Au cœur de la tragédie syrienne, une famille se bat inlassablement pour retrouver une mère et ses six enfants, disparus dans les méandres des prisons du régime. Leur histoire, poignante et bouleversante, met en lumière les horreurs de la guerre civile et l’espoir inébranlable de ceux qui cherchent leurs proches engouffrés par la machine répressive.
Une Disparition qui Hante la Famille Abassi
Rania Abassi, dentiste et ancienne championne d’échecs, a disparu avec ses six enfants en mars 2013, deux jours seulement après l’arrestation de son mari, Abdel Rahmane Yassine. Depuis, sa famille installée en Arabie saoudite vit dans l’angoisse et l’incertitude, sans nouvelles de leurs proches.
Neila, la sœur de Rania, confie : « L’espoir de la retrouver s’est ravivé ces derniers jours. On espérait la voir émerger avec ses enfants de l’une des prisons dont les portes ont été ouvertes par les rebelles. » Un espoir ténu mais vivace, nourri par chaque information, chaque témoignage émergeant de cet enfer carcéral.
Un Destin Tragique Révélé par des Photos Glaçantes
Un an après la disparition de Rania, la famille a acquis la terrible conviction que son mari avait trouvé la mort. Son corps a été identifié parmi les milliers de clichés effroyables pris entre 2011 et 2013, documentant les tortures et les meurtres dans les geôles syriennes. Ces photos, exfiltrées par un ancien photographe de la police militaire sous le pseudonyme de « César », ont révélé au monde l’ampleur des atrocités commises.
Face à cette tragédie, les proches de Rania s’accrochent à l’espoir ténu de la retrouver vivante avec ses enfants, âgés de 2 à 14 ans lors de leur arrestation. Mais ils se disent prêts à se contenter « au moins d’une sépulture » si le pire devait être confirmé.
Une Dentiste Apolitique Happée par la Répression
Rania, décrite comme apolitique par sa famille, avait exercé pendant dix ans en Arabie saoudite avant de rentrer en Syrie en 2008. Malgré le début du soulèvement en 2011, elle avait choisi de rester, sans pour autant s’opposer ouvertement au régime de Bachar al-Assad.
Mais un simple geste de générosité – la distribution de colis alimentaires à des familles déplacées de Homs – a suffi à attirer l’attention des autorités. Un acte anodin qui lui a valu, ainsi qu’à ses enfants, d’être engloutis par la spirale infernale des disparitions forcées.
Une Quête de Vérité Semée d’Embûches
Comme tant d’autres Syriens, la famille Abassi a remué ciel et terre pour tenter de localiser Rania et ses enfants. Des sommes faramineuses ont été versées à d’anciens agents du régime, dans l’espoir d’obtenir une information, une piste. En vain.
Aujourd’hui, alors que la chute de Bachar al-Assad semble se profiler, les proches se mobilisent à nouveau. Ils écument les bureaux de sécurité abandonnés à Damas, scrutent chaque document, chaque dossier. Une quête épuisante et douloureuse, animée par un mince espoir.
Nous sommes à la recherche de n’importe quelle information qui puisse nous permettre de savoir si elle est vivante ou si elle a connu le martyre. Nous voulons au moins une sépulture pour eux… On est en droit de connaître leur tombeau.
Neila, sœur de Rania Abassi
Face à l’horreur et à l’incertitude, l’espoir demeure le moteur de ces familles brisées. Un espoir fragile mais vital, qui les pousse à continuer inlassablement leurs recherches. Car dans l’enfer syrien, retrouver ses proches disparus, morts ou vifs, reste pour beaucoup le dernier combat à mener. Un combat pour la vérité, la justice et la dignité, afin que les victimes ne sombrent pas dans l’oubli et que leurs bourreaux répondent un jour de leurs crimes.