Depuis le début de la saison, les passionnés de football scrutent chaque lundi avec attention le site de la Fédération Française de Football. Non pas pour suivre les résultats du week-end, mais pour découvrir les analyses détaillées de certaines décisions arbitrales ayant marqué la journée de Ligue 1. Une initiative inédite et bienvenue, lancée par la Direction de l’arbitrage pour apporter davantage de transparence et de pédagogie autour du travail des hommes en noir.
Un débrief hebdomadaire pour lever le voile sur l’arbitrage
Chaque semaine depuis septembre, la Direction de l’arbitrage (DA) sélectionne plusieurs situations litigieuses qui ont fait débat lors de la journée de championnat. Penalty oublié, carton rouge controversé, but refusé pour un hors-jeu millimétré… Ces décisions sont passées au crible par les experts de l’instance, qui dévoilent les échanges audio entre l’arbitre central et son assistant vidéo, tout en apportant des éléments d’explication sur l’application des lois du jeu.
L’objectif affiché est clair : faire preuve de pédagogie pour permettre au grand public de mieux comprendre les rouages de l’arbitrage moderne. Amaury Delerue, manager-instructeur des arbitres à la DA, assume cette volonté de transparence :
On choisit des actions significatives pour la compréhension du jeu et l’application des lois du jeu. Notre objectif n’est pas d’en rajouter ni de convaincre, mais d’expliquer.
Assumer les erreurs pour progresser
Sur les 40 situations analysées publiquement jusqu’à présent, seules 6 ont fait l’objet d’un mea culpa de la DA, reconnaissant une décision erronée au final. Un taux d’erreur de 15% qui témoigne malgré tout de la qualité de l’arbitrage français. Mais l’essentiel n’est pas là selon Amaury Delerue. L’important est d’assumer ces erreurs pour en tirer des enseignements :
Bien sûr, les arbitres commettent des erreurs. Mais elles n’ont pas toutes le même intérêt pédagogique.
Parmi les cas les plus marquants décortiqués cette saison, impossible d’oublier la non-expulsion du défenseur monégasque Wilfried Singo pour son violent contact au visage du gardien parisien Gianluigi Donnarumma en décembre dernier. Une décision sur laquelle l’arbitre François Letexier est revenu après avoir entendu les explications de son assistant vidéo. Un parfait exemple pour souligner toute la complexité du rôle d’arbitre.
Humaniser les arbitres aux yeux du grand public
Au-delà de l’aspect purement technique, ces débriefs hebdomadaires permettent aussi de rappeler une évidence : derrière chaque décision arbitrale se cachent des hommes, avec leurs forces et leurs faiblesses. Une dimension humaine qu’Amaury Delerue juge primordiale de mettre en avant :
On comprend mieux comment et pourquoi il arrive aux arbitres de se tromper ainsi que l’extrême exigence à laquelle ils sont soumis…
La publication de ces analyses détaillées n’a d’ailleurs pas été sans conséquence en interne. Les arbitres ont dû s’habituer à voir leurs décisions ainsi disséquées publiquement. Mais tous ont bien compris l’intérêt de la démarche comme le souligne Amaury Delerue :
Nos arbitres ont bien intégré le fait qu’ils exercent une fonction publique et que toutes leurs décisions sont décortiquées en permanence. Ils ont compris qu’il fallait recevoir ce débrief comme un prolongement du jugement « en direct », vécu en permanence dans leurs échanges avec nous.
Une initiative saluée malgré des progrès encore attendus
Si cette volonté de transparence est unanimement saluée par les observateurs, elle ne règle pas tous les maux de l’arbitrage. Des progrès sont encore attendus pour gommer certaines incohérences et différences d’appréciation parfois incomprises par les acteurs et suiveurs du football.
Mais en ouvrant ainsi ses portes et en jouant la carte de la pédagogie, la Direction de l’arbitrage pose les bases d’un dialogue apaisé. Une première étape indispensable pour réduire les incompréhensions et les procès d’intention faits aux hommes en noir. Le chemin est encore long, mais la direction prise semble être la bonne. L’arbitrage français est entré dans une nouvelle ère, celle de la transparence et de l’explication. Une petite révolution qui ne demande qu’à s’amplifier pour le bien du football.