Dans un contexte de bouleversements au Moyen-Orient, la question des relations entre la Syrie et Israël refait surface avec une intensité nouvelle. Ahmad al-Chareh, le nouveau visage du pouvoir syrien, s’est exprimé récemment à New York, en marge de l’Assemblée générale des Nations unies. Son discours, marqué par un mélange d’espoir prudent et de fermeté, soulève une interrogation majeure : la Syrie, après des décennies de tensions, peut-elle réellement tendre la main à son voisin historique ? Cet article explore les enjeux, les défis et les perspectives d’un possible apaisement entre ces deux nations.
Un Vent de Changement en Syrie
Depuis la chute de Bachar al-Assad en décembre dernier, la Syrie connaît une transition politique sans précédent. Ahmad al-Chareh, ancien combattant devenu chef d’État, incarne cette transformation. Lors de son passage à New York, il a marqué les esprits en rencontrant des figures diplomatiques de premier plan, dont le secrétaire d’État américain Marco Rubio. Ce dernier a insisté sur l’opportunité pour la Syrie de devenir une nation stable et souveraine. Mais derrière les déclarations officielles, quelles sont les intentions réelles de ce nouveau dirigeant ?
Chareh, autrefois associé à des mouvements jihadistes, a opéré une métamorphose remarquée. Il troque désormais le treillis pour le costume de chef d’État, rencontrant des leaders mondiaux comme le président américain Donald Trump en Arabie saoudite. Cette rencontre a d’ailleurs conduit à la levée des sanctions américaines contre Damas, un signal fort de la volonté de réintégrer la Syrie dans le concert des nations. Mais la question d’Israël reste un obstacle majeur.
Un Accord de Sécurité : Une Priorité pour Damas
L’objectif affiché par les autorités syriennes est clair : conclure un accord militaire et sécuritaire avec Israël d’ici la fin de l’année. Cet accord viserait à apaiser les tensions dans une région marquée par des décennies de conflits. Depuis la chute d’Assad, le chaos en Syrie a permis à Israël de mener de nombreuses frappes sur le territoire syrien, visant à contrer des menaces potentielles. Ces opérations, souvent perçues comme des violations de la souveraineté syrienne, compliquent les discussions.
J’espère que cela nous mènera à un accord qui préservera la souveraineté de la Syrie et résoudra également certaines des craintes sécuritaires d’Israël.
Ahmad al-Chareh, lors d’une réunion à New York
Cette déclaration, prononcée dans un hôtel new-yorkais, reflète une volonté de pragmatisme. Chareh semble conscient que la stabilité de son pays passe par un dialogue avec son voisin. Cependant, il insiste sur la nécessité de protéger la souveraineté nationale, un point non négociable pour Damas. Mais jusqu’où la Syrie est-elle prête à aller pour garantir sa sécurité tout en répondant aux exigences israéliennes ?
Les Accords d’Abraham : Une Voie Possible ?
Les Accords d’Abraham, signés en 2020 par les Émirats arabes unis, Bahreïn et le Maroc, ont marqué un tournant dans la normalisation des relations avec Israël. Ces accords, salués par certains comme un pas vers la paix, sont cependant regardés avec scepticisme en Syrie. Chareh a été clair : la situation syrienne diffère fondamentalement de celle de ces pays. Contrairement à eux, la Syrie partage une frontière directe avec Israël, marquée par des décennies de tensions, notamment autour du plateau du Golan.
Le dirigeant syrien a rappelé que son pays a subi plus de 1 000 frappes israéliennes depuis le Golan, un territoire occupé par Israël depuis 1967. Cette réalité alimente une méfiance profonde envers les intentions israéliennes. Chareh a également évoqué les violations par Israël des accords de paix signés avec l’Égypte et la Jordanie, renforçant les doutes sur la fiabilité de Tel-Aviv comme partenaire.
Les défis d’un accord avec Israël :
- Souveraineté : La Syrie insiste sur la préservation de son intégrité territoriale.
- Contexte régional : La guerre à Gaza influence l’opinion publique syrienne.
- Historique : Les frappes israéliennes alimentent la méfiance.
La Question de Gaza : Un Obstacle Majeur
La situation à Gaza, où les tensions entre Israël et le Hamas continuent de faire rage, complique davantage les négociations. Chareh a souligné l’impact émotionnel de ce conflit sur le peuple syrien. « Il y a une grande colère face à ce qui se passe à Gaza, non seulement en Syrie, mais dans le monde entier », a-t-il déclaré. Cette indignation, partagée par de nombreux pays arabes, rend la normalisation avec Israël politiquement risquée pour le nouveau régime syrien.
Pourtant, des discussions directes entre la Syrie et Israël ont déjà commencé. Ces négociations, amorcées après la chute d’Assad, marquent une rupture avec des décennies d’hostilité ouverte. Mais la méfiance reste forte. Chareh a exprimé ses doutes sur les intentions d’Israël, craignant une volonté d’expansion ou d’influence accrue dans la région.
Une Opportunité Historique ?
Du côté israélien, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a surpris en déclarant récemment que la guerre avec le Hezbollah ouvrait des perspectives de paix avec la Syrie et le Liban. Cette déclaration, bien que vague, suggère une volonté d’explorer de nouvelles dynamiques régionales. Pour la Syrie, un accord avec Israël pourrait non seulement réduire les tensions militaires, mais aussi renforcer sa position sur la scène internationale.
Pour mieux comprendre les enjeux, voici un tableau récapitulatif des positions actuelles :
Pays | Position | Défis |
---|---|---|
Syrie | Ouverte à un accord sécuritaire, mais refuse la reconnaissance immédiate d’Israël. | Méfiance historique, colère face à Gaza, pressions internes. |
Israël | Exprime une volonté de paix, mais maintient des frappes militaires. | Crainte d’instabilité régionale, tensions avec d’autres voisins. |
Les Défis d’une Diplomatie Fragile
Si la volonté de dialogue est réelle, les obstacles restent nombreux. La Syrie, encore fragilisée par des années de guerre civile, doit jongler entre ses ambitions de reconstruction et les pressions internationales. Chareh, en tant que nouveau dirigeant, doit également composer avec une opinion publique marquée par des décennies d’hostilité envers Israël. Toute tentative de normalisation trop rapide pourrait être perçue comme une trahison par une partie de la population.
En parallèle, Israël doit démontrer sa bonne foi. Les frappes répétées sur le territoire syrien, bien que justifiées par Tel-Aviv comme des mesures de sécurité, sont un frein majeur à la confiance. Un accord durable nécessitera des concessions de part et d’autre, un défi de taille dans un contexte régional aussi volatile.
Quel Avenir pour la Région ?
La démarche d’Ahmad al-Chareh, bien que prudente, ouvre une fenêtre d’opportunité pour la paix au Moyen-Orient. Cependant, la route vers un accord reste semée d’embûches. Les négociations en cours pourraient redéfinir les équilibres régionaux, mais elles exigent une confiance mutuelle encore absente. La question centrale demeure : la Syrie et Israël peuvent-elles surmonter leur passé pour bâtir un avenir commun ?
Pour l’instant, Chareh joue la carte de la prudence, évitant toute reconnaissance officielle d’Israël tout en ouvrant la porte à un dialogue sécuritaire. Cette stratégie, à mi-chemin entre fermeté et ouverture, reflète les complexités d’un Moyen-Orient en constante mutation. Les mois à venir seront décisifs pour déterminer si cette initiative portera ses fruits ou si elle restera une simple parenthèse diplomatique.
Points clés à retenir :
- Ahmad al-Chareh cherche un accord sécuritaire avec Israël.
- La reconnaissance d’Israël est écartée pour l’instant.
- Les tensions autour de Gaza et du Golan compliquent les discussions.
- Les négociations directes marquent une rupture avec le passé.
En conclusion, la démarche syrienne, bien que fragile, pourrait poser les bases d’une nouvelle dynamique régionale. Mais pour que cet espoir se concrétise, il faudra surmonter des décennies de méfiance et répondre aux attentes d’une population marquée par les conflits. Le chemin vers la paix reste long, mais les premiers pas sont posés.