Imaginez un enfant de six ans qui, du jour au lendemain, perd ses bras et ses jambes. Un choc brutal, une vie basculée en quelques heures. Aujourd’hui, cet enfant a 25 ans et il s’appelle Théo Curin. Il est double vice-champion du monde de natation handisport, acteur, animateur télé… et surtout, il accepte enfin de parler sans filtre de la frustration qui le ronge encore.
« Pourquoi moi ? » : la question qui reste sans réponse
Le 3 décembre 2025, à l’occasion de la Journée internationale des personnes handicapées, Théo Curin a accepté de revenir sur le drame qui a marqué son existence. Une méningite bactérienne foudroyante. Quelques jours d’hospitalisation, un coma, puis le verdict : pour lui sauver la vie, les médecins doivent amputer les quatre membres.
Presque vingt ans après, la question demeure.
« Je lui demanderais sûrement : pourquoi tu es arrivée dans ma vie ? Et surtout pourquoi moi ? C’est frustrant pour moi de ne jamais comprendre pourquoi, du jour au lendemain, c’est tombé sur moi… »
Ces mots, prononcés avec une sincérité désarmante, montrent que même les plus grands battants gardent parfois une part d’incompréhension. Théo ne hurle pas à l’injustice tous les jours, mais il avoue que cette interrogation revient, comme un écho lointain.
La méningite foudroyante : quand tout bascule en 48 heures
La méningite à méningocoque reste l’une des infections les plus fulgurantes. Chez l’enfant, elle peut évoluer en quelques heures seulement. Fièvre brutale, raideur de la nuque, purpura fulminans… les signes sont violents et le temps médical est compté.
Pour Théo, le diagnostic est tombé en 2006. Les toxines libérées par la bactérie ont provoqué une nécrose massive des extrémités. Les chirurgiens n’ont eu d’autre choix que d’amputer haut pour stopper la gangrène. Bras jusqu’aux épaules, jambes jusqu’aux hanches.
Au réveil, un petit garçon de six ans découvre qu’il n’a plus de mains pour attraper son doudou, plus de pieds pour courir après le ballon. Le choc est immense, pour lui comme pour ses parents.
Le long chemin vers l’acceptation
Théo le dit lui-même : il a dû faire le deuil de sa vie d’avant. Un travail psychologique colossal pour un enfant. Apprendre à manger avec des couverts adaptés, à écrire avec la bouche ou l’épaule, à se laver seul… chaque geste du quotidien devient une montagne.
Mais très vite, une chose le sauve : le sport. À 9 ans, il découvre la natation handisport. L’eau efface le poids, rend la liberté. Il enchaîne les longueurs, les compétitions, les médailles. À 17 ans, il participe aux Jeux paralympiques de Rio. À 21 ans, il traverse la Manche à la nage avec Malia Metella et Matthieu Witvoet. À 23 ans, il devient double vice-champion du monde.
Le corps amputé devient un corps d’athlète ultra-performant. La différence se mue en force.
De la piscine aux plateaux télé : une reconversion fulgurante
Fin 2023, Théo annonce arrêter la compétition de haut niveau. Direction le cinéma et la télévision. On le voit dans Handigang sur TF1, puis dans Plus belle la vie. Il co-anime Aux Jeux, citoyens ! sur France 2 pendant les JO de Paris 2024.
Et depuis septembre 2024, c’est officiel : il présente Slam sur France 3, reprenant le flambeau de Cyril Féraud. À 25 ans à peine, il anime un jeu quotidien regardé par plus d’un million de téléspectateurs. Un symbole fort : une personne en situation de handicap visible aux heures de grande écoute, sans que cela soit jamais mis en avant comme un « exploit ».
« Je n’en veux absolument pas à cette maladie »
Le plus bouleversant dans son discours ? L’absence totale de rancœur.
« Pour être honnête, je n’en veux absolument pas à cette maladie. J’ai réussi à me construire autour de ça ! »
Cette phrase résume tout. Théo aurait pu maudire le sort. Il a choisi de bâtir. Il répète souvent que ces épreuves lui ont révélé une capacité de résilience hors norme. « C’était peut-être pour moi l’occasion de réaliser que j’avais une réelle capacité à rebondir, malgré les difficultés. »
Une philosophie qui inspire des milliers de personnes. Sur les réseaux, les messages affluent après chaque interview : « Tu me donnes la force de me battre », « Grâce à toi je relativise », « Tu es la preuve que rien n’est impossible ».
Un message universel pour la Journée internationale du handicap
Chaque 3 décembre, la parole des personnes handicapées est mise en lumière. Théo Curin, par sa visibilité et sa franchise, incarne parfaitement cette journée. Il ne veut pas être un « super-héros » ou un « exemple ». Il veut simplement être Théo. Un mec de 25 ans qui bosse, qui rit, qui doute parfois, qui tombe amoureux, qui galère avec les transports en commun… comme tout le monde.
Son combat aujourd’hui ? Faire évoluer le regard de la société. Montrer que le handicap n’est pas une tragédie permanente. Qu’on peut être amputé des quatre membres et présenter un jeu télé l’après-midi, draguer le soir, voyager, faire du sport extrême, rire aux éclats.
En 2025, voir Théo Curin tous les jours à 17 h sur France 3, c’est déjà une petite révolution tranquille.
Et demain ?
Théo ne s’arrête jamais. Prochains projets : un livre plus personnel, une nouvelle traversée à la nage (peut-être le lac Titicaca), et pourquoi pas un rôle plus important au cinéma. Il rêve aussi de présenter une grande émission en prime time, « pas forcément sur le handicap, juste une émission qui cartonne ».
Quand on lui demande s’il changerait quelque chose s’il le pouvait, il répond sans hésiter : « Non. Parce que sans ça, je ne serais pas moi. »
Une réponse qui laisse sans voix.
Théo Curin n’a pas vaincu la maladie. Il a appris à danser avec elle. Et aujourd’hui, c’est lui qui mène la danse.
En résumé : Amputé des quatre membres à 6 ans suite à une méningite foudroyante, Théo Curin est devenu athlète paralympique, acteur et animateur de Slam sur France 3. À 25 ans, il continue de poser la question « pourquoi moi ? » mais affirme n’avoir aucune rancœur. Sa résilience et sa joie de vivre font de lui une figure inspirante du handicap visible en France.
Et vous, que feriez-vous si la vie vous retirait tout, du jour au lendemain ? Théo Curin, lui, a choisi de tout reconstruire. Plus grand, plus fort, plus lumineux.









