Klaxons intempestifs, queues de poisson, refus de priorité… L’ambiance sur les routes françaises semble de plus en plus électrique entre les différents usagers. C’est ce que révèle un récent sondage européen qui pointe du doigt les comportements à risque et le manque de civisme croissant des conducteurs hexagonaux.
Un climat de défiance généralisé sur la route
Réalisée dans 11 pays par l’institut Ipsos pour la fondation Vinci Autoroutes, cette vaste enquête dresse un constat préoccupant : 95% des personnes interrogées redoutent les comportements dangereux des autres usagers, contre 92% l’an dernier. Un chiffre record qui illustre la dégradation des relations et la perte de confiance sur le bitume.
Il y a une méconnaissance d’un certain nombre de règles du code de la route, et de l’inconscience quand les gens qui connaissent les règles prennent quand même des risques.
Bernadette Moreau, déléguée générale de la fondation Vinci Autoroutes
Pour la responsable, cette situation engendre un cercle vicieux : “Tout le monde a peur de tout le monde, et avec de l’anxiété on va avoir des réactions incontrôlées”. Un cocktail explosif sur des routes déjà bien encombrées.
Automobilistes contre cyclistes, le choc des cultures
Avec l’essor des mobilités douces en ville, les frictions se multiplient entre voitures et vélos. Le tragique accident survenu mi-octobre à Paris, où un cycliste a été mortellement fauché par un SUV, a remis en lumière ces conflits d’usage.
Selon le sondage, 57% des deux-roues motorisés admettent emprunter les pistes cyclables, tandis que 12% des automobilistes reconnaissent les utiliser pour s’arrêter ou stationner. Quant au “sas vélo”, cet espace réservé aux cycles devant les feux, il est régulièrement envahi : 33% des voitures et 67% des motos et scooters avouent s’y engager.
Des piétons vulnérables et inquiets
Grands oubliés de la route, les piétons paient aussi un lourd tribut. Pas moins de 93% d’entre eux craignent qu’une voiture ne s’arrête pas alors qu’ils traversent sur un passage clouté. Et 80% affirment avoir été frôlés sur un trottoir par un vélo, une trottinette ou un hoverboard…
Face à ces incivilités qui dégradent la sécurité de tous, des efforts de sensibilisation restent à mener, estime la fondation. Car les mauvaises habitudes ont la vie dure : 68% des conducteurs reconnaissent encore griller des feux oranges ou rouges. Et 78% téléphonent en roulant, même avec un kit mains-libres.
Un sentiment d’insécurité plus marqué chez les cyclistes français
Loin du “paradis” néerlandais, où 93% des cyclistes se sentent en sécurité, les usagers français sont les plus mal lotis. Seuls 59% d’entre eux se disent sereins lorsqu’ils enfourchent leur bicyclette, le score le plus faible des 11 pays sondés.
Pour apaiser les tensions et mieux partager l’espace public, “chacun peut s’interroger sur les excès qu’il peut faire en étant sur la route, et sur la vulnérabilité des cyclistes et des piétons”, recommande Bernadette Moreau. La responsabilité individuelle comme clef d’une cohabitation plus harmonieuse ?
Réalisée en ligne du 19 février au 19 mars auprès de plus de 12.000 personnes dans 11 pays européens, dont 2.413 en France, l’étude révèle une faille grandissante dans le modèle de mobilité à la française. Un signal d’alerte à prendre au sérieux pour enrayer la spirale de la défiance sur les routes. Et éviter que bitume ne rime définitivement avec champ de bataille…