Les eaux agitées de la mer de Chine méridionale sont à nouveau le théâtre de vives tensions entre la Chine et les Philippines. Pékin a en effet déclaré lundi avoir pris des « mesures de contrôle » à l’encontre de navires philippins accusés de s’être « rassemblés illégalement » à proximité d’un récif contesté dans cette zone maritime disputée où les incidents se multiplient.
« Rassemblement illégal » près du récif Iroquois
Selon Liu Dejun, porte-parole des garde-côtes chinois cité dans un communiqué, « plusieurs navires philippins (…) se sont rassemblés illégalement sous prétexte de pêcher dans les eaux proches du récif Houteng des îles Nansha de Chine ». Il faisait référence au récif Iroquois, connu sous le nom chinois de Houteng, qui fait partie des îles Spratleys, appelées Nansha par Pékin.
Face à cette situation, « les garde-côtes chinois ont pris les mesures de contrôle nécessaires contre les navires philippins, conformément à la loi », a indiqué Liu Dejun. Il a également lancé un avertissement à la partie philippine, l’exhortant à « cesser immédiatement ses infractions et ses provocations ».
Revendications contestées malgré une décision de justice
La Chine revendique la quasi-totalité de la mer de Chine méridionale, et ce malgré une décision de justice internationale rendue en 2016 qui a statué que ses prétentions n’avaient pas de fondement juridique. Pékin déploie régulièrement des navires de sa marine et de ses garde-côtes pour tenter d’interdire aux Philippines l’accès à des récifs et à des îlots d’importance stratégique dans la région.
« Harcèlement » par un hélicoptère chinois
En réponse aux actions chinoises, un porte-parole des garde-côtes philippins pour la mer de Chine méridionale, le contre-amiral Jay Tarriela, a déclaré qu’un hélicoptère chinois avait « harcelé » des navires philippins près du récif Iroquois. Il s’est basé sur une vidéo prise par un pêcheur philippin le 27 novembre dernier, montrant l’appareil volant à très basse altitude, entre 15 et 18 pieds au-dessus des bateaux.
« C’est la première fois que nous voyons un hélicoptère de la marine chinoise harceler des pêcheurs philippins à une altitude aussi basse »
– Jay Tarriela, porte-parole des garde-côtes philippins pour la mer de Chine méridionale
Ce « harcèlement » chinois a incité les gardes-côtes philippins à déployer deux navires dans la zone « afin d’assurer la sécurité des pêcheurs philippins qui exercent leur droit de pêcher librement près du récif de Rozul », autre nom du récif Iroquois.
Tensions exacerbées par de nouvelles lois philippines
Les tensions se sont intensifiées début novembre lorsque le président philippin Ferdinand Marcos a promulgué deux lois délimitant les eaux territoriales fixes pour le passage des navires et avions étrangers. Une mesure qui a suscité une vive riposte de la Chine, allant jusqu’à convoquer l’ambassadeur philippin.
Au cours de l’année écoulée, les affrontements entre les bateaux des deux parties se sont multipliés, causant des blessés et des dégâts matériels.
L’Indonésie aussi confrontée aux prétentions chinoises
L’Indonésie fait également face aux revendications territoriales de Pékin en mer de Chine méridionale. Le ministre indonésien des Affaires étrangères Sugiono a affirmé lundi que son pays continuait à ne pas reconnaître les prétentions chinoises dans cette zone maritime.
Lors d’une visite à Pékin début novembre, le président indonésien Prabowo Subianto avait érigé en « principe fondamental » le fait de « renforcer la coopération avec ses voisins dans l’intérêt national ». Cependant, le ministre Sugiono a tenu à souligner que « en ce qui concerne notre souveraineté, nous ne changerons pas de position ».
Des navires chinois pénètrent régulièrement dans des zones revendiquées par l’Indonésie au nord de la mer des Natuna, elle aussi revendiquée par Pékin, suscitant les protestations de Jakarta.
Des ressources énergétiques en jeu
Au cœur de ces tensions géopolitiques se trouvent également des enjeux énergétiques majeurs. Les fonds marins de la mer de Chine méridionale contiendraient en effet d’énormes gisements de pétrole et de gaz encore inexploités, bien que les estimations varient considérablement quant à leur ampleur exacte.
Face à ces ressources stratégiques et au positionnement crucial de cette voie maritime pour le commerce international, il est peu probable que les différends territoriaux trouvent une résolution rapide et définitive. La mer de Chine méridionale risque ainsi de demeurer encore longtemps une zone de frictions entre puissances régionales, où la Chine entend imposer sa souveraineté malgré l’opposition de ses voisins et les décisions de la justice internationale.