C’est dans un climat électrique que se prépare le débat sur l’abrogation de la réforme des retraites à l’Assemblée Nationale. Alors que la proposition de loi déposée par les députés de La France Insoumise (LFI) doit être examinée ce jeudi, les échanges s’enveniment déjà entre la majorité présidentielle et l’opposition de gauche. Au cœur des tensions : les plus de 1000 amendements déposés par les macronistes et la droite pour tenter de faire barrage au texte.
LFI dénonce « l’obstruction parlementaire » de la majorité et de LR
Mardi matin, lors de la conférence des présidents de l’Assemblée, les insoumis ont vivement réagi à cette avalanche d’amendements visant selon eux à empêcher le débat. La cheffe de file des députés LFI, Mathilde Panot, a fustigé « cette obstruction parlementaire inadmissible », réclamant qu’une seule prise de parole pour et contre soit autorisée sur chaque amendement afin de ne pas ralentir les débats. Une requête balayée par les représentants de la majorité.
D’après des sources proches du dossier, les échanges auraient été particulièrement tendus lors de cette réunion, certains élus n’hésitant pas à claquer la porte. « L’ambiance était exécrable, chacun campant sur ses positions », rapporte un participant. Le torchon brûle entre les différents camps, laissant présager d’une séance des plus houleuses jeudi dans l’hémicycle.
Une réforme des retraites toujours controversée
Il faut dire que le sujet reste brûlant, même plusieurs mois après l’adoption de la réforme via le 49.3 au printemps dernier. Si le gouvernement espérait tourner la page, la colère reste vive chez les opposants au report de l’âge légal de départ à 64 ans. Syndicats et partis de gauche appellent toujours à l’abrogation pure et simple de ce qu’ils considèrent comme une régression sociale majeure.
Pour LFI, ce débat est donc l’occasion de remettre le dossier sur la table et de maintenir la pression sur l’exécutif. Mais la majorité n’entend pas se laisser faire et compte bien enterrer cette proposition de loi, quitte à recourir à toutes les armes de la guérilla parlementaire. Quitte aussi à braquer un peu plus une opinion publique déjà largement opposée à la réforme.
Vers un nouveau bras de fer à l’Assemblée ?
Au-delà des retraites, c’est bien un nouvel épisode de la guerre institutionnelle qui se joue entre le camp présidentiel et les oppositions. Depuis le début de la législature et la perte de la majorité absolue pour les macronistes, l’Assemblée est devenue le théâtre de passes d’armes incessantes et de débats ultra-tendus sur tous les textes.
Les insoumis, qui mènent la fronde, dénoncent un verrouillage des débats et un passage en force permanent du gouvernement. En face, on fustige des oppositions jugées irresponsables et obnubilées par l’obstruction. Dans ce contexte, difficile d’imaginer un débat apaisé et constructif jeudi sur un sujet aussi clivant et inflammable que les retraites.
Chaque camp est arc-bouté sur ses positions et semble déterminé à en découdre, quitte à offrir un nouveau spectacle de divisions et de cacophonie dans l’hémicycle. De quoi encore un peu plus écorner l’image et la crédibilité d’une institution déjà bien malmenée ces derniers mois. Et laisser les Français pantois et exaspérés devant ces querelles politiciennes à répétition.
Des enjeux sociaux majeurs en toile de fond
Pourtant, au-delà des postures et des invectives, ce sont bien des questions sociales essentielles qui seront débattues jeudi. La réforme des retraites touche au cœur notre modèle social et soulève des problématiques profondes sur la pénibilité, les inégalités, le financement de notre système par répartition.
Des sujets complexes qui mériteraient un vrai débat de fond, loin des caricatures et des slogans. Un dialogue social apaisé aussi, pour tenter de rapprocher les points de vue et trouver des compromis. Tout le contraire de la tension et de la défiance qui s’installent dangereusement entre gouvernants et oppositions, mais aussi avec les corps intermédiaires.
Reste à savoir si les députés sauront se montrer à la hauteur de l’événement jeudi, en dépassant les clivages partisans pour se concentrer sur l’essentiel. Rien n’est moins sûr hélas au vu de la radicalisation à l’œuvre ces derniers mois au Palais Bourbon. Mais les Français, eux, attendent autre chose que des hurlements et des portes qui claquent. Des débats dignes, du courage et des solutions : c’est tout l’enjeu de cette séance à haut risque.