Un vent glacial souffle sur les relations entre Varsovie et Budapest. Le ministère polonais des Affaires étrangères a en effet annoncé le rappel de son ambassadeur en Hongrie pour consultations et la convocation de l’ambassadeur hongrois à Varsovie. En cause : la décision de la Hongrie d’accorder l’asile politique à Marcin Romanowski, un ancien vice-ministre polonais de la Justice recherché dans son pays pour des soupçons de corruption.
Un « acte hostile » selon la Pologne
Dans un communiqué officiel, le ministère polonais dénonce vivement ce qu’il considère comme « un acte hostile à l’égard de la République de Pologne et contraire aux principes élémentaires régissant les États membres de l’Union européenne ». Varsovie juge « insultant » que Budapest justifie sa décision en invoquant une prétendue « persécution politique » visant Marcin Romanowski.
De lourds soupçons pèsent sur l’ex-vice-ministre
L’ancien responsable polonais, chargé entre 2019 et 2023 de superviser un fonds d’aide aux victimes d’actes criminels, est accusé par le parquet de son pays d’avoir commis pas moins de onze infractions. Il est notamment soupçonné d’avoir détourné ou tenté de détourner près de 40 millions d’euros. La justice polonaise a ordonné son placement en détention provisoire pour trois mois, mais l’intéressé s’est volatilisé il y a une dizaine de jours.
La Hongrie dénonce des « manquements » dans la procédure
De son côté, le gouvernement hongrois affirme disposer de « preuves concrètes de manquements dans le processus judiciaire » visant Marcin Romanowski en Pologne. C’est ce qui l’a conduit à lui accorder l’asile politique, malgré le mandat d’arrêt européen émis à son encontre. Une justification balayée par Varsovie, pour qui la décision hongroise contrevient aux « principes élémentaires » de l’UE.
Une relation déjà dégradée depuis l’arrivée de Tusk au pouvoir
Les observateurs relèvent que les relations entre la Pologne et la Hongrie se sont nettement détériorées depuis qu’une coalition pro-européenne menée par Donald Tusk a remporté les législatives d’octobre 2023 à Varsovie. Auparavant, le parti nationaliste Droit et Justice, proche de Viktor Orban, était au pouvoir en Pologne.
Quelles conséquences pour les relations au sein de l’UE ?
Cette crise diplomatique soudaine soulève des questions sur l’avenir des relations entre ces deux pays membres de l’Union européenne. D’après certains experts, elle pourrait compliquer la recherche d’un consensus sur plusieurs dossiers européens sensibles :
- La réforme des règles budgétaires de l’UE
- Le Pacte sur la migration et l’asile
- Le projet de loi sur la restauration de la nature
D’autres soulignent cependant que les consultations entre les ambassadeurs offrent une opportunité de renouer le dialogue et d’aplanir les différends. Reste à savoir si Varsovie et Budapest parviendront à surmonter cette épreuve sans dommages durables pour leur coopération bilatérale et européenne.
D’après une source diplomatique anonyme, « cette affaire met en lumière les divergences croissantes entre les gouvernements polonais et hongrois sur les questions d’État de droit et de souveraineté nationale au sein de l’UE ».
Ce nouvel accroc vient en tout cas ternir un peu plus l’image d’une Europe unie face aux grands défis du moment. Entre guerre en Ukraine, crise énergétique et montée des populismes, l’UE peine décidément à parler d’une seule voix. L’épisode Romanowski ajoute une pierre à cet édifice de divisions.
En conclusion, cette brouille polono-hongroise n’est peut-être que la partie émergée d’un iceberg de tensions au sein du bloc européen. Elle rappelle combien l’unité et la solidarité si souvent invoquées peuvent se fissurer rapidement dès lors que des intérêts nationaux divergents entrent en jeu. Un signal d’alarme à ne pas négliger, à l’heure où l’Europe a plus que jamais besoin de cohésion pour peser sur la scène internationale et affronter les crises multiples qui l’assaillent.