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Tensions à Maputo après l’assassinat de proches d’un opposant

Maputo ville fantôme après une manifestation réprimée, suite à l'assassinat de proches de l'opposant Venancio Mondlane. La contestation enfle sur les résultats électoraux, entre accusations de fraudes et appels au calme de la communauté internationale. Le pouvoir vacille-t-il ?

La capitale du Mozambique, Maputo, s’est retrouvée largement paralysée ce lundi, transformée en ville fantôme. Deux jours plus tôt, des proches de l’opposant Venancio Mondlane, dont son avocat, étaient assassinés en plein centre-ville. En réaction, « Venancio » comme l’appellent ses partisans, avait appelé à une grève générale pour dénoncer des fraudes lors des élections générales du 9 octobre dernier.

Malgré un important dispositif policier déployé, des centaines de manifestants ont brièvement défilé le long d’une grande avenue de la capitale, avant d’être dispersés par les forces anti-émeutes à l’aide de gaz lacrymogène. Venancio Mondlane, charismatique opposant et candidat malheureux à la présidentielle, a lui-même échappé de peu à la répression pour venir haranguer la foule. Il accuse le pouvoir d’avoir tenté de l’empêcher de rejoindre la manifestation :

« Ce matin je ne pouvais pas sortir de chez moi. Il y avait des tas de gens, y compris la police. Il m’a fallu une heure pour déjouer l’escadron de la mort à ma porte. Je ne vous dirai pas comment j’y suis arrivé. »

Un scrutin entaché d’irrégularités selon l’opposition

Venancio Mondlane et son parti Podemos contestent les premiers résultats partiels qui donnent une large avance au Frelimo, formation au pouvoir depuis l’indépendance du pays il y a près d’un demi-siècle. Les résultats officiels complets sont attendus dans les prochains jours. Mais déjà, les accusations de fraudes et d’irrégularités se multiplient.

L’avocat de Venancio Mondlane, Elvino Dias, assassiné vendredi soir, préparait justement un recours devant la Cour constitutionnelle pour contester le scrutin. Son véhicule a été pris dans une embuscade en plein cœur de Maputo par deux hommes armés qui ont ouvert le feu, le tuant ainsi qu’un responsable de Podemos qui l’accompagnait.

Opération ville morte dans plusieurs provinces

Ce lundi, la vie économique du pays était quasiment à l’arrêt, selon Venancio Mondlane qui affirme avoir « paralysé le pays à 95% ». Les commerces sont restés fermés à Maputo tandis que des incidents sporadiques étaient signalés en province. Les grandes villes de Beira et Pemba ont notamment été le théâtre d’opérations « villes mortes » à l’appel de l’opposition.

Les rues de la capitale, d’ordinaire congestionnées par la circulation, étaient quasi désertes, seulement survolées par des hélicoptères des forces de l’ordre. Toute la journée, des policiers lourdement armés ont patrouillé, à l’affût de tout rassemblement.

La communauté internationale appelle au calme

Face à ces tensions et violences post-électorales, la communauté internationale s’inquiète et appelle toutes les parties à la retenue. L’Union européenne, l’Union africaine et les Nations unies ont fermement condamné les assassinats de vendredi et exigent l’ouverture rapide d’une enquête indépendante.

« Il est essentiel que tous les candidats bénéficient de mesures de protection rigoureuses en cette période post-électorale. »

communiqué de l’Union européenne

L’ONU de son côté a exhorté « tous les Mozambicains, y compris les dirigeants politiques et leurs sympathisants, au calme et à la retenue ». Un message au pouvoir du président Filipe Nyusi comme à l’opposition de Venancio Mondlane.

Le risque d’une escalade est réel. L’an dernier, après les municipales remportées largement par le Frelimo, plusieurs manifestants de l’opposition avaient été tués par la police. A mesure que les résultats définitifs de la présidentielle, des législatives et des provinciales approchent, la fièvre politique monte au Mozambique. Le spectre d’une crise post-électorale et de violences, comme le pays en a tant connues par le passé, ressurgit.

Même si Venancio Mondlane ne peut rassembler assez de soutiens pour faire basculer le rapport de force, le doute installé sur la sincérité du vote risque d’entacher durablement la légitimité des futures institutions. Pour le Mozambique, le chemin vers l’apaisement et la consolidation démocratique s’annonce encore long et chaotique.

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