Dans l’État de Gedaref, grenier à maïs du Soudan, les cultivateurs se battent pour sauver une saison des récoltes compromise par plus d’un an de guerre. Les combats entre l’armée soudanaise et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) ont des répercussions désastreuses sur l’agriculture, dans un pays déjà au bord de la famine.
Pénuries de liquidités et de main-d’œuvre
Ahmed Othmane, exploitant agricole à Gedaref, a dû vendre deux de ses véhicules pour financer la récolte de sésame. Il déplore que la guerre ait restreint les déplacements des travailleurs entre régions, limitant la main-d’œuvre disponible.
Notre premier problème a été l’accès aux liquidités en raison de la pénurie causée par la guerre.
Ahmed Othmane, cultivateur
Les banques soudanaises ont été pillées à Khartoum après la prise de contrôle de la capitale par les FSR, entraînant une grave pénurie de liquidités partout dans le pays. Pour pallier le manque de main-d’œuvre locale, certains cultivateurs comme Ahmed Othmane et Souleimane Mohamed ont fait appel à des réfugiés éthiopiens.
Hausse des salaires agricoles
Le manque de travailleurs a entraîné une hausse des salaires, poussant les agriculteurs à se tourner vers la main-d’œuvre étrangère présente dans la région.
Le manque de travailleurs a entraîné une hausse des salaires, ce qui nous pousse à faire appel aux travailleurs présents dans la région, principalement éthiopiens.
Souleimane Mohamed, cultivateur
Une crise alimentaire d’ampleur historique
Alors que plus de 25 millions de Soudanais, soit plus de la moitié de la population, ont besoin d’aide alimentaire selon l’ONU, la mauvaise récolte cette saison risque d’aggraver dramatiquement la situation.
Trois grandes organisations humanitaires ont récemment mis en garde contre une crise de la faim d’une ampleur “historique”, de nombreuses familles étant réduites à se nourrir de feuilles d’arbres et d’insectes.
Des champs laissés en jachère
À Gedaref, certains agriculteurs ont déjà dû abandonner la saison, faute de moyens. Othmane Abdelkarim explique que la plupart ont dû s’autofinancer, et que certains n’ont même pas pu semer.
Cette crise retardera la récolte et altérera la qualité.
Othmane Abdelkarim, agriculteur à Gedaref
Avant la guerre, l’État de Gedaref cultivait environ 20 millions d’acres par an, produisant plus de six millions de tonnes de maïs, suffisamment pour nourrir la population. Cette année, seuls neuf millions d’acres ont été semés.
Des pertes importantes anticipées
Souleimane Mohamed anticipe d’importantes pertes et prévoit qu’une partie de la récolte sera perdue. Un constat alarmant dans un pays où la famine menace déjà des millions de personnes.
Si la communauté internationale ne se mobilise pas rapidement pour soutenir les agriculteurs soudanais et acheminer l’aide alimentaire, le pays pourrait basculer dans une catastrophe humanitaire sans précédent. La guerre, en compromettant dangereusement la sécurité alimentaire, met en jeu la survie de toute une population.