Les eaux tumultueuses de la Manche ont une fois de plus été le théâtre d’un drame humain. Mercredi matin, trois migrants ont perdu la vie lors d’une tentative désespérée de traverser clandestinement le détroit depuis la France vers la Grande-Bretagne. Ce nouveau naufrage vient alourdir un bilan déjà tragique, portant à 55 le nombre de décès recensés depuis le début de l’année dans ce type de traversées.
Un naufrage meurtrier malgré des conditions favorables
D’après les informations communiquées par la préfecture maritime, deux personnes ont été récupérées sans vie par le navire Minck affrété par l’État français. Une troisième victime, une femme inconsciente, a été repérée et secourue par un ferry avant d’être héliportée vers l’hôpital, où son décès a finalement été constaté. Le parquet a précisé qu’il s’agissait d’une femme et de deux hommes, dont l’un serait de nationalité égyptienne.
Ironiquement, les conditions météorologiques semblaient propices à une traversée, avec une mer calme et une absence de vent. Mais la forte brume matinale réduisait considérablement la visibilité au large de Calais, où s’est produit le naufrage, à environ 2 kilomètres des côtes françaises. C’est un usager de la mer qui a donné l’alerte après avoir repéré un gilet de sauvetage à la dérive.
Une embarcation surchargée
Selon une source policière, le canot en perdition transportait principalement des migrants érythréens, un groupe surreprésenté parmi les candidats à l’exil via la Manche. Si 99% des Érythréens obtiennent l’asile outre-Manche, beaucoup n’hésitent pas à risquer leur vie dans ces traversées clandestines pour y parvenir. L’embarcation naufragée ne dérogeait pas à la règle, avec environ 45 passagers secourus en plus des trois victimes, pour une capacité moyenne de 56 personnes par canot selon les autorités.
Une mobilisation des secours
Malgré une vaste opération de sauvetage impliquant le navire Minck, un ferry d’Irish Ferries et des moyens aériens, les recherches pour retrouver d’éventuels disparus ont été levées en fin d’après-midi. Le parquet de Boulogne-sur-Mer a ouvert une enquête pour “aide à l’entrée et au séjour irrégulier” et “mise en danger de mort ou d’infirmité”.
L’indignation des élus locaux
Face à ce nouveau drame, la maire de Calais Natacha Bouchart a vivement réagi, dénonçant le silence du gouvernement malgré les interpellations d’un collectif transpartisan de maires du littoral. Elle a pointé du doigt les 2000 exilés vivant dans des conditions indignes à Calais, réclamant un durcissement du “délit de séjour irrégulier” mais aussi un “centre de réfugiés” pour les “encadrer” dans de meilleures conditions.
Une année noire
Ce naufrage, le troisième en octobre, porte à au moins 55 le nombre de migrants morts depuis janvier en tentant de traverser la Manche sur des embarcations de fortune, les tristement célèbres “small boats”. Un bilan particulièrement lourd, déjà bien supérieur à celui de toute l’année 2023.
Les canots empruntent l’une des voies maritimes les plus fréquentées au monde.
Pourtant, cela n’empêche pas les tentatives de se multiplier : plus de 28 000 migrants ont réussi à rallier les côtes anglaises depuis le début de l’année selon les chiffres officiels britanniques.
La réponse de Londres
Outre-Manche, le nouveau gouvernement travailliste de Keir Starmer, élu en juillet, a promis de s’attaquer au problème. Son plan : augmenter les expulsions de migrants en situation irrégulière et renforcer la lutte contre les passeurs. Reste à savoir si ces mesures suffiront à endiguer un phénomène qui ne cesse de prendre de l’ampleur depuis 2018, et qui endeuille régulièrement les eaux de la Manche.
Face à ces drames à répétition, il est urgent que la France et le Royaume-Uni unissent leurs efforts pour trouver des solutions durables et humaines. Car derrière les chiffres et les controverses politiques, ce sont bien des vies humaines qui se jouent lors de ces traversées au péril de la mer.
