Une étude menée par des chercheurs de la London School of Hygiene and Tropical Medicine jette une lumière crue sur l’ampleur réelle des pertes humaines liées à la guerre qui ravage le Soudan. Selon leurs travaux, le nombre de décès engendrés par ce conflit serait « largement » sous-estimé, révélant une réalité bien plus sombre que ce que laissent entrevoir les bilans officiels.
26 000 morts en 14 mois dans la seule région de Khartoum
L’étude se concentre sur la région de Khartoum, épicentre des affrontements qui opposent depuis avril 2023 l’armée régulière du général Abdel Fattah al-Burhane aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) de son ancien adjoint, le général Mohamed Hamdane Daglo. Sur les 14 premiers mois du conflit, les chercheurs estiment que cette zone a enregistré plus de 61 000 décès toutes causes confondues, soit une hausse de 50% par rapport à la période d’avant-guerre.
Parmi ces morts, 26 000 seraient directement imputables aux violences, un chiffre qui contraste fortement avec les 20 178 décès recensés par l’ONG Acled pour l’ensemble du pays sur la même période. Pour les auteurs de l’étude, ces résultats suggèrent que les pertes humaines sont « largement passées sous les radars ».
Une méthodologie innovante pour mieux cerner la réalité du terrain
Pour parvenir à ces estimations, l’équipe de recherche a compilé des données issues de diverses sources, notamment une enquête publique et des annonces de décès partagées sur les réseaux sociaux. Cette approche novatrice leur a permis d’obtenir une vision plus exhaustive et réaliste de l’impact humain du conflit, là où les canaux traditionnels semblent peiner à rendre compte de l’ampleur du drame.
Nos résultats suggèrent que les décès sont largement passés sous les radars.
– Les chercheurs de la London School of Hygiene and Tropical Medicine
Un conflit qui s’enlise et s’intensifie
Alors que le Soudan s’enfonce dans une spirale de violence depuis la fin du mois d’octobre, avec une intensification des combats et une multiplication des exactions contre les civils, l’ONU a tiré la sonnette d’alarme. Mardi, l’organisation a mis en garde contre une aggravation du conflit, estimant que les deux généraux rivaux semblent « persuadés de pouvoir l’emporter » sur le terrain.
Dans ce contexte, les révélations des chercheurs londoniens apparaissent d’autant plus alarmantes. Elles mettent en lumière non seulement la brutalité des affrontements, mais aussi les limites des outils actuels pour quantifier avec précision les pertes humaines dans les zones de conflit.
Un signal d’alarme pour la communauté internationale
Au-delà du cas soudanais, cette étude soulève des questions cruciales sur notre capacité à appréhender l’impact réel des guerres sur les populations civiles. Elle rappelle l’urgence d’affiner nos méthodes de collecte et d’analyse des données dans ces contextes extrêmes, afin de mieux guider l’action humanitaire et les efforts diplomatiques visant à mettre fin aux conflits.
Face à l’ampleur insoupçonnée du bilan humain révélé par ces travaux, la communauté internationale se doit de réagir avec force et détermination. Il en va de notre responsabilité collective de ne pas laisser ces victimes sombrer dans l’oubli et de tout mettre en œuvre pour que cessent enfin les violences qui ensanglantent le Soudan.