre de l’Intérieur
Une politique migratoire en échec
Face à ces drames, les gouvernements français et britannique affichent leur détermination à démanteler les filières, à renforcer les contrôles, à dissuader les traversées. Mais au-delà des déclarations martiales, force est de constater l’échec des politiques mises en œuvre des deux côtés de la Manche. Côté français, on peine à endiguer les flux et à offrir des perspectives aux exilés bloqués dans des campements de fortune. Côté britannique, malgré les promesses de fermeté du gouvernement Starmer, les expulsions restent rares et le système d’asile est engorgé. Et pendant ce temps, les traversées se poursuivent, toujours plus nombreuses, toujours plus risquées.
Combien d’enfants devront encore se noyer dans la Manche ? Combien de familles devront encore être endeuillées sur l’autel de l’indifférence ? Il est temps que l’Europe retrouve son âme et son humanité face à ces tragédies à répétition. Il est temps d’offrir un avenir et une protection aux hommes, femmes et enfants jetés sur les routes de l’exil. Car notre honneur et nos valeurs se abîment chaque jour un peu plus dans les eaux glacées de la Manche. Les larmes et la colère ne suffisent plus. Seule une refonte courageuse et solidaire de notre politique migratoire pourra éviter de nouveaux drames. Tic tac, tic tac : l’horloge tourne et emporte avec elle nos derniers lambeaux d’humanité.
