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Soudan : Drame Au Darfour Et Crise Humanitaire Au Kordofan

Une frappe de drone a fait dix morts sur un marché bondé au Darfour-Nord. Pendant ce temps, au Kordofan, les humanitaires fuient une ville encerclée où la famine est officiellement déclarée. Comment cette guerre, qui divise le Soudan en deux depuis plus de deux ans, continue-t-elle à plonger des millions de civils dans l'horreur ?

Imaginez un marché animé en pleine effervescence, des étals colorés chargés de marchandises, des voix qui se mêlent dans l’air chaud du désert. Soudain, un sifflement dans le ciel, puis l’explosion. Dix vies fauchées en un instant. C’est la réalité brutale qu’a vécue la petite ville d’Al-Malha, au Darfour-Nord, ce samedi-là.

Ce drame n’est malheureusement pas isolé dans un pays déchiré par une guerre impitoyable depuis avril 2023. Les affrontements opposent l’armée régulière aux Forces de soutien rapide (FSR), des paramilitaires qui contrôlent désormais de vastes territoires à l’ouest. Et pendant que les combats font rage, ce sont les civils qui paient le prix le plus lourd.

Un conflit qui s’enlise et s’étend

Depuis près de trois ans, le Soudan est coupé en deux. D’un côté, les zones tenues par l’armée dans le nord, l’est et le centre. De l’autre, l’ouest et certaines parties du sud sous le contrôle des FSR et de leurs alliés. Ce partage territorial reflète une lutte de pouvoir sans merci qui a déjà coûté des dizaines de milliers de vies et déplacé des millions de personnes.

Au Darfour, région historiquement marquée par la violence, les paramilitaires ont consolidé leur emprise. La chute d’El-Facher en octobre, capitale du Darfour-Nord, a provoqué un exode massif : plus de 107 000 civils ont fui selon les derniers chiffres de l’Organisation internationale pour les migrations.

La frappe mortelle d’Al-Malha

Al-Malha, située à l’extrême nord du Darfour, près de la frontière libyenne, est tombée aux mains des FSR dès mars dernier. Samedi, un drone a visé un marché de la ville. L’attaque a tué dix personnes et déclenché un incendie qui a ravagé plusieurs commerces.

Des groupes de secouristes bénévoles, qui sillonnent le pays pour porter assistance et documenter les exactions, ont rapporté les faits le lendemain. Aucun responsable n’a été clairement identifié, et ni l’armée ni les paramilitaires n’ont commenté l’incident.

Ces frappes aériennes sont devenues une arme courante dans ce conflit asymétrique. Elles touchent souvent des zones civiles, transformant des lieux de vie quotidienne en scènes de chaos.

Le Kordofan, nouveau théâtre des hostilités

Après avoir sécurisé une grande partie du Darfour, les FSR ont déplacé leur offensive vers le Kordofan, région stratégique riche en pétrole, en or et en terres agricoles. Trois États composent ce vaste territoire où les communications sont largement coupées et l’accès à internet très limité.

Kadougli, capitale du Kordofan-Sud, est encerclée depuis dix-huit mois. La situation y est devenue intenable. Les organisations humanitaires ont récemment évacué tout leur personnel face à la dégradation rapide de la sécurité.

Cette décision fait suite au retrait de la base logistique des Nations unies. Plus de 50 000 civils ont fui la région depuis la fin octobre, d’après les estimations internationales.

L’ONU alerte sur le risque de voir se reproduire les atrocités déjà documentées à El-Facher : massacres ciblés, violences sexuelles, enlèvements visant particulièrement certaines communautés.

Une famine officiellement reconnue

À Kadougli, la famine a été confirmée dès novembre par les instances onusiennes. Les habitants, coincés par les combats, en sont réduits à chercher de la nourriture dans la forêt environnante.

Ce niveau extrême de crise alimentaire n’est pas surprenant dans un pays où le conflit a détruit les chaînes d’approvisionnement et empêché l’acheminement de l’aide. Des zones entières sont inaccessibles aux convois humanitaires.

La famine ne frappe pas seule. Elle s’accompagne d’une détérioration générale des conditions de vie, rendant les populations encore plus vulnérables aux maladies.

Explosion des cas de rougeole au Darfour

Médecins sans Frontières tire la sonnette d’alarme : depuis septembre, plus de 1 300 cas de rougeole ont été pris en charge dans la région du Darfour. Cette épidémie menace surtout les enfants.

Les obstacles sont multiples : retards dans le transport des vaccins, lourdeurs administratives pour obtenir les autorisations, manque de coordination entre les autorités et les partenaires humanitaires. Résultat, des milliers d’enfants restent sans protection.

Le système de santé soudanais, déjà fragile avant la guerre, s’est effondré sous les coups des combats. Hôpitaux bombardés, personnel médical en fuite, pénurie de médicaments : tout concourt à laisser les maladies infectieuses se propager librement.

Les conséquences humaines d’une guerre oubliée

Derrière les chiffres se cachent des histoires individuelles déchirantes. Des familles séparées, des enfants orphelins, des villages entiers abandonnés. Le conflit a créé la pire crise de déplacements au monde, avec des millions de personnes contraintes de tout quitter.

Les femmes et les enfants sont particulièrement touchés. Violences sexuelles utilisées comme arme de guerre, recrutement forcé, malnutrition aiguë : les rapports internationaux dressent un tableau accablant.

Et pourtant, cette guerre reste largement en marge de l’attention médiatique mondiale, éclipsée par d’autres crises. Les appels à l’aide se multiplient, mais les réponses restent insuffisantes.

Pourquoi ce conflit perdure-t-il ?

Les racines du affrontement remontent à la lutte pour le pouvoir entre les deux généraux qui dirigeaient autrefois le pays ensemble. Après le soulèvement populaire de 2019 qui avait chassé Omar el-Béchir, les militaires avaient promis une transition démocratique. Mais les ambitions personnelles ont rapidement pris le dessus.

Aujourd’hui, aucun camp ne semble prêt à céder. Les FSR contrôlent un tiers du territoire et des ressources économiques cruciales. L’armée, soutenue par certains voisins, conserve les grandes villes et le nord.

Les tentatives de médiation internationale peinent à aboutir. Les cessez-le-feu proclamés sont systématiquement violés. Et pendant ce temps, la souffrance des civils ne fait qu’augmenter.

L’urgence d’une réponse internationale coordonnée

Face à l’ampleur de la crise, les organisations humanitaires demandent un accès sans entrave aux zones touchées. Mais les combats et les restrictions imposées par les deux camps compliquent terriblement leur travail.

La communauté internationale doit intensifier la pression pour obtenir un cessez-le-feu durable et l’ouverture de couloirs humanitaires. Sans cela, les drames comme celui d’Al-Malha ou la famine de Kadougli se multiplieront.

Il est temps de replacer le Soudan au centre des priorités. Car derrière chaque statistique se trouve un être humain dont la vie est menacée par une guerre qui n’aurait jamais dû atteindre cette ampleur.

Chaque jour qui passe sans solution politique condamne un peu plus les Soudanais à l’enfer. La frappe d’Al-Malha et l’évacuation de Kadougli ne sont que les derniers symptômes d’une crise qui ronge le pays de l’intérieur.

Le monde ne peut plus détourner le regard. L’histoire jugera ceux qui ont laissé cette tragédie se poursuivre sans agir avec détermination.

(Note : cet article s’appuie sur les informations disponibles au 21 décembre 2025. La situation évolue rapidement et mérite une attention continue.)

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