Les relations entre la France et l’Algérie traversent une nouvelle zone de turbulences. Au cœur de la tempête : des rumeurs de restrictions commerciales imposées par Alger, en représailles au soutien affiché de Paris au plan d’autonomie marocain sur le Sahara occidental. Des allégations fermement démenties par le gouvernement algérien.
L’étincelle : les propos d’un ex-ambassadeur français
C’est une publication sur le réseau social X (ex-Twitter) de Xavier Driencourt, ancien ambassadeur de France en Algérie, qui a mis le feu aux poudres. Dans ce message au vitriol, le diplomate affirmait qu’en « remerciement » du soutien français au Maroc, l’Algérie avait décidé de « bloquer toutes les importations françaises et les exportations vers la France ». Des propos qualifiés de « délire haineux » par Alger.
Un « démenti catégorique » de l’Algérie
Face à la polémique naissante, les autorités algériennes n’ont pas tardé à réagir. Dans un communiqué officiel relayé par les médias publics, la cellule communication du Premier ministre a tenu à apporter « un démenti catégorique » à ces « informations totalement erronées ». Le gouvernement algérien a fermement rejeté ces « allégations mensongères » concernant de prétendues « mesures restrictives au commerce ».
Des échanges commerciaux en hausse
Loin des rumeurs alarmistes, les chiffres officiels témoignent au contraire d’une dynamique positive dans les échanges commerciaux entre les deux pays. En 2023, le commerce franco-algérien a enregistré une croissance de 5,3% sur un an, atteignant 11,8 milliards d’euros. Les exportations françaises vers l’Algérie se sont élevées à 4,49 milliards d’euros, tandis que la France a importé pour 7,3 milliards d’euros de biens algériens. Des données qui confirment la place de l’Algérie comme second marché africain pour les entreprises françaises.
Le Sahara occidental, pomme de discorde
Si les échanges économiques semblent épargnés, les relations politiques entre Paris et Alger n’en demeurent pas moins tendues. En cause : le dossier épineux du Sahara occidental, territoire disputé entre le Maroc et les indépendantistes sahraouis du Front Polisario, soutenus par l’Algérie. Fin juillet, la France a réitéré son soutien au plan d’autonomie marocain, suscitant l’ire d’Alger qui a rappelé son ambassadeur et réduit sa représentation diplomatique en France.
D’autres mesures de rétorsion devraient suivre, selon le chef de la diplomatie algérienne Ahmed Attaf, sans pour autant en préciser la nature.
Les dessous d’un contentieux historique
Au-delà de la question du Sahara occidental, les crispations actuelles s’enracinent dans une relation post-coloniale complexe et douloureuse entre la France et l’Algérie. Malgré des liens humains et économiques étroits, les deux pays peinent à apaiser les tensions mémorielles et les incompréhensions mutuelles. La reconnaissance par la France de la guerre d’Algérie comme une « guerre » et non des « événements », en 2023, n’a pas suffi à tourner définitivement la page d’un passé qui ne passe pas.
Vers une désescalade ?
Si le gouvernement algérien s’est empressé de démentir les rumeurs de « guerre commerciale », le climat reste électrique entre les deux capitales. Selon des sources diplomatiques, des canaux de communication auraient néanmoins été activés en coulisses pour tenter d’apaiser les tensions. Paris et Alger ont en effet tout intérêt à préserver une relation bilatérale essentielle, tant sur le plan économique que sécuritaire, dans une région Maghreb-Sahel confrontée aux défis du terrorisme et des trafics en tout genre.
L’épisode des rumeurs de blocus commercial aura en tout cas révélé la fragilité des liens tissés entre l’Algérie et son ancien colonisateur. Si les échanges économiques semblent pour l’heure épargnés, la nouvelle crise diplomatique vient rappeler que la route vers une normalisation complète des relations franco-algériennes est encore longue et semée d’embûches. Un chemin escarpé que Paris et Alger devront néanmoins s’efforcer d’emprunter s’ils veulent écrire ensemble une nouvelle page de leur histoire commune, loin des démons du passé et des incompréhensions du présent.