Les rues de la capitale du Suriname, Paramaribo, ont été le théâtre d’un événement hors du commun ce samedi. Des milliers de fidèles de l’ex-dictateur Desi Bouterse se sont rassemblés pour lui rendre un dernier hommage lors de funérailles grandioses qui ont ému tout le pays.
Un dernier voyage pour « Papa Bouta »
Vêtu d’un uniforme militaire, le corps de Bouterse a été transporté de la morgue jusqu’à sa résidence, escorté par un imposant cortège de voitures, cars et motos. Ensuite direction le siège de son parti politique, le Parti National Démocratique (PNC), pour un ultime hommage avant l’incinération. Les proches de l’ex-dirigeant, eux aussi en uniforme, ont marché à pied dans le cortège.
Dans la foule, l’émotion était palpable. Dennis Keyzer, un partisan du PNC, a crié son amour pour celui qu’il surnomme affectueusement « Papa Bouta ». Un cri du cœur repris en chœur par de nombreux admirateurs de l’ancien homme fort du Suriname.
Une mort dans la clandestinité
Bouterse, âgé de 79 ans, est décédé les 23 ou 24 décembre dernier des suites d’une grave insuffisance hépatique liée à une « consommation chronique d’alcool », selon les conclusions de l’autopsie. Au moment de sa mort, il se cachait pour échapper à sa condamnation à 20 ans de prison prononcée en décembre 2023 pour l’exécution d’opposants en 1982.
Son corps aurait été transféré jusqu’à son domicile par des « inconnus », d’après des témoignages. Une enquête est en cours pour faire la lumière sur sa cachette et les conditions de ce mystérieux transfert posthume. Les autorités avaient exclu des funérailles d’État, mais les drapeaux étaient malgré tout en berne sur les bâtiments officiels en signe de deuil.
Retour sur le parcours controversé de Bouterse
Desi Bouterse, alors sergent-major dans l’armée, avait pris le pouvoir une première fois en 1980 à l’âge de 34 ans lors d’un coup d’État. Sept ans plus tard, sous la pression internationale, il s’était retiré. Mais en 1990, il était revenu à la tête du pays suite à un second putsch, sans effusion de sang cette fois. Son « règne » n’avait duré qu’un an.
En 2010, il avait été élu président démocratiquement, un poste qu’il occupera jusqu’en 2020. Malgré les zones d’ombre de son passé, il bénéficiait d’une grande popularité auprès d’une partie de la population surinamaise qui voyait en lui un leader charismatique.
Désiré Delano Bouterse restera une figure marquante et clivante de l’histoire du Suriname. Adulé par les uns, honni par les autres, il aura imprimé sa marque sur ce petit pays d’Amérique du Sud pendant plus de quatre décennies.
– Un observateur politique
Sa dernière apparition publique
Ironie du sort, la dernière apparition publique de Bouterse de son vivant remonte au 18 décembre 2023, soit deux jours avant la confirmation de sa condamnation. Un jugement qui aura finalement précipité sa fin, le contraignant à une vie de fugitif.
Mais pour ses fidèles, rassemblés une dernière fois pour lui dire adieu, Desi Bouterse restera à jamais « Papa Bouta », le leader vénéré qui a marqué l’histoire de son pays. Un héritage complexe et contrasté, à l’image du personnage.