Alors que les tensions entre la Chine et Taïwan ne cessent de s’intensifier, un événement vient une nouvelle fois de mettre le feu aux poudres dans cette région sous haute pression. Mercredi, les autorités taïwanaises ont en effet repéré le passage d’un porte-avions chinois, le Liaoning, dans le détroit de Taïwan, véritable épicentre des frictions bilatérales. Une manœuvre militaire lourde de sens, qui intervient à peine une semaine après d’imposantes manœuvres d’encerclement menées par Pékin autour de l’île.
Un contexte de pression militaire accrue
Ce n’est un secret pour personne : la Chine considère Taïwan comme l’une de ses provinces, qu’elle entend bien réunifier avec le reste de son territoire. Si Pékin dit privilégier la voie pacifique, elle n’a pas manqué de rappeler la semaine dernière qu’elle n’excluait pas pour autant le recours à la force. Un avertissement qui résonne comme une menace à peine voilée, alors que la pression militaire chinoise autour de Taïwan n’a cessé de s’accentuer ces dernières années.
Exercices à tirs réels, nombre record d’incursions aériennes, déploiement de navires de guerre : Pékin multiplie les démonstrations de force pour intimider Taipei. Mi-octobre déjà, des manœuvres d’une ampleur inédite avaient été organisées dans le détroit, quelques jours seulement après la fête nationale taïwanaise. Des opérations qui avaient vu le Liaoning naviguer à proximité des côtes japonaises, à l’est de Taïwan.
Une réponse à la présence américaine ?
Le passage du porte-avions chinois cette semaine pourrait bien être une réponse à la présence récente de navires de guerre américain et canadien dans le détroit. Pékin a vivement condamné cette traversée, y voyant une atteinte à la paix et à la stabilité dans la région. Mais pour Washington et ses alliés, il s’agit au contraire de réaffirmer le statut international de cette voie navigable hautement stratégique.
Vers une escalade des tensions ?
Depuis l’arrivée au pouvoir en 2016 de la présidente taïwanaise Tsai Ing-wen, accusée par Pékin de vouloir creuser le fossé avec le continent, les relations sino-taïwanaises n’ont cessé de se dégrader. Et la pression militaire chinoise toujours plus forte inquiète à Taipei, où l’on redoute une escalade des tensions pouvant mener à un conflit ouvert.
Taïwan ne cèdera pas face à l’intimidation et aux menaces de la Chine.
Cho Jung-tai, Premier ministre taïwanais
Pour l’heure, le gouvernement taïwanais se veut rassurant et affirme surveiller de près les mouvements du Liaoning. Selon plusieurs analystes, le porte-avions serait en fait en route vers le port de Qingdao en Chine pour ravitaillement et maintenance, après avoir participé aux récentes manœuvres. Mais sa présence dans le détroit n’en reste pas moins un signal fort envoyé à Taipei.
Pékin maintient la pression
De son côté, la Chine continue d’affirmer sa détermination à réunifier Taïwan, par la force si nécessaire. Le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères a d’ailleurs balayé d’un revers de main les inquiétudes taïwanaises suscitées par le passage du Liaoning, déclarant :
Taïwan est un territoire chinois. Le fait qu’un porte-avions chinois navigue sur son propre territoire et dans ses eaux territoriales est tout à fait normal.
Lin Jian, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères
Et de marteler que “quoi que disent ou fassent les autorités taïwanaises, elles ne peuvent pas changer le fait que les deux côtés du détroit de Taïwan appartiennent à une seule Chine”. Une rhétorique martelée de longue date par Pékin, mais qui prend une résonance toute particulière dans ce contexte de tensions exacerbées.
Quel avenir pour les relations sino-taïwanaises ?
Si une réunification pacifique reste officiellement l’option privilégiée par Pékin, force est de constater que la pression militaire et les menaces à peine voilées sont devenues la norme dans le détroit de Taïwan. Une tendance lourde qui ne semble pas près de s’inverser, tant la question taïwanaise reste un enjeu crucial pour le régime chinois.
Face à cette pression constante, Taipei peut compter sur le soutien de Washington, qui s’est engagé à contribuer au maintien de sa capacité d’autodéfense. Mais jusqu’où les États-Unis sont-ils prêts à aller pour défendre Taïwan en cas de conflit ouvert avec la Chine ? La question reste entière, et nourrit toutes les inquiétudes dans la région.
Une chose est sûre : dans ce face-à-face sino-taïwanais aux allures de poudrière, le moindre incident pourrait mettre le feu aux poudres et précipiter une crise majeure aux répercussions potentiellement mondiales. Le passage du porte-avions Liaoning dans le détroit cette semaine est venu nous le rappeler une fois de plus.
