ActualitésInternational

Tadjikistan: Un Guide Vestimentaire Pour Les Femmes À Venir

Le Tadjikistan publiera un guide détaillant comment les femmes doivent s'habiller traditionnellement dans chaque aspect de la vie, un an après avoir interdit les vêtements étrangers pour lutter contre l'islam radical. Les autorités vont-elles trop loin dans le contrôle vestimentaire des femmes ?

Dans un geste controversé, les autorités du Tadjikistan, pays musulman laïque d’Asie centrale, ont annoncé leur intention de publier un guide détaillant comment les femmes doivent s’habiller avec des vêtements traditionnels pour chaque aspect de leur vie. Cette décision intervient un an après l’interdiction du port de vêtements étrangers, une mesure visant à lutter contre l’influence de l’islam radical dans le pays.

Selon un responsable du ministère de la Culture, Khourched Nizomi, ce livre à caractère de recommandation s’appuiera sur des sources scientifiques et historiques, ainsi que l’avis d’experts. Il présentera les habits que les femmes sont invitées à porter en fonction de leur âge, que ce soit lors de cérémonies, au travail, au repos, au théâtre ou encore à la maison.

Une tentative de préserver les traditions vestimentaires

Le livre, dont la publication est prévue pour juillet prochain, sera distribué gratuitement dans un premier temps. D’après M. Nizomi, il comportera de nombreux exemples et photos de haute qualité, surpassant les éditions précédentes similaires en termes d’impression, de choix photographiques, de textes et de sources historiques.

L’objectif affiché est de préserver les traditions vestimentaires tadjikes, tout en y intégrant des touches modernes apportées par des créateurs. Un guide distinct pour les hommes pourrait également voir le jour à l’avenir.

Une lutte contre l’islam radical qui divise

Ces recommandations vestimentaires s’inscrivent dans un contexte de lutte contre l’islam radical au Tadjikistan, pays frontalier de l’Afghanistan. Cette lutte a été relancée l’an dernier suite à l’arrestation de citoyens tadjiks accusés d’être impliqués dans un attentat meurtrier à Moscou en mars 2024.

Le président Emomali Rakhmon, au pouvoir depuis 1992, a qualifié le port du hijab de « problème sociétal ». Les autorités ont appelé à plusieurs reprises ces dernières années les femmes à « s’habiller à la tadjike », c’est-à-dire à ne pas porter de vêtements européens dénudés, ni de vêtements noirs ou de hijabs.

Les traditions sont préservées avec des ajouts de créateurs qui correspondent aux tendances modernes.

Khourched Nizomi, responsable au ministère de la Culture

Une pression vestimentaire qui s’étend aussi aux hommes

Les restrictions vestimentaires ne concernent pas uniquement les femmes au Tadjikistan. Le port de la barbe longue y est de facto interdit pour les hommes, officiellement pour lutter contre « l’islamisme et l’extrémisme religieux ». Cette mesure fait suite au départ de nombreux citoyens tadjiks pour rejoindre des groupes jihadistes en Syrie et en Irak autour des années 2015.

Si les autorités présentent ce guide comme un moyen de valoriser l’héritage culturel du pays, de nombreuses voix s’élèvent pour dénoncer une tentative de contrôle supplémentaire sur les libertés individuelles, en particulier celles des femmes. Beaucoup craignent que ces recommandations vestimentaires, bien que non obligatoires sur le papier, ne se transforment en règles contraignantes.

Un équilibre délicat entre traditions et libertés

Le Tadjikistan, comme d’autres pays d’Asie centrale, est confronté au défi de trouver un équilibre entre la préservation de son identité culturelle et religieuse et l’adaptation à un monde en mutation. La lutte contre l’extrémisme est un enjeu majeur, mais elle ne doit pas se faire au détriment des droits et libertés fondamentaux des citoyens.

La publication de ce guide vestimentaire risque d’alimenter les débats sur la place de la religion dans la société tadjike et sur le rôle de l’État dans la régulation des comportements individuels. Il sera intéressant de suivre les réactions de la population et de la communauté internationale face à cette initiative controversée.

En conclusion

Le Tadjikistan s’apprête donc à franchir un nouveau pas dans sa volonté de contrôler l’apparence et les habitudes vestimentaires de ses citoyens, en particulier des femmes. Si l’intention affichée est de valoriser les traditions et de lutter contre l’extrémisme, cette démarche soulève de nombreuses questions sur le respect des libertés individuelles et l’équilibre entre sécurité et droits fondamentaux.

Il sera crucial pour les autorités de mener un dialogue ouvert avec la société civile pour s’assurer que ces recommandations ne se transforment pas en diktat vestimentaire. Seule une approche nuancée, respectueuse des choix individuels, permettra au pays de préserver son identité culturelle tout en embrassant la modernité et la diversité.

Passionné et dévoué, j'explore sans cesse les nouvelles frontières de l'information et de la technologie. Pour explorer les options de sponsoring, contactez-nous.