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Togo : La Nouvelle Constitution Soulève la Colère de l’Opposition

À Lomé, l'opposition s'insurge contre une Constitution qui change tout. Le président s'accroche-t-il au pouvoir ? La suite va vous surprendre.

Imaginez une foule vibrante, des pancartes brandies bien haut et des voix qui s’élèvent dans une capitale africaine en ébullition. Ce dimanche, à Lomé, la capitale du Togo, des centaines de citoyens ont envahi une place publique pour crier leur refus d’une réforme qui, selon eux, menace l’avenir de leur pays. Au cœur de cette agitation : une nouvelle Constitution adoptée en avril 2024, un texte qui transforme profondément les règles du jeu politique et qui, pour beaucoup, ressemble à une manœuvre pour prolonger un pouvoir déjà en place depuis près de deux décennies.

Une Réforme qui Bouscule le Togo

Le Togo, petit pays d’Afrique de l’Ouest, est à un tournant historique. En avril 2024, les autorités ont voté une réforme constitutionnelle qui abolit l’élection présidentielle au suffrage universel direct. À la place, le pays bascule vers un régime parlementaire où le chef de l’État devient une figure symbolique, tandis que le vrai pouvoir est détenu par un président du Conseil des ministres, désigné par le parti majoritaire à l’Assemblée nationale. Une transition qui, sur le papier, pourrait sembler anodine, mais qui, dans les faits, soulève une vague de contestations sans précédent.

Pourquoi cette réforme fait-elle polémique ?

Pour les opposants, ce changement n’a rien de démocratique. Ils accusent le pouvoir en place de s’être taillé une Constitution sur mesure pour permettre au président actuel, en fonction depuis 2005, de rester aux commandes indéfiniment. Avec cette réforme, le chef de l’État ne sera plus élu par le peuple, mais le poste clé du président du Conseil des ministres reviendra automatiquement au leader du parti dominant – une position que l’actuel président, fort de sa majorité, est bien placé pour occuper.

« Ce texte n’a pas été adopté selon les règles. Le peuple, qui est souverain, n’a pas été consulté. »

– Un leader de l’opposition

Cette critique, relayée par un chef de file de l’opposition lors du meeting de Lomé, résume le sentiment général : un processus opaque et une réforme imposée sans débat public. Pour beaucoup, il s’agit d’un « coup d’État constitutionnel » qui prive les Togolais de leur droit fondamental à choisir leurs dirigeants.

Une mobilisation massive dans les rues de Lomé

Dimanche, la place Akassimé, située en plein cœur de Lomé, s’est transformée en un théâtre de résistance. À l’appel de deux grands partis d’opposition et d’organisations de la société civile, des centaines de militants ont répondu présents. Les discours se sont succédé, portés par une énergie collective et une détermination palpable. Les pancartes, elles, parlaient d’elles-mêmes : des messages comme « Non à l’autorité illégitime » ou encore des appels à la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest pour intervenir face à ce qu’ils qualifient de dérive autoritaire.

  • Des banderoles dénonçant un « coup d’État constitutionnel ».
  • Des slogans réclamant le retour à une élection directe.
  • Une foule unie dans un seul cri : « Le peuple aura le dernier mot ».

Un militant, interrogé sur place, a résumé l’enjeu avec force : « Je suis ici parce que cette Constitution ne promet rien de bon pour l’avenir. Elle ne passera pas, on ne se laissera pas faire. » Cette détermination illustre un ras-le-bol qui dépasse les simples revendications politiques : c’est une lutte pour l’identité démocratique du Togo.

Un pouvoir familial contesté

Pour comprendre la colère qui gronde, il faut remonter le fil de l’histoire togolaise. Depuis 2005, le pays est dirigé par le même président, qui a pris la succession de son père, resté au pouvoir pendant 38 ans. Une dynastie qui, pour beaucoup, symbolise une mainmise sans partage sur les institutions. Avec l’ancienne Constitution, ce mandat aurait dû être le dernier en 2025. Mais la réforme de 2024 change la donne, offrant une porte de sortie – ou plutôt une porte d’entrée – pour prolonger cette emprise sous une nouvelle forme.

Le camp présidentiel, lui, défend bec et ongles cette transition. Pour ses soutiens, elle marque une évolution vers une démocratie plus représentative. « C’est une étape décisive pour consolider nos institutions », a déclaré un ministre lors d’un discours tenu à Kara, à plus de 400 kilomètres de la capitale, quelques jours avant le meeting de l’opposition. Une rhétorique qui peine à convaincre les foules de Lomé.

Un régime parlementaire à la togolaise

Concrètement, que change cette réforme ? Le Togo entre dans ce que le pouvoir appelle une « Vème République ». Le président, désormais élu par le Parlement, perd son rôle exécutif pour devenir une figure honorifique. Le véritable pouvoir passe entre les mains du président du Conseil des ministres, un poste taillé pour le chef du parti majoritaire. Dans un pays où les élections législatives sont régulièrement critiquées pour leur manque de transparence, cette bascule soulève des questions légitimes sur l’équilibre des pouvoirs.

Ancienne Constitution Nouvelle Constitution
Président élu au suffrage universel Président élu par le Parlement
Pouvoir exécutif centralisé Pouvoir au président du Conseil

Ce tableau simplifié montre l’ampleur du bouleversement. Pour les détracteurs, ce système consacre une forme de monarchie déguisée, où le contrôle du parti majoritaire devient la clé de tout.

La société civile en première ligne

Face à cette réforme, la société civile togolaise ne reste pas les bras croisés. Des collectifs comme le Front citoyen Togo debout jouent un rôle crucial dans la mobilisation. Leur porte-parole a scandé lors du rassemblement : « Le peuple est debout, et c’est lui qui décidera. » Une déclaration qui résonne comme un défi lancé au pouvoir, mais aussi comme un appel à la communauté internationale pour qu’elle ne ferme pas les yeux.

Car au-delà des frontières togolaises, cette crise interpelle. La Cedeao, souvent critiquée pour son inaction face aux dérives autoritaires dans la région, est directement mise en cause par les manifestants. Reste à savoir si elle jouera un rôle de médiatrice ou si elle laissera le Togo s’enfoncer dans une impasse politique.

Et maintenant, quel avenir pour le Togo ?

À l’heure où ces lignes sont écrites, le Togo est à la croisée des chemins. D’un côté, un pouvoir qui s’accroche à ses réformes et célèbre une soi-disant modernisation. De l’autre, une opposition et une société civile prêtes à tout pour faire entendre leur voix. Entre les deux, un peuple qui, meeting après meeting, refuse de baisser les bras. La prestation de serment du président du Conseil devant la Cour constitutionnelle, prévue dans les prochaines semaines, pourrait être le prochain acte de ce drame politique.

Une chose est sûre : cette bataille dépasse les simples querelles institutionnelles. Elle touche à l’essence même de la souveraineté populaire, à la question de savoir qui, au final, doit décider du destin d’une nation. À Lomé, la réponse semble claire pour les manifestants : ce ne sera pas une poignée de dirigeants, mais bien le peuple togolais tout entier.

Et si cette réforme n’était que le début d’une lutte encore plus grande ? Le Togo nous montre que, même face à des institutions verrouillées, la voix des citoyens peut encore résonner.

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