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Tensions en RDC : L’Angola accuse le M23 de violation du cessez-le-feu

Coup de théâtre dans le conflit en RDC : l'Angola, médiateur clé, accuse ouvertement les rebelles du M23 d'avoir violé le cessez-le-feu. Un développement inquiétant qui risque d'envenimer davantage les relations déjà tendues entre Kinshasa et Kigali. La situation semble s'enliser dans l'est de la RDC, malgré les efforts diplomatiques. Quelles seront les conséquences de cette accusation ?

Dans un rebondissement inattendu, l’Angola, médiateur de premier plan dans le conflit qui déchire l’est de la République démocratique du Congo (RDC), a publiquement mis en cause les rebelles du M23, les accusant d’avoir violé le cessez-le-feu en place depuis début août. Cette prise de position sans ambiguïté de la part de Luanda constitue un développement majeur dans ce dossier épineux qui empoisonne les relations entre le Rwanda et la RDC.

Le M23 pointé du doigt pour la reprise des hostilités

Selon un communiqué des autorités angolaises relayé par l’AFP, l’occupation de la localité de Kalembe par les forces du M23 dimanche dernier représente “une violation flagrante” de la trêve négociée sous l’égide de Luanda. L’Angola “rejette et condamne vigoureusement cet acte hostile“, estimant qu’il met en péril les efforts diplomatiques en cours pour résoudre durablement le conflit.

Ce coup d’éclat du mouvement rebelle, qui a conquis de larges portions de territoire dans l’est congolais depuis 2021, intervient dans un contexte de vives tensions entre Kinshasa et Kigali. La RDC accuse en effet ouvertement le Rwanda de soutenir le M23, ce que ce dernier dément. L’Angola jouait jusqu’à présent un rôle de médiateur discret, ce qui rend cette prise de position publique d’autant plus significative.

Une escalade qui suscite l’inquiétude

D’après des sources locales contactées par l’AFP, de violents combats ont opposé dimanche les rebelles à des milices pro-gouvernementales pour le contrôle de Kalembe, une ville stratégique du Nord-Kivu située sur un axe permettant d’accéder à des gisements miniers. Si la localité a depuis été reprise par les groupes armés alliés à Kinshasa, l’épisode illustre la grande volatilité de la situation sécuritaire dans la région.

Les VDP contrôlent Kalembe, et les FARDC n’ont pas pris part aux combats.

– Marcellin Shenkuku, porte-parole du NDC-R

L’implication directe des forces armées rwandaises ou congolaises dans ces affrontements n’a pour l’heure pas pu être confirmée de source indépendante. Mais dans ce climat de défiance, toute étincelle est susceptible de mettre le feu aux poudres. La communauté internationale redoute qu’une reprise généralisée des hostilités n’aggrave encore la crise humanitaire qui ravage l’est de la RDC.

La médiation angolaise fragilisée ?

Désigné par l’Union africaine pour tenter une médiation entre Kinshasa et Kigali, l’Angola s’était jusqu’à présent gardé d’incriminer publiquement un camp ou l’autre. En pointant explicitement la responsabilité du M23 dans la rupture du cessez-le-feu, Luanda prend donc le risque de compromettre sa position d’intermédiaire neutre.

Sollicité, le gouvernement congolais n’a pas souhaité commenter officiellement les déclarations angolaises. Mais selon une source proche du dossier, Kinshasa se réjouit de cette prise de position qui valide son narratif sur le rôle déstabilisateur du Rwanda et de ses supplétifs dans l’est du pays. Reste à savoir si cela suffira à faire plier Kigali, qui a jusqu’ici toujours nié en bloc soutenir la rébellion.

Un dossier sous haute surveillance internationale

Au-delà de l’Angola, la communauté internationale suit de très près l’évolution de la situation dans l’est de la RDC. La région des Grands Lacs est en effet considérée comme une poudrière, dont la déstabilisation pourrait avoir de lourdes conséquences à l’échelle du continent. Plusieurs pays et organisations régionales ont dépêché des émissaires pour tenter de rapprocher les positions et éviter une escalade militaire.

Mais les intérêts divergents des acteurs impliqués, le poids des contentieux historiques et la compétition pour le contrôle des ressources naturelles abondantes de la région rendent la tâche particulièrement ardue. Dans ce contexte, l’accusation portée par l’Angola contre le M23 risque de jeter de l’huile sur le feu, tout en illustrant la difficulté à faire respecter les engagements pris par les parties sur le terrain.

Un test pour l’unité et la crédibilité de la médiation africaine

Plus largement, cet épisode constitue un test pour la capacité de l’Union africaine et des organisations sous-régionales à peser efficacement dans la résolution des conflits sur le continent. Alors que les initiatives diplomatiques se multiplient, leur crédibilité dépendra in fine des résultats tangibles obtenus sur le terrain en termes de retour de la paix et de la stabilité.

En RDC, malgré le déploiement d’une force régionale est-africaine et les pressions internationales, la situation sécuritaire et humanitaire reste préoccupante, particulièrement dans les provinces orientales. Les populations civiles continuent de payer le prix fort des affrontements entre groupes armés, sur fond de faiblesses structurelles de l’État congolais et d’ingérences extérieures.

Dans ce contexte volatile, l’appel de l’Angola à faire respecter le cessez-le-feu résonne comme un cri d’alarme. Il reste à voir si ce coup de semonce diplomatique suffira à relancer une dynamique de désescalade, ou s’il ne fera au contraire qu’attiser les tensions dans une région qui n’en manque déjà pas. L’avenir de millions de Congolais en dépend.

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