Dans le sud de la Syrie, la province de Soueida, bastion de la communauté druze, est à nouveau le théâtre de violences meurtrières. Après un cessez-le-feu fragile instauré fin juillet, des affrontements ont repris, faisant au moins quatre morts ce dimanche. Cette recrudescence des tensions entre Druzes et Bédouins sunnites, aggravée par l’intervention des forces gouvernementales, ravive les craintes d’une escalade dans une région déjà marquée par des décennies de conflit. Que se passe-t-il à Soueida, et pourquoi ce cessez-le-feu n’a-t-il pas tenu ?
Une Province sous Tension : Contexte des Affrontements
La province de Soueida, située dans le sud de la Syrie, est majoritairement peuplée par la communauté druze, une minorité religieuse issue de l’islam chiite. Historiquement, cette région a été un espace de coexistence entre différentes communautés, mais les tensions entre Druzes et Bédouins sunnites se sont intensifiées ces dernières années. Les récents affrontements, qui ont éclaté autour de la localité stratégique de Tal Hadid, ont fait resurgir des rivalités communautaires dans un contexte de fragilité politique et sociale.
Le conflit a repris malgré un cessez-le-feu conclu le 20 juillet, qui avait mis fin à une semaine de violences ayant causé plus de 1 400 morts, majoritairement des Druzes. Ce fragile accord de paix, censé apaiser les tensions, n’a pas résisté aux provocations et aux interventions des forces gouvernementales, alliées à des combattants tribaux bédouins. La situation reste volatile, avec des accès limités à la province et des habitants confrontés à un blocus de facto.
Les Événements de Tal Hadid : Une Étincelle Meurtrière
Dimanche, les violences ont éclaté sur l’axe de Tal Hadid, un point stratégique en altitude qui domine l’ouest de la province. Selon des sources locales, trois membres des forces de sécurité syriennes ont été tués lors d’affrontements avec des factions druzes locales. Un combattant originaire de Soueida a également perdu la vie dans ces combats, marquant la première résurgence significative de violences depuis le cessez-le-feu.
Les combats ont repris après des tirs de roquettes et d’armes lourdes provenant des zones tenues par les forces gouvernementales.
Les explosions et les tirs ont résonné dans plusieurs quartiers de la ville de Soueida, plongeant les habitants dans l’angoisse. Tal Hadid, en raison de sa position géographique, est un enjeu clé pour le contrôle de la province, ce qui explique l’intensité des affrontements dans cette zone.
Un Cessez-le-Feu Fragile : Les Causes de l’Échec
Le cessez-le-feu de juillet, bien qu’initialement salué, n’a pas réussi à apaiser durablement les tensions. Plusieurs facteurs expliquent cette reprise des hostilités :
- Blocus imposé : Depuis juillet, la route reliant Soueida à Damas est coupée, limitant l’accès aux biens essentiels. Les habitants accusent les autorités de maintenir un blocus pour affaiblir la province.
- Interventions extérieures : L’arrivée de combattants tribaux bédouins, soutenus par les forces gouvernementales, a exacerbé les tensions communautaires.
- Revendications locales : Les Druzes, sous l’influence de figures comme Hikmat al-Hijri, exigent le retrait des troupes gouvernementales, perçues comme une menace.
Ces éléments ont créé un climat de méfiance, où chaque incident, même mineur, risque de raviver le conflit. Les autorités syriennes, de leur côté, accusent des groupes druzes d’avoir violé l’accord en attaquant les forces de sécurité à Tal Hadid.
La Population au Cœur du Conflit
Les habitants de Soueida vivent dans une situation précaire. Vendredi, des centaines d’entre eux sont descendus dans les rues pour protester contre le blocus et réclamer l’ouverture d’un couloir humanitaire vers la Jordanie voisine. Ces manifestations, marquées par des pancartes dénonçant la présence militaire, témoignent du désespoir d’une population prise en étau entre les violences et les restrictions.
Les Nations Unies ont tenté d’apporter une aide humanitaire, mais les convois restent limités. Une source officielle a indiqué que le couloir humanitaire était temporairement fermé en raison des récentes violations du cessez-le-feu, aggravant la crise pour les civils.
Un Contexte Syrien Explosif
La reprise des violences à Soueida s’inscrit dans un contexte national complexe. Depuis la chute de Bachar el-Assad en décembre, renversé par une coalition rebelle menée par des islamistes, les minorités ethniques et religieuses, comme les Druzes et les Alaouites, craignent pour leur sécurité. Assad, issu de la communauté alaouite, se présentait comme un protecteur des minorités, mais son départ a laissé un vide politique.
Les nouvelles autorités promettent de respecter les droits de toutes les communautés, mais les violences récentes jettent un doute sur leur capacité à maintenir l’unité.
Les massacres survenus en mars dans des zones alaouites, où environ 1 700 civils ont été tués, ont amplifié ces inquiétudes. À Soueida, les Druzes, historiquement autonomes, craignent une marginalisation dans un pays où les dynamiques de pouvoir évoluent rapidement.
Vers une Enquête sur les Violences ?
La recrudescence des affrontements intervient alors qu’un comité d’enquête vient d’être formé pour examiner les violences de juillet. Cette initiative, annoncée la veille des nouveaux combats, vise à identifier les responsabilités dans les affrontements qui ont coûté la vie à des milliers de personnes. Cependant, les habitants restent sceptiques quant à l’efficacité de cette enquête dans un climat de méfiance généralisée.
| Événement | Date | Conséquences |
|---|---|---|
| Violences de juillet | Juillet 2025 | 1 400 morts, majoritairement Druzes |
| Cessez-le-feu | 20 juillet 2025 | Arrêt temporaire des hostilités |
| Reprise des combats | Août 2025 | Quatre morts, tensions accrues |
Quel Avenir pour Soueida ?
La situation à Soueida reste incertaine. Les affrontements récents montrent la fragilité des accords de paix dans une région où les rivalités communautaires se mêlent aux luttes de pouvoir. Les habitants, épuisés par des années de guerre civile et un blocus persistant, continuent de réclamer des solutions durables, notamment l’ouverture de corridors humanitaires et le retrait des forces extérieures.
Pour l’instant, la province reste un point chaud dans une Syrie en reconstruction. Les nouvelles autorités, confrontées à des défis multiples, devront prouver leur capacité à garantir la sécurité de toutes les communautés, sous peine de voir le pays sombrer à nouveau dans la violence.
La communauté internationale observe avec inquiétude. Les efforts humanitaires, bien que nécessaires, ne suffiront pas à apaiser les tensions si les causes profondes du conflit – rivalités communautaires, ingérences extérieures et instabilité politique – ne sont pas abordées. Soueida, à l’image de la Syrie, reste à la croisée des chemins.
