Le juge a tranché : Steve Bannon, l’ex-conseiller sulfureux de Donald Trump, devra commencer à purger sa peine de prison de 4 mois d’ici le 1er juillet. Jugé coupable d’entrave aux prérogatives d’enquête du Congrès dans l’affaire de l’assaut du Capitole, Bannon paie le prix fort pour son refus de coopérer. Mais loin de se faire discret, l’idéologue populiste contre-attaque et promet un “raz-de-marée” républicain aux prochaines élections.
Bannon, architecte de l’ombre du trumpisme
Figure centrale de l’alt-right américaine, Steve Bannon a été l’un des artisans de la victoire surprise de Trump en 2016. Ancien banquier d’affaires reconverti dans le militantisme politique, il a théorisé et propagé un populisme nationaliste virulent, dénonçant les élites “mondialistes”. Propulsé conseiller stratégique à la Maison Blanche, il en sera écarté dès 2017 mais continuera d’exercer une influence certaine sur le président.
L’ombre du Capitole
Mais c’est surtout son rôle dans les événements du 6 janvier 2021 qui vaudra à Bannon ses déboires judiciaires. Ce jour-là, une foule de partisans de Trump prend d’assaut le Capitole pour tenter d’empêcher la certification de l’élection de Joe Biden. Dans les mois qui précèdent, Bannon avait multiplié les appels à contester les résultats, évoquant même une possible “révolution“. Il avait aussi échangé au téléphone avec le président le matin même des incidents.
“Tout ce que je vais dire, c’est ce jour, 6 janvier, est le point de départ de tout. C’est le premier jour de la guerre qu’ils nous ont menée.”
Steve Bannon, le 5 janvier 2021 dans son podcast “War Room”
Entrave à la justice
Après l’assaut du Capitole, une commission d’enquête parlementaire est mise sur pied. Elle souhaite entendre Bannon comme témoin clé mais ce dernier refuse de se présenter, invoquant le “privilège exécutif” de la Maison Blanche. Un argument balayé par les juges, qui le condamnent à 4 mois de prison ferme et 6500$ d’amende pour entrave aux pouvoirs d’investigation du Congrès.
Mais loin de faire profil bas, Steve Bannon contre-attaque, criant au complot politique et dénonçant une justice instrumentalisée par les démocrates. À la sortie du tribunal, il prédit même une “vague rouge” républicaine aux prochaines élections, galvanisée par son sort :
“Je suis fier d’être un maga légendaire, un ultra maga, et je vais continuer à me battre. Nous renverserons le régime de Biden. Et rien, ne me fera taire.”
Steve Bannon, à la sortie du tribunal le 6 juin 2024
Le soutien de Trump
Comme souvent, Donald Trump n’a pas manqué de voler au secours de son ancien conseiller. Sur Truth social, il dénonce une “totale tragédie américaine” et accuse une nouvelle fois l’administration Biden d’instrumentaliser la justice. Une ligne de défense que devrait lui aussi adopter Trump, lui-même inculpé pour ses tentatives présumées d’inverser les résultats de la présidentielle 2020 dans plusieurs États.
Bannon à l’ombre, le trumpisme toujours en lumière ?
Pour Steve Bannon, l’heure est venue d’expier derrière les barreaux son défi à la justice américaine. Mais sa condamnation ne signe pas pour autant le crépuscule de l’idéologie qu’il a contribué à forger. Car si l’homme est mis sur la touche, ses idées continuent d’animer une partie de la droite américaine et de trouver un large écho chez les électeurs républicains.
Accusé d’avoir soufflé sur les braises de la division, Bannon va purger sa peine avec la satisfaction de voir le pays toujours profondément clivé. Derrière les murs de sa prison, il guettera les prochains soubresauts d’une Amérique déboussolée dont il aura été, pour le meilleur ou pour le pire, l’un des grands agitateurs.